NANTERRE: Jeux d’eau, bac à sable et barbes à papa: des myriades d’enfants gambadent sur la plage de Nanterre dont l'ouverture estivale sur le terrain du stade Gabriel-Péri a été maintenue, quelques jours après la fin des émeutes.
"Annuler les activités aurait été une double punition", estime Meryem Baghdadi, 35 ans, chercheuse au CNRS et habitante du quartier du Mont-Valérien.
"Nous avons déjà perdu un enfant de notre ville, les autres ne doivent pas souffrir d'un manque d'activités", poursuit-t-elle, en référence à Nahel, tué par un policier à Nanterre lors d'un contrôle routier le 27 juin.
Un sentiment partagé par toutes les familles et les animateurs interrogées par l'AFP sur place. "Les gens ont besoin de ça pour passer à autre chose" et d'oublier le contexte "anxiogène", juge Adrien Ziza, 28 ans, éducateur sportif stagiaire à la plage de Nanterre.
La ville a été l'épicentre des émeutes qui ont suivi la mort de Nahel et a souffert de nombreuses dégradations: une salle de concert, un centre de loisirs et un centre social ont été totalement détruits, deux écoles et un autre centre de loisirs endommagés, occasionnant plusieurs millions d'euros de dommages selon la municipalité.
Pour autant, "pas question" pour la mairie de Nanterre de pénaliser les 2.300 enfants accueillis par les centres de loisirs de la ville.
"Le contexte a ajouté à la pertinence de maintenir cette plage", convient Zahra Boudjemaï, première adjointe au maire, pour qui maintenir les espaces de loisirs proposés par la ville permet de commencer à "se réparer tous ensemble".
Urgence
A une vingtaine de kilomètres plus à l'ouest, à Poissy (Yvelines), un centre social du quartier Saint-Exupéry censé accueillir des activités en juillet a été incendié.
Dans l'urgence, des barnums ont été disposés dans le jardin attenant et deux camions itinérants sont passés proposer des activités aux enfants, de l'initiation à l'astronomie aux plus classiques jeux de société.
"Le jour où ça a brûlé, je suis presque tombée malade, on s'est effondrées avec les autres mamans", se souvient Kadidia Coulibaly, 38 ans, secrétaire assistante et adhérente du centre qui se dit "soulagée" de pouvoir malgré tout assister aux activités avec ses enfants.
"C'est un message qu'on envoie: on ne baisse pas les bras", réagit la maire DVD de cette ville d'environ 40.000 habitants, Sandrine Berno Dos Santos, reconnaissant cependant que ces solutions "restent provisoires".
A de rares exceptions près, de nombreux maires franciliens issus de divers bords de l'échiquier politique ont choisi de maintenir coûte que coûte les activités proposées aux jeunes.
«Ressouder les liens»
À Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), où un dépôt de bus de la RATP a brûlé et endommagé la façade d'une piscine qui servira de centre d'entraînement pour les Jeux olympiques, toutes les activités des centres de loisirs et sorties d'enfants ont été maintenues.
"Aubervilliers est une ville avec beaucoup de fragilités, de populations qui ne peuvent pas partir en vacances. On ne peut pas les punir suite aux actes des émeutiers", a expliqué à l'AFP la mairie.
Même son de cloche à Garges-lès-Gonesse dans le Val-d'Oise, qui a vu son hôtel de ville ravagé par un incendie mais maintenu "plus que jamais" les activités de ses centres socio-culturels et associations sportives durant l'été.
"Il faut ressouder les liens et ne pas faire double peine", a déclaré à l'AFP son maire UDI Benoît Jimenez.
Au-delà d'éviter de pénaliser davantage les habitants, maintenir les activités estivales "permet d'apaiser, d'encadrer et de s'évader, pour certaines familles qui n'ont pas les moyens de partir", a jugé pour l'AFP Jean-Philippe Gautrais, maire Nupes de Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne) où a notamment brûlé un théâtre.
"Notre vocation, souligne l'élu, reste de permettre d'avoir des moments de vivre-ensemble".