A un an des Jeux, un engouement encore timide en Seine-Saint-Denis

Des membres du public regardent depuis un pont un groupe de personnes nageant dans la Seine depuis un bateau à l'Ile-Saint-Denis, au nord de Paris, le 2 juillet 2023. Il est toujours interdit de se baigner dans la Seine, mais à un an des Jeux Olympiques, qui devraient inaugurer les retrouvailles entre cette pratique et le fleuve, un groupe de nageurs pionniers ne craint ni la pollution, ni la police. (Photo de Geoffroy Van der Hasselt / AFP)
Des membres du public regardent depuis un pont un groupe de personnes nageant dans la Seine depuis un bateau à l'Ile-Saint-Denis, au nord de Paris, le 2 juillet 2023. Il est toujours interdit de se baigner dans la Seine, mais à un an des Jeux Olympiques, qui devraient inaugurer les retrouvailles entre cette pratique et le fleuve, un groupe de nageurs pionniers ne craint ni la pollution, ni la police. (Photo de Geoffroy Van der Hasselt / AFP)
Short Url
Publié le Dimanche 23 juillet 2023

A un an des Jeux, un engouement encore timide en Seine-Saint-Denis

  • D'après les résultats d’une étude de l'institut Harris interactive menée l’été dernier, 82% des répondants se disaient favorables aux Jeux, le pourcentage étant plus élevé chez les ouvriers et employés que chez les cadres
  • «Sur les Jeux olympiques eux-mêmes, je pense que c'est dans les six derniers mois que d'un coup il y aura une prise de conscience de cette réalité», estime le maire LR Xavier Lemoine

PARIS : Entre ceux qui préfèrent les regarder à la télévision, ceux qui ont hâte et ceux qui ignorent l'existence d'une billetterie, l'engouement des habitants de Seine-Saint-Denis pour les JO-2024 qui se tiendront en grande partie dans leur département dans un an reste timide.

Rencontrée rue de l'Olympisme à Saint-Denis, une voie qui mène au Stade de France, Patricia ne cache pas son faible attrait pour l'événement censé amener développement économique et bienfaits en terme d'image et d'infrastructures à ce département populaire et pauvre.

«Si mon employeur m'autorise le télétravail complet, je pars loin et je mets mon logement sur Airbnb», anticipe cette cadre chez Plaine Commune, qui ne donne pas son nom, «légèrement agoraphobe» et découragée par les bouchons en vue.

Yasmine Silva, une auxiliaire de puériculture en congé maternité, a déjà tranché : «J'aime bien les regarder à la télé, en plus il y a les commentateurs, tu vis plus le truc», explique cette amatrice de 28 ans. «Je ne savais même pas qu'on pouvait acheter des places», s'étonne son amie, Dounia Ahmed.

Pour cette secrétaire de 27 ans, le point positif des Jeux est que «ça débloque des emplois». «Ça donne des opportunités à la jeunesse de Seine-Saint-Denis de s'ouvrir et faire des connaissances qui pourront alimenter leur carnet d'adresses».

«J'ai hâte, je suis excité. Depuis petit je suis fan de sport, surtout des Jeux, pour moi c'est une occasion importante», s'enthousiasme par téléphone Mohamed Traore, habitant de Saint-Denis de 22 ans, qui a candidaté pour être bénévole.

Pour ce sportif touche-à-tout (taekwondo, volley, hand, foot), «les JO c'est quelque chose d'unique. Etre à côté des athlètes, c'est rare».

A un an de l'échéance, il est difficile de mesurer de manière précise l'intérêt pour les Jeux.

L'été dernier, le conseil départemental avait commandé une étude à l'institut Harris interactive. D'après ses résultats, 82% des répondants se disaient favorables aux Jeux, le pourcentage étant plus élevé chez les ouvriers et employés que chez les cadres. Une nouvelle étude doit être publiée en octobre.

«Dans les villes, y compris où il n'y a pas de sites ni d'épreuves, on sent qu'il y a quand même un engouement depuis le dévoilement du parcours de la flamme», a déclaré le département à l'AFP. Les 25 et 26 juillet 2024, la flamme olympique traversera 21 des 40 communes de la Seine-Saint-Denis.

- «Dynamique olympique forte» -

Pour les villes accueillant épreuves et infrastructures, les Jeux sont matériellement présents dans l'espace.

A Dugny, site du Village des médias, «on commence à nous poser des questions: +est-ce qu'on va avoir des places ? Qu'est-ce qui va se passer dans la ville?+», témoigne le maire DVD Quentin Gesell.

«On a des commerçants qui espèrent que les journalistes se promèneront dans Dugny. Même l'église et la mosquée se préparent à les accueillir», ajoute l'édile.

Depuis plus de deux ans, le Comité départemental olympique et sportif (CDOS) organise des après-midis d'initiation sportive dans l'espace public pour les habitants.

«On est rentrés dans une dynamique olympique très forte au niveau de tous les acteurs: les communes, les écoles, Pôle emploi, les MJC (maisons des jeunes et de la culture), tout le monde veut faire des projets autour de l'olympisme, mon téléphone n'a jamais autant sonné», raconte Antoine Toillier, en charge du projet «24 sites pour 2024» soutenu par le Comité d'organisation (Cojo) et le département.

«Au niveau de la population, c'est plutôt bien reçu», ajoute le coordinateur sportif, qui rapporte toutefois des remarques négatives sur les prix des billets. «La population se sent exclue de l'événement», note-t-il.

Des animations, en plus de celles déjà proposées par la commune, auront prochainement lieu à Montfermeil, ville non-hôte de l'est du département.

«Sur les Jeux olympiques eux-mêmes, je pense que c'est dans les six derniers mois que d'un coup il y aura une prise de conscience de cette réalité», estime le maire LR Xavier Lemoine.

Pour les habitants et collectivités, outre la phase intense des Jeux, le regard et les attentes sont déjà tournés vers l'héritage promis à la Seine-Saint-Denis: infrastructures sportives, logements et changement de l'image du département, trop souvent négative et stéréotypée.


Après les tensions, Paris et Alger entament un nouveau chapitre

Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise. (AFP)
Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise. (AFP)
Short Url
  • Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune ont décidé de relancer les échanges bilatéraux
  • L'échange téléphonique a permis de formaliser une feuille de route ambitieuse et pragmatique

Après avoir frôlé la rupture, un nouveau chapitre s'ouvre dans les relations entre la France et l'Algérie.

Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise.

Le communiqué publié par le palais de l'Élysée fait suite à plusieurs signes récents de rapprochement, notamment l'entretien accordé par Tebboune aux journalistes des médias publics algériens, où il a exprimé sa volonté de renouer le dialogue avec son homologue français et de mettre fin à ce qu'il a qualifié de «période d'incompréhension» entre leurs deux pays.

L'échange téléphonique a permis de formaliser une feuille de route ambitieuse et pragmatique, centrée sur trois axes prioritaires: la coopération sécuritaire, la gestion des flux migratoires et les questions mémorielles.

Le communiqué conjoint, publié à l’issue de cet échange, souligne la volonté des deux chefs d’État de dépasser les crises récentes pour amorcer une relation apaisée et mutuellement bénéfique.

Premier résultat concret dans le cadre de cette volonté affichée, le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot se rend à Alger le 6 avril pour des entretiens avec son homologue algérien Ahmed Attal.

Les ministres devront détailler un programme de travail ambitieux et en décliner les modalités opérationnelles et le calendrier de mise en œuvre.

La coopération sécuritaire doit reprendre sans délai, notamment pour lutter contre le terrorisme au Sahel et sécuriser les frontières de la région.

La gestion des migrations irrégulières et la question des réadmissions de ressortissants algériens en situation irrégulière en France sont au cœur des discussions. 

Cette dynamique s’inscrit dans la continuité de l’engagement du président français, exprimé dès le début de son premier mandat et même avant, lors de sa campagne électorale en Algérie, où il avait qualifié la colonisation de «crime contre l’humanité».

Plus tard et dès son élection en 2017, Macron a affiché sa volonté de regarder «la vérité en face». Sa première visite officielle en Algérie marquait la priorité qu’il entend donner à la relation franco-algérienne, en posant les bases d’un dialogue sincère et apaisé. 

Cet engagement a été réaffirmé par la déclaration d’Alger en août 2022, qui prévoyait la mise en place d’une «commission mixte des historiens» chargée d’examiner les archives et de favoriser une meilleure compréhension mutuelle.

Les enjeux de ce rapprochement, dont l’objectif est la poursuite du travail de refondation des relations bilatérales, dépassent le cadre strictement bilatéral et s’inscrivent dans un contexte géopolitique et sécuritaire complexe.

La coopération entre Paris et Alger est essentielle pour répondre aux défis régionaux, notamment dans le Sahel, où le terrorisme et l’instabilité menacent la sécurité de l’Afrique du Nord et de l’Europe. 

La France et l’Algérie partagent un intérêt commun pour la lutte contre les groupes armés et leur coopération stratégique revêt une importance capitale pour stabiliser la région.

La gestion des flux migratoires reste un point de tension récurrent, car si la France souhaite des mécanismes de réadmission efficaces, l’Algérie demande le respect de la dignité et des droits de ses ressortissants. 

Malgré la volonté de réconciliation affichée, le dossier mémoriel reste un obstacle majeur.

La question des excuses officielles pour les crimes coloniaux demeure sensible. Si Emmanuel Macron a reconnu des «crimes contre l’humanité» en 2017, les demandes d’excuses formelles de l’Algérie n’ont pas encore été pleinement satisfaites. 

Les travaux de la commission mixte des historiens, lancés à l’été 2022, doivent permettre d’approfondir la recherche sur cette période sombre et de poser les bases d’un dialogue apaisé.

Malgré les gestes d’ouverture, les relations entre Paris et Alger restent fragiles, en partie en raison d’une méfiance réciproque, alimentée par des perceptions contradictoires des enjeux bilatéraux.

L’un des points de friction les plus marquants est la question du Sahara occidental. La position française, perçue comme favorable au Maroc, a suscité des crispations du côté algérien, allant jusqu’au rappel de l’ambassadeur d’Algérie en France. 

Pour Alger, le soutien implicite de Paris au plan d’autonomie marocain est perçu comme un alignement qui remet en cause l’équilibre diplomatique régional.

Bien que la France ait tenté de clarifier sa position, en affirmant vouloir accompagner une dynamique internationale de sortie de crise, ce dossier demeure une source de tension. 

Au-delà des relations diplomatiques, les opinions publiques des deux pays jouent un rôle crucial dans l’évolution du partenariat.

En Algérie, une partie de la population reste méfiante vis-à-vis des intentions françaises, nourrie par un sentiment de souveraineté exacerbée et par la mémoire toujours vive des exactions coloniales. 

En France, la question algérienne suscite également des clivages politiques. Certains considèrent les gestes mémoriels comme une forme de repentance excessive, tandis que d’autres appellent à une reconnaissance plus franche des torts commis pendant la colonisation. 

La relance des relations entre la France et l’Algérie repose sur un équilibre délicat entre la reconnaissance du passé, la gestion des défis actuels et la mise en œuvre d’une coopération tournée vers l’avenir. 

Malgré la volonté politique manifeste, la concrétisation de ce partenariat dépendra de la capacité des deux dirigeants à dépasser les clivages historiques et à impulser une dynamique durable.


Paris entend résoudre les tensions avec Alger « sans aucune faiblesse »

le chef de la diplomatie française, chef de la diplomatie française (Photo AFP)
le chef de la diplomatie française, chef de la diplomatie française (Photo AFP)
Short Url
  • Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ».
  • « L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

PARIS : Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ». Il s'exprimait au lendemain d'un entretien entre les présidents français et algérien, qui visait à renouer le dialogue après huit mois de crise diplomatique sans précédent.

« Les tensions entre la France et l'Algérie, dont nous ne sommes pas à l'origine, ne sont dans l'intérêt de personne, ni de la France, ni de l'Algérie. Nous voulons les résoudre avec exigence et sans aucune faiblesse », a déclaré Jle chef de la diplomatie française devant l'Assemblée nationale, soulignant que « le dialogue et la fermeté ne sont en aucun cas contradictoires ».

« L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

Les Français « ont droit à des résultats, notamment en matière de coopération migratoire, de coopération en matière de renseignement, de lutte contre le terrorisme et au sujet bien évidemment de la détention sans fondement de notre compatriote Boualem Sansal », a affirmé le ministre en référence à l'écrivain franco-algérien condamné jeudi à cinq ans de prison ferme par un tribunal algérien. 


Algérie: Macron réunit ses ministres-clés au lendemain de la relance du dialogue

Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
Short Url
  • Emmanuel Macron  réunit mardi plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune
  • Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales.

PARIS : Emmanuel Macron  réunit mardi à 18H00 plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune pour relancer le dialogue, a appris l'AFP de sources au sein de l'exécutif.

Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales après des mois de crise, selon le communiqué conjoint publié lundi soir.

Le ministre français de la Justice, Gérald Darmanin, effectuera de même une visite prochainement pour relancer la coopération judiciaire.

Le communiqué ne mentionne pas en revanche le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, figure du parti de droite Les Républicains, partisan d'une ligne dure à l'égard de l'Algérie ces derniers mois, notamment pour obtenir une nette augmentation des réadmissions par le pays de ressortissants algériens que la France souhaite expulser.

Bruno Retailleau sera présent à cette réunion à l'Élysée, avec ses deux collègues Barrot et Darmanin, ainsi que la ministre de la Culture, Rachida Dati, et celui de l'Économie, Éric Lombard, ont rapporté des sources au sein de l'exécutif.

 Dans l'entourage du ministre de l'Intérieur, on affirme à l'AFP que si la relance des relations décidée par les deux présidents devait bien aboutir à une reprise des réadmissions, ce serait à mettre au crédit de la « riposte graduée » et du « rapport de force » prônés par Bruno Retailleau.