MOLIETS-ET-MAÂ, France : Effarouchant oiseaux et naturistes au passage, un véhicule de la police municipale sillonne le sable en direction d'une cohorte de surfeurs: à Moliets-et-Maâ (Landes) où la pratique a explosé, la plage est sous surveillance pour apaiser les conflits de voisinage.
Au cœur des tensions, l'embouchure du courant d'Huchet, entre océan, dunes et réserve naturelle de l'Amazonie landaise. Un paysage de carte postale où se pressent chaque été des milliers d'adeptes.
D'un côté, la zone régie par la mairie, où exercent les écoles françaises de surf; au nord, une zone non réglementée: le terrain de jeu des «surf camps», en plein essor. Un camping de 23 hectares en accueille sept à lui tout seul, proposant hébergement et cours à une clientèle étrangère et jeune, pas toujours bien vue des locaux.
Le site, préservé, se transforme l'été «en zone de non-droit», selon la municipalité. «Par moments, ils s'appropriaient les lieux et priaient les vacanciers, pêcheurs et riverains de partir», décrit Aline Marchand, maire de cette petite commune de 1.300 habitants qui accueille plus de 20.000 vacanciers.
Chargée de la sécurité des plages, l'édile a passé la saison dernière à gérer les conflits entre moniteurs et les plaintes de plagistes et riverains. Une pétition en ligne - «Stop à la surpopulation des camps de surfs étrangers» - lancée par des habitants de Moliets-et-Maâ a fini d'exacerber les tensions.
- Marée humaine -
«Ça devient dangereux de se baigner avec 200 surfeurs à l'eau. On en a ras-le bol de ne pas pouvoir profiter de la plage correctement», râle Daniel Latour, président de l'association de quartier locale, à l'origine du texte.
Et d'évoquer d'autres nuisances liées, selon lui, à la «marée humaine» venue des surf camps: détritus et excréments retrouvés dans sa propriété, grillage défoncé, bruit à toute heure...
D'aucuns, dans la commune, soupçonnent une poignée de riverains d'avoir déclenché une «querelle de clochers» pour avoir leur «plage privée». «On veut un respect et non un envahissement de la plage», rétorque le président.
Cet hiver, des réunions ont été organisées par la mairie pour calmer les esprits. Une «charte de bonne conduite» a été signée avec les gérants des camps pour assurer la sécurité dans l'eau et protéger l'environnement, en limitant le nombre de cours.
«Il fallait que chacun revoie son modèle économique, qui consistait jusqu'ici à amener autant d'élèves que possible sur la plage, sans compter», assure Aline Marchand, dont le fils dirige une école, ce qui lui vaut des critiques. «C'était ça ou le pugilat.»
De l'avis de tous, l'ambiance semble s'être apaisée cet été. Les inscriptions «Surf camps, go home» ciblant la clientèle étrangère s'effacent sur le bitume. Les flots ayant dispersé les bancs de sable, les surfeurs sont moins les uns sur les autres.
- Réglementation -
Lors de leur patrouille, la police vérifie les autorisations des moniteurs. Sans anicroche.
«Il y a de la place pour tout le monde», juge l'un d'eux, Pablo Orihuela, originaire des îles Canaries, qui enseigne le surf à une famille de Danois débutants. «Les contrôles sont nécessaires pour diminuer les risques, sinon on aura des moniteurs sans diplôme et plus de dangers sur la plage».
Le taux d'encadrement est fixé à huit personnes par moniteur depuis un arrêté préfectoral de 2021. Le responsable doit porter un maillot spécial - la mairie en a moins distribué cette année - et disposer d'une trousse de secours, ainsi que d'une planche ou d'une paire de palmes pour intervenir au large si besoin.
Face à l'afflux des planches sur la côte landaise, l'heure est à la réglementation. La commune de Soorts-Hossegor a mis en place, en 2021, une nouvelle procédure d'attribution des autorisations d'exercer. Le 13 juillet, la justice administrative, saisie par une école de surf, a toutefois retoqué des arrêtés de la mairie de Capbreton.
Dans les camps de Moliets, on joue l'apaisement. «On a diminué nos cours de 30%, on fait de la pédagogie», assure Aaron Twellmann, cofondateur franco-allemand du Vegan Surf Camp. «Le côté positif, c'est qu'on a appris à se connaître», souligne sa collègue Virginia Stopschinski, qui aimerait monter un festival avec les écoles locales.