HODEIDA : Un supertanker délabré contenant plus d'un million de barils de pétrole au large du Yémen, en guerre depuis 2015, menace d'exploser et de provoquer une catastrophe écologique majeure.
Un navire de l'ONU est arrivé dimanche pour une opération très attendue et complexe de transfert du pétrole stocké dans le navire abandonné, nommé FSO Safer.
Voici quelques les éléments clés à savoir:
Risque d'explosion
Agé de 47 ans, le FSO Safer, utilisé comme plate-forme flottante de stockage de pétrole, est amarré au large du port de Hodeida, au bord de la mer Rouge, une voie de navigation stratégique dans l'ouest du Yémen.
Le navire, qualifié de "bombe à retardement" par l'ONU et Greenpeace, n'a pas été entretenu depuis les débuts des huit années de guerre au Yémen.
Les systèmes nécessaires pour pomper du gaz inerte dans ses réservoirs ont cessé de fonctionner en 2017, augmentant le risque d'explosion.
L'opération de l'ONU visant à transférer le pétrole du Safer et à remorquer le navire vers un chantier de démolition est évaluée à quelque 143 millions de dollars.
L'ONU dit avoir besoin de 22 millions de dollars supplémentaires.
20 milliards de dollars
En cas de déversement, l'ONU estime que les seuls coûts de nettoyage pourraient s'élever à 20 milliards de dollars, avec des conséquences environnementales, humanitaires et économiques potentiellement catastrophiques.
Une marée noire dévasterait les communautés de pêcheurs sur la côte yéménite de la mer Rouge, privant 200 000 personnes de leurs moyens de subsistance dans l'un des pays les plus pauvres au monde.
Elle pourrait entraîner la fermeture des ports, pourtant vitaux pour l'acheminement des denrées alimentaires, du carburant et d'autres fournitures essentielles au Yémen, où la majeure partie de la population dépend de l'aide humanitaire internationale pour survivre.
Le déversement pourrait aussi atteindre l'Arabie saoudite, l'Erythrée, Djibouti et la Somalie, et produirait un air hautement pollué sur une vaste zone.
Le trafic maritime entre le détroit de Bab al-Mandab et le canal de Suez, qui mène à la Méditerranée, pourrait être perturbé, ce qui coûterait des milliards de dollars par jour, selon l'ONU.
Perturbations et retards
Les tentatives d'inspection du navire ont piétiné pendant des années, les demandes d'accès de l'ONU ayant été rejetées à plusieurs reprises par les Houthis qui contrôlent une bonne partie du nord et l'ouest du Yémen, dont le port de Hodeida.
En guerre contre le gouvernement, les Houthis exigeaient que le montant du pétrole contenu dans le Safer leur soit remis pour payer les salaires de leurs fonctionnaires.
En mars 2022, les Houthis ont signé un protocole d'accord avec l'ONU, établissant un cadre de coopération pour faciliter le projet.
Les inspections ont finalement débuté le 30 mai, avec l'arrivée d'une équipe d'experts de la société privée SMIT Salvage.
Pompage du pétrole
Au début du mois, l'ONU a déclaré que SMIT avait estimé que l'état du navire permettait l'opération.
Le Nautica, un navire acheté par l'ONU pour le transfert du pétrole, est arrivé de Djibouti dimanche et devrait amarrer à côté du Safer.
L'opération de pompage doit commencer dans les trois jours et durer d'une semaine à un mois.
Même après le transfert, le Safer en ruine "constituera une menace résiduelle pour l'environnement, car il contient des résidus d'hydrocarbures" et "risque de se briser", a averti l'ONU.
Le Safer doit être entièrement démantelé et ses pièces détachées recyclées.
Le Nautica sera rebaptisé Yemen et restera dans la région alors que les discussions se poursuivront pour savoir qui prendra le contrôle du navire et mettra la main sur le pétrole.