PARIS: Un pas vers le nouveau "pacte de la vie au travail" voulu par Emmanuel Macron: patronat et syndicats se retrouvent mercredi à Matignon pour s'accorder sur un agenda social, un peu plus d'un mois après la dernière manifestation contre la réforme des retraites.
Les cinq organisations syndicales représentatives (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC) et les trois organisations patronales (Medef, CPME, U2P) rencontreront ensemble à partir de 10H00 la Première ministre Elisabeth Borne et le ministre du Travail Olivier Dussopt, un format inédit depuis mars 2021.
La réunion, qui intervient au moment où la perspective d'un remaniement occupe tous les esprits, permet à Mme Borne de se projeter au moins jusqu'à l'automne, enjambant l'échéance des "cent jours" décrétés par Emmanuel Macron pour relancer son quinquennat après la crise des retraites.
Les participants, parmi lesquels la nouvelle secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon, et le futur président du Medef Patrick Martin, ne partiront pas d'une page blanche, mais pourront s'appuyer sur la feuille de route issue des discussions menées en juin par les syndicats et le patronat.
Emploi des seniors, parcours professionnels, prévention de l'usure professionnelle, accompagnement des reconversions professionnelles, compte épargne temps universel, sur lesquels les partenaires sociaux sont convenus de négocier, seront au menu des échanges.
A charge pour le gouvernement de préciser exactement quelle place il entend prendre dans ces discussions, et notamment s'il veut s'inscrire dans le cadre de l'article L1 du code du travail, qui prévoit que le gouvernement encadre les négociations par un document d'orientation.
Les syndicats veulent que le gouvernement participe à ces négociations alors que le patronat rechigne, par peur de se voir imposer par l'exécutif des mesures dont il ne veut pas, comme la création d'un index senior.
"La Première ministre aura l'occasion de saluer le travail des partenaires sociaux, de confirmer (...) l'engagement de transposer (dans la loi) les accords qui pourraient être trouvés" entre patronat et syndicats, a expliqué Matignon.
Les uns et les autres seront invités à préciser leurs souhaits en termes de calendrier, et sur le contenu des futurs documents d'orientation.
Les salaires, sujet «tabou»?
Autre sujet pressant, l'assurance chômage, dont les règles "tomberont" le 31 décembre. Le code du travail prévoit une négociation entre les partenaires sociaux encadrée par un document du gouvernement. "Il faut qu'on fasse partir le document de cadrage en direction des partenaires sociaux pour la fin juillet 2023", a souligné Matignon.
Mais, comme pour les précédentes négociations sur ce thème, il est probable que la discussion entre les partenaires sociaux tourne court, et que le gouvernement reprenne in fine la main.
Les syndicats auront également à cœur de mettre sur la table les sujets sur lesquels le dialogue est fermé avec le patronat, qu'il s'agisse de la révision des ordonnances travail de 2017, de la conditionnalité des aides publiques aux entreprises ou des salaires.
"Il y a trop d'argent public déversé sans aucun contrôle", a souligné auprès de l'AFP Marylise Léon, favorable à ce que les syndicats aient un droit de regard sur ces aides dans le cadre du Conseil social et économique (CSE) des entreprises.
Bien qu'elle privilégie pour la question salariale la négociation dans les branches et les entreprises, la CFDT envisage en dernier ressort d'en appeler au gouvernement.
"A un moment si les entreprises ne jouent pas le jeu, le gouvernement peut agir aussi", a dit Mme Léon, dont l'organisation préconise de suspendre les exonérations de cotisation sur les bas salaires dans les branches où les salaires sont trop bas.
Matignon a cependant semblé réticent mardi à s'engager sur le terrain salarial, soulignant que le sujet pourrait revenir dans les discussions internes entre patronat et syndicats, en marge du "volet déroulé de carrière et parcours professionnels".
La question du salaire est "tabou" pour le gouvernement, a fustigé sur France 2 mardi la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet. La CGT demande l'indexation des salaires sur l'inflation et la revalorisation du Smic à 2 000 euros.