Au Maroc, des femmes s'imposent dans l'univers masculin de la musique gnaoua

Cette photo prise le 24 juin 2023 montre des membres du public applaudissant lors de la 24e édition du Festival des musiques du monde Gnaoua à Essaouira (Photo, AFP).
Cette photo prise le 24 juin 2023 montre des membres du public applaudissant lors de la 24e édition du Festival des musiques du monde Gnaoua à Essaouira (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 02 juillet 2023

Au Maroc, des femmes s'imposent dans l'univers masculin de la musique gnaoua

  • Sur les pas de Bnat Timbouktou, Hind Ennaira, une étoile montante de la tagnaouite, a décidé de tenter l'aventure depuis sa ville natale d'Essaouira
  • De jeunes Marocaines évoluent désormais dans le cercle fermé de la musique gnaoua, traditionnellement réservée aux hommes

Essaouira: Elles s'appellent Asma, Hind ou encore Yousra. De jeunes Marocaines évoluent désormais dans le cercle fermé de la musique gnaoua, traditionnellement réservée aux hommes, donnant à cet art multiséculaire, inscrit au patrimoine immatériel de l'UNESCO, une impulsion nouvelle et inclusive.

"+La tagnaouite+ (la tradition de la musique gnaoua) a acquis une renommée mondiale avec son inscription à l'UNESCO (en 2019). Pourquoi des femmes ne feraient-elles pas partie de cette dynamique?", lance Asma Hamzaoui, rencontrée à Essaouira (sud-ouest) pendant le récent festival gnaoua et musiques du monde.

Cette Casablancaise de 26 ans est l'une des premières femmes à avoir investi ce milieu grâce à son père, un "maâlem" (maître) gnaoua qui l'a initiée dès son jeune âge.

"Je l'accompagnais dans ses soirées dès l'âge de sept ans. J’ai appris au fur et à mesure à jouer du +guembri+", un luth à trois cordes en peau de dromadaire, raconte la jeune femme qui a créé son propre groupe en 2012, Bnat Timbouktou ("Les filles de Tombouctou" en dialecte marocain).

"Mon père a fait en sorte que j'apprenne le maximum de choses avant que je ne prenne mon propre envol", se souvient-elle.

A Essaouira, la formation exclusivement féminine --Asma Hamzaoui au chant et au guembri et quatre joueuses de "qraqebs", les fameuses castagnettes en acier typiques du genre gnaoua -- a enflammé le public, aux côtés des Amazones d'Afrique, un groupe féminin malien.

"C'est exceptionnel de voir des femmes jouer de la musique gnaoua, qui ne devrait pas rester dans le giron des hommes. Elles donnent un nouveau souffle à cette musique", s'exclame Hamza Tahir dans le public.

«Nourrir l'esprit»

Sur les pas de Bnat Timbouktou, Hind Ennaira, une étoile montante de la tagnaouite, a décidé de tenter l'aventure depuis sa ville natale d'Essaouira.

Cette citadelle fortifiée au bord de l'Atlantique est un vivier de cette tradition musicale mystique, où les invocations religieuses se mêlent à celles des ancêtres et des djinns, les esprits magiques.

Au fil du temps, cette musique, initialement portée par des descendants d'esclaves et dont les racines remontent au moins au 16e siècle, est sortie de la sphère privée des "lilates", des veillées accompagnées de rituels thérapeutiques, vers des manifestations publiques moins codifiées, comme des concerts et des festivals.

"La ville d'Essaouira est la source de la tagnaouite. C'est un patrimoine très beau qui nourrit l'esprit. Il est important que des jeunes le valorisent", confie Hind Ennaira qui a appris à jouer du guembri aux côtés d'amis.

La jeune femme, de la même génération qu'Asma Hamzaoui, a fait le choix de diriger un ensemble gnaoua traditionnel avec une étincelle électrique en intégrant un guitariste et un batteur aux joueurs de qraqebs.

"Au début il y a eu des décalages, car ils n'étaient pas habitués à travailler avec une femme, mais après quelques durs exercices, ils se sont adaptés à moi et on est devenus complémentaires", affirme l'artiste.

«Power Trio»

Des difficultés, Yousra Mansour, la tête d'affiche du groupe Bab L'bluz, qui fusionne gnaoua, rock et blues, en a également éprouvées dans le milieu musical.

"Il y avait deux contraintes pour moi: d’abord le fait que ce milieu soit habituellement réservé aux hommes mais aussi le fait d'interpréter une musique traditionnelle. Ce n'est pas très accepté ni même toléré par les +rigoristes+", témoigne  la musicienne présente à Essaouira.

Des barrières qui ne l'ont pas empêchée de fonder avec le Français Brice Bottin Bab L'bluz ("La Porte du Blues") dans le but de valoriser la musique gnaoua et ses instruments traditionnels.

"On a remplacé la basse par le guembri et la guitare par l'+awisha+ (un petit guembri) et on a créé une sorte de +power trio+ à la Jimi Hendrix avec des instruments traditionnels revisités", détaille Yousra Mansour.

La vocaliste de 32 ans défend avec ferveur les libertés des femmes. "Parce qu'en tant que femme je n'ai pas eu une vie très facile".

"Il manquait de femmes dans ce milieu. Quand je vois Asma Hamzaoui ou Hind Ennaira, elles sont magnifiques, ce n'est pas facile d'évoluer dans un univers exclusivement masculin mais on voit le changement se profiler", se félicite-t-elle.


Paul Kupelian, artiste informel et chroniqueur du côté coloré de la vie

L’art de Paul Kupelian échappe aux catégories et n’obéit qu’à la nécessité de peindre. (fournie)
L’art de Paul Kupelian échappe aux catégories et n’obéit qu’à la nécessité de peindre. (fournie)
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  • A force de peindre son quotidien, ses lieux familiers et le chaos de Beyrouth, il devient le chroniqueur visuel d'événements importants, tout comme de sa propre évolution
  • Sa signature artistique se caractérise par un style vibrant et coloré, joyeux et dynamique, ce qui ne l’empêche pas de trouver, dans les infinies nuances de sa palette lumineuse, une harmonie chromatique qui se révèle au premier coup d’œil

BEYROUTH : Figuratif ? Naïf ? L’art de Paul Kupelian échappe aux catégories et n’obéit qu’à la nécessité de peindre. Né en 1975, cet artiste autodidacte de nationalité libanaise et française dont les racines remontent à l'Arménie, a grandi dans une famille d'artistes. Il n’a que 7 ans quand sa grand-tante l’initie à la technique reine, et donc complexe, de la peinture à l’huile. Dès lors, le reste de son enfance est ébloui par d’innombrables heures passées à dessiner et à peindre tout ce qui l’entoure. Il met toute sa passion à se perfectionner, aborde de nouveaux médiums tels que l'encre de Chine, l'acrylique, le pastel gras, le fusain ou la sanguine. Savait-elle, cette bienveillante aïeule, qu’elle lui offrait à travers l'art l'exutoire thérapeutique suprême, un moyen d'exprimer ses émotions et d'affronter les complexités de la vie ?  A force de peindre son quotidien, ses lieux familiers et le chaos de Beyrouth, il devient le chroniqueur visuel d'événements importants tout comme de sa propre évolution, projetant ses troubles sur la toile et y gagnant en retour paix intérieure et stabilité.

Paul Kupelian, chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)
Paul Kupelian, chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)

Sa signature artistique se caractérise par un style vibrant et coloré, joyeux et dynamique, ce qui ne l’empêche pas de trouver, dans les infinies nuances de sa palette lumineuse, une harmonie chromatique qui se révèle au premier coup d’oeil. Il y a dans ses oeuvres une joie contagieuse que confirme le sourire spontané de tout spectateur qui y est confronté. Ce pouvoir n’échappe pas au regard avisé de la galeriste Nadine Begdache, commissaire de l’espace Janine Rubeiz, à Beyrouth. En 2016, elle lui offre son exposition inaugurale : "Looking at the Bright Side" (Regard sur le côté lumineux de la vie). Une présentation saluée par les critiques d'art et les collectionneurs.

Paul Kupelian, chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)
Paul Kupelian, chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)

Qu’on ne se trompe pas sur la « naïveté » de cet artiste autodidacte. Sa profonde compréhension des proportions, de la perspective et des détails complexes n’échappe pas à un regard averti.  Ses peintures, bien que légères, servent de canal à ses émotions. Dans ses œuvres récentes, Paul Kupelian utilise principalement la peinture acrylique à grande échelle, un médium dont il apprécie la polyvalence et le potentiel expressif.

Chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)
Chroniqueur des événements et de sa propre vie (fournie)

Bien qu’il n’ait pas donné d’exposition depuis un certain temps, il confie à Arab News en français qu’il vit à présent à Dubai où il occupe un poste de direction dans le retail.  « Je peins dès que j’en ai le temps, le soir et surtout les weekends » poursuit-il. « La peinture est mon exutoire, je peux y passer des heures sans voir le temps passer. Cela me permet de tout oublier et m’apporte énormément de joie » ajoute Paul Kupelian qui affirme que, comme pour beaucoup d’artistes, son art est sa thérapie. Ajoutez à cette passion celle de l’histoire, la géopolitique, la philosophie, la musique, les voyages, le sport, vous obtenez, dans chaque toile, une nouvelle fenêtre ou un nouveau miroir où chacun peut trouver une réponse à ses propres questionnements.

 


Deuxième jour de la RSFW: défilé historique de maillots de bain et dentelle élégante

La collection d’EAU comprenait des maillots de bain simples – une pièce en V profond, motifs à épaules dénudées, tops bandeau et divers paréos. (Photo fournie)
La collection d’EAU comprenait des maillots de bain simples – une pièce en V profond, motifs à épaules dénudées, tops bandeau et divers paréos. (Photo fournie)
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  • Certains looks élégants étaient associés à des couvre-chefs soyeux et à des sacs à main sophistiqués
  • La collection de Sara Altwaim, comprenait un certain nombre de robes blanches fluides en dentelle et en mousseline

MER ROUGE: La marque marocaine EAU a marqué l’histoire en lançant, vendredi, la deuxième série de défilés de la Red Sea Fashion Week. En effet, c’est la première fois que des maillots de bain font leur entrée sur un podium saoudien.

Avec la piscine scintillante de St. Regis et les palmiers ondulants en arrière-plan, la deuxième RSFW a mis en valeur l’une des pièces incontournables de l’été.

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EAU. (Photo fournie)

La collection comprenait des maillots de bain simples – une pièce en V profond, motifs à épaules dénudées, tops bandeau et divers paréos. Bleu roi, jaune moutarde, vert chasseur et rouge marron dominaient la collection, créant une palette d’automne plutôt singulière, mais bienvenue, pour la saison estivale à venir.

Certains looks élégants étaient associés à des couvre-chefs soyeux et à des sacs à main sophistiqués, notamment des paniers tressés parsemés de strass, des sacs de plage en paille et des pochettes à franges.

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Sarah Altwaim. (Photo fournie)

La mode affluait à mesure que la mer Rouge brillait. La collection de Sara Altwaim comprenait un certain nombre de robes blanches fluides en dentelle et en mousseline. Chacune des pièces est attrayante, grâce à une touche individuelle, de subtiles perles, des coupes superposées ou un mélange de tissus.

Altwaim a présenté un tissu en mousseline d’inspiration sous-marine présentant des croquis de créatures des fonds marins, comme les poissons, les crevettes et les crabes, qui ont fait leur apparition dans une variété d’ensembles.

Les cols de perles très superposés, les jupes en forme de paréo, les résilles ornées de bijoux, les tissus métalliques et les vêtements fluides étaient également inspirés de la vie marine.

La créatrice saoudienne Yasmina Q a introduit les vêtements d’intérieur, clôturant les défilés avec une collection de robes en tricot effet côtelé dans des tons vert menthe, bleu écume de mer, jaune vif, corail et bien plus encore.

Il y avait aussi des manches évasées et une taille ajustée qui se transformait en une forme trapèze. Certaines pièces étaient également sans manches pour un look estival plus décontracté. La collection, composée de lunettes de soleil et de chapeauxestivaux, présentait également une gamme de vêtements d’intérieur, allant des bas côtelés aux hauts ajustés simples, en passant par les chemises côtelées, les hauts kimonos et les pulls amples.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les 80 ans de Dave: «pour un beatnik, faire carrière est un gros mot!»

Le chanteur néerlandais francophone Wouter Otto Levenbach alias Dave, pose lors d'une séance photo à Paris le 29 avril 2024 (Photo, AFP).
Le chanteur néerlandais francophone Wouter Otto Levenbach alias Dave, pose lors d'une séance photo à Paris le 29 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Mardi, Dave fête ses 80 ans et ses 60 ans de scène au Grand Rex, à Paris
  • Débarqué des Pays-Bas, le jeune Wouter Otto Levenbach débute à Paris en 1965

PARIS: "A 20 ans, je rêvais de vivre en chantant, surtout pas faire carrière! Pour le beatnik que j'étais, c'était un gros mot!": à 80 ans, Dave, l'interprète des indémodables "Vanina" et "Du côté de chez Swann", n'en revient pas d'être devenu un chanteur populaire mais refuse de songer à des adieux.

"J'aimerais bien chanter jusqu’à la fin. La scène, c'est le nirvana et on nous paie pour ça, en plus!", confie à l'AFP le plus Français des Néerlandais, connu aussi pour son franc-parler.

Mardi, Dave fête ses 80 ans et ses 60 ans de scène au Grand Rex, à Paris, avant une nouvelle tournée qui passera par Amsterdam et Bruxelles.

"Quand je suis devenu chanteur populaire, je n'ai rien compris. En plus, je n'étais pas du tout branché +variétoche+...", ajoute celui qui est toujours fan de jazz.

Débarqué des Pays-Bas, le jeune Wouter Otto Levenbach débute à Paris en 1965: "je faisais la manche dans le Quartier latin. En m'accompagnant à la guitare, je reprenais les succès du moment", raconte Dave, qui vient de publier une autobiographie, "Comment ne pas être amoureux de vous" (Talent Editions).

"On m'a conseillé d'aller plutôt à Saint-Tropez. (...) Maintenant, j'y retourne, mais comme client!", ajoute le chanteur vite remarqué par le producteur Eddie Barclay.

En 1972, il est enrôlé dans l'opéra-rock "Godspell". Deux ans après, il perce enfin avec la reprise de "Sugar Baby Love" des Rubbets, adapté en français par son compagnon Patrick Loiseau, qui deviendra son parolier attitré. La même année, "Vanina" dépasse le million d'exemplaires.

Après "Dansez maintenant" et "Mon cœur est malade", deux autres tubes, Dave se maintient au sommet du hit-parade avec "Du côté de chez Swann", une ballade romantique signée encore Patrick Loiseau et devenue l'une des chansons emblématiques des seventies.

«Comme Henri Salvador»

"Quand Patrick m'a proposé ce texte, je lui ai demandé s’il n'était pas fou. Cela me semblait trop littéraire et je pensais que ça ne marcherait jamais... Finalement, le succès a été énorme. Ma seule chanson diffusée sur France Inter!", ironise-t-il.

"Sans prétention, les textes étaient plutôt intéressants à l'époque. Aujourd'hui, ils ont perdu un peu en qualité", juge-t-il. Dans la jeune génération, Zaho de Sagazan et Vianney sont toutefois ses préférés.

"Depuis toujours, j'aime amuser la galerie avec des blagues caustiques mais je suis un gentil avec un bon fond", assure le chanteur, victime d'une lourde chute en 2022 qui a entraîné quatre jours de coma, avec, pour seules séquelles, la perte de l'odorat et du goût.

A 80 ans, le chanteur rêve d'un album "à un million d’exemplaires, comme Henri Salvador à la fin de sa vie".

"Pour le plus tard possible", Dave a laissé des instructions pour qu'on grave sur son urne funéraire le mot "ouf": "parce que je serai probablement content que cela se termine et parce que +ouf+ en verlan, veut dire fou. Un bon résumé de ma vie".