France: le gouvernement tente d'endiguer la violence après une nouvelle nuit d'émeutes

Un piéton est assis près d'une vitre brisée portant un graffiti qui dit "Vengeance pour Nahel" sur l'Esplanade Charles de Gaulle à Nanterre, à l'ouest de Paris, le 30 juin 2023, suite à des émeutes trois jours après qu'un garçon de 17 ans a été abattu à bout portant dans la poitrine par la police à Nanterre, une banlieue ouest de Paris. (Photo, AFP)
Un piéton est assis près d'une vitre brisée portant un graffiti qui dit "Vengeance pour Nahel" sur l'Esplanade Charles de Gaulle à Nanterre, à l'ouest de Paris, le 30 juin 2023, suite à des émeutes trois jours après qu'un garçon de 17 ans a été abattu à bout portant dans la poitrine par la police à Nanterre, une banlieue ouest de Paris. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 01 juillet 2023

France: le gouvernement tente d'endiguer la violence après une nouvelle nuit d'émeutes

  • Les obsèques de Nahel doivent avoir lieu samedi
  • Plusieurs rassemblements publics, fêtes ou autres, seront annulés dans les départements les plus concernés par les violences, qui inquiètent aussi les voisins de la France

PARIS: Scènes de pillage, véhicules incendiés, bâtiments publics dégradés : le gouvernement français tente vendredi d'endiguer la violence après une troisième nuit d'émeutes et de vandalisme, y compris avec le déploiement de blindés de la gendarmerie.

De nombreuses villes françaises, en région parisienne comme en province, portent vendredi les stigmates de cette troisième nuit de violences, souvent le fait d'adolescents.

Face à cette violence, déclenchée par la mort de Nahel M., 17 ans, tué par un policier mardi à Nanterre, en région parisienne, le gouvernement a décidé de recourir aux grands moyens, sans toutefois instaurer l'état d'urgence réclamé par une partie du monde politique.

Les obsèques de ce jeune homme doivent avoir lieu samedi, a annoncé le maire de Nanterre.

A l'issue d'une réunion interminatérielle de crise, la deuxième en deux jours, la Première ministre Elisabeth Borne a annoncé le déploiement de véhicules blindés de la gendarmerie et l'annulation des "événements de grande ampleur" dans tout le pays, afin de dégager des effectifs policiers.

Les bus et les trams, souvent visés par les manifestations de violence, seront également à l'arrêt dans tout le pays à partir de 21H00 (19H00 GMT), a annoncé le gouvernement.

Le président Emmanuel Macron, qui a écourté son séjour vendredi matin à Bruxelles, avait déjà annoncé un renforcement des moyens pour les forces de l'ordre à l'issue de cette réunion de crise. Il avait aussi appelé à la responsabilité parentale alors que la jeunesse des auteurs des violences a frappé les esprits.

"Un tiers des interpellés de la dernière nuit sont des jeunes, parfois des très jeunes", a-t-il observé vendredi, accusant dans la foulée les réseaux sociaux d'attiser cette violence.

 "Esprit de responsabilité" 

Une réunion entre le gouvernement et les plateformes numériques est prévue vendredi à 18h30 (16H30 GMT), afin "d'alerter" ces dernières "sur leur responsabilité" dans les violences urbaines qui secouent la France, ont annoncé les services de Mme Borne.

M. Macron a dit attendre un "esprit de responsabilité" de ces plate-forme, citant notamment Snapchat et TikTok, où s'organisent "des rassemblements violents" et qui suscitent "aussi une forme de mimétisme de la violence, ce qui conduit chez les plus jeunes à une forme de sortie du réel", selon lui.

La mort de Nahel après un refus d'obtempérer au volant a ravivé le sujet des violences policières, dans un pays où 13 personnes sont mortes à la suite d'un contrôle de police l'an dernier, au-delà même des frontières françaises.

Lors du point de presse régulier de l'ONU à Genève vendredi, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme a pressé la France "de s'attaquer sérieusement aux profonds problèmes de racisme et de discrimination raciale parmi les forces de l'ordre". Une accusation jugée "totalement infondée" par le ministère français des Affaires étrangères.

Plusieurs rassemblements publics, fêtes ou autres, seront annulés dans les départements les plus concernés par les violences, qui inquiètent aussi les voisins de la France.

Berlin "inquiet" 

Berlin a exprimé son "inquiétude" face à la situation, et rappelé que les autorités françaises avaient "clairement condamné" la mort de Nahel.

Le Royaume-Uni a mis en garde vendredi ses ressortissants contre ces émeutes, qui ont provoqué des scènes de désolation dans plusieurs grandes ou villes moyennes.

"C'est la première fois en 25 ans que je vois ça", confie Yvan - qui n'a pas voulu donner son nom de famille -, agent d'entretien dans un magasin de chaussures en plein centre de Paris.

Vitrines en miettes, chaussures volées... La boutique comme le magasin d'une célèbre marque de sport américaine à quelques mètres ont été pillés et saccagés en pleine nuit.

Dès vendredi matin, Mme Borne a réuni plusieurs ministres, en dénonçant des actes "insupportables et inexcusables".

"Toutes les hypothèses" sont envisagées pour rétablir "l'ordre républicain", y compris l'état d'urgence, avait déclaré vendredi Mme Borne, avant cette réunion, qui n'a pas cependant retenu cette hypothèse, au moins pour l'instant.

M. Macron s'est dit prêt de son côté à adapter "sans tabou" le dispositif de maintien de l'ordre.

 Electrocutés 

L'état d'urgence, qui permet aux autorités administratives de prendre des mesures d'exception comme une interdiction de circuler, avait été déclenché en novembre 2005 après 10 jours d'émeutes dans les banlieues, déclenchées par la mort de deux adolescents, électrocutés dans un transformateur électrique où ils s'étaient cachés pour échapper à la police.

Les nouvelles violences ont elles aussi éclaté après la mort mardi d'un adolescent, atteint au thorax lors d'un contrôle routier par le tir d'un policier. Ce dernier, un motard de 38 ans, a été inculpé jeudi pour homicide volontaire et placé en détention. Une vidéo le montre tenant en joue le jeune homme avant de tirer à bout portant quand la voiture redémarre brusquement.

Les troubles sont allés crescendo depuis mardi et se sont étendus à de nouvelles villes dans la nuit de jeudi à vendredi, durant laquelle 492 bâtiments ont été atteints, 2.000 véhicules brûlés et 3.880 incendies de voie publique allumés, selon des chiffres officiels. 875 personnes, souvent très jeunes, ont été interpellées.

"Des écoles, des polices municipales, des mairies annexes, des centres sociaux, des bus, des tramways ont été pris pour cible, attaqués, vandalisés, saccagés", a dénoncé la présidente de la région parisienne Valérie Pécresse en dénonçant des actes "intolérables" vis-à-vis des "services publics dont les habitants ont besoin".

Dans le département le plus pauvre de la France métropolitaine, la Seine-Saint-Denis, au nord-est de Paris, "quasiment toutes les communes" ont été touchées, souvent par des actions éclairs, avec de nombreux bâtiments publics pris pour cible, selon une source policière. A Drancy, des émeutiers ont utilisé un camion pour forcer l'entrée d'un centre commercial, en partie pillé et incendié, indique une source policière.

A Paris même, une quarantaine de commerces ont été dégradés selon le Parquet. Des magasins du centre-ville" ont été vandalisés", "pillés voire incendiés", selon un policer haut gradé.

Un Apple store dans le centre de Strasbourg (est) a également été vandalisé en pleine journée vendredi.

Au moins trois villes proches de la capitale ont décidé jeudi d'instaurer des couvre-feux.

Le gouvernement avait pourtant annoncé la mobilisation jeudi soir de 40.000 policiers et gendarmes, dont 5.000 à Paris (contre 2.000 la nuit précédente).


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.