Accord sur le nucléaire iranien: indices et démentis

L’Ayatollah Ali Khamenei célèbre les progrès du secteur nucléaire iranien, le 11 juin à Téhéran (Photo, AFP/HO/KHAMENEI.IR).
L’Ayatollah Ali Khamenei célèbre les progrès du secteur nucléaire iranien, le 11 juin à Téhéran (Photo, AFP/HO/KHAMENEI.IR).
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Publié le Jeudi 29 juin 2023

Accord sur le nucléaire iranien: indices et démentis

Accord sur le nucléaire iranien: indices et démentis
  • Les récents développements indiquent que des efforts secrets sont en cours afin de solidifier un accord entre Washington et Téhéran
  • L’administration américaine cherche à esquiver les discussions au sujet d’un accord potentiel avec l’Iran afin d’éviter de soumettre la question à l’examen du Congrès

Des informations récentes sur la relance de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien ont suscité un regain d’intérêt. En effet, le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a réfuté les affirmations d’un accord imminent entre Washington et Téhéran. Les inquiétudes ont surgi à la suite de la déclaration de l’Iran d’engager des pourparlers indirects avec les États-Unis facilités par le sultanat d’Oman. Les négociations portent sur des questions cruciales telles que le nucléaire, les sanctions américaines et le sort des citoyens américains détenus en Iran.

Les récents développements indiquent que des efforts secrets sont en cours afin de solidifier un accord entre Washington et Téhéran, ce qui rappelle l’époque de l’administration du président Barack Obama. En effet, ce dernier avait négocié de manière inattendue le Plan d’action global commun (PAGC) en 2015, juste un an avant l’élection présidentielle américaine âprement disputée qui a abouti à la victoire de Donald Trump sur la candidate démocrate, Hillary Clinton.

L’administration du président Joe Biden semble déterminée à réaliser une percée significative dans ce domaine avant la prochaine échéance présidentielle, en 2024, dans le but de la présenter à l’opinion publique américaine comme un accomplissement notable en matière de politique étrangère. Les enjeux sont importants, car les négociations portent non seulement sur la question nucléaire, mais aussi sur la libération de quatre Américains détenus en Iran, considérée comme une priorité absolue par l’actuelle administration.

La possibilité d’un dialogue direct ou indirect entre Téhéran et Washington ne peut être écartée, d’autant que les États-Unis ont souligné à plusieurs reprises leur engagement à employer des moyens diplomatiques pour empêcher l’Iran d’obtenir des armes nucléaires. Cet engagement implique une exploration continue des voies politiques pour aborder la question, en particulier après la confirmation par les autorités américaines que le régime iranien a réussi à réprimer les manifestations nationales qui ont eu lieu l’année dernière.

L’inquiétude croissante au sujet de l’implication potentielle d’Israël dans un conflit avec l’Iran renforce la détermination américaine à trouver une solution à l’impasse dans laquelle se trouve l’accord sur le nucléaire iranien. Washington vise à s’assurer un effet de levier en envisageant des frappes préventives sur les installations nucléaires iraniennes, une notion à laquelle le gouvernement de Netanyahou fait occasionnellement allusion.

Bien que le gouvernement israélien se dise «indifférent» à tout accord potentiel en ce qui concerne la reprise de l’accord sur le nucléaire iranien, les États-Unis considèrent ces déclarations davantage comme une stratégie politique que comme une véritable prise de position. Israël, allié précieux, comprend la nécessité d’obtenir l’approbation des États-Unis avant de lancer une attaque militaire contre les installations nucléaires iraniennes. Les déclarations répétées des États-Unis confirment une communication permanente avec Israël: Washington tient ce dernier au courant des discussions et des dialogues liés à la question nucléaire iranienne, ce qui souligne l’étroite coordination entre les deux parties.

Des signes de progrès discrets dans les mesures de confiance entre Téhéran et Washington apparaissent. Il y a notamment l’approbation par les États-Unis du transfert d’environ 7 milliards de dollars (1 dollar = 0,91 euro) de l’Irak vers l’Iran, décrit par le département d’État américain comme une procédure de routine, qui fait sourciller. En règle générale, de telles transactions requièrent l’approbation préalable des États-Unis et démontrent la propension de l’Amérique à favoriser un climat propice à un dialogue fructueux avec l’Iran. Ce signal n’est pas sans précédent, puisque le silence américain face aux violations répétées de l’Iran dans le Golfe peut être considéré comme une indication récurrente d’un désir d’éviter la confrontation, même au risque de relations tendues avec les alliés régionaux.

L’un des moteurs de la recherche par les États-Unis d’un terrain d’entente avec l’Iran, indépendamment de toute autre considération, découle de l’objectif de Washington de placer les conflits internationaux au premier plan de son agenda – en particulier, le conflit en cours avec la Russie en Ukraine et la concurrence intense avec la Chine, deux questions étroitement liées.

Tout accord conclu entre les États-Unis et l’Iran pourrait avoir des répercussions importantes sur la région - Salem Alketbi

Les États-Unis évitent actuellement de s’impliquer dans les affaires du Moyen-Orient, préférant affirmer leur présence par des déclarations verbales. L’objectif premier est d’entraver les progrès de l’Iran dans l’obtention de plus grandes quantités d’uranium enrichi nécessaires à la fabrication d’une arme nucléaire. L’approche adoptée, que ce soit par le biais d’un accord, d’ententes ou d’autres cadres officiels, vise à persuader l’Iran de retirer son soutien à la Russie dans le conflit ukrainien. Bien que la réalisation de cet objectif semble difficile, une équation gagnant-gagnant peut être recherchée. Elle impliquerait la levée des sanctions et le déblocage progressif des actifs financiers de l’Iran en échange du respect des exigences américaines.

L’administration américaine cherche à esquiver les discussions au sujet d’un accord potentiel avec l’Iran afin d’éviter de soumettre la question à l’examen du Congrès. Cette démarche a incité Michael McCaul, républicain et président de la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants, à exiger officiellement que le président Joe Biden soumette au Congrès tout arrangement ou accord avec l’Iran, même s’il s’agit d’un accord informel. La Maison Blanche pourrait choisir d’ignorer cette demande, même si un vote a lieu au sein du Congrès, contrôlé par les démocrates.

Tout accord conclu entre les États-Unis et l’Iran pourrait avoir des répercussions importantes sur la région, Israël étant potentiellement le plus touché. Cette préoccupation survient alors que les pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) ont pris des mesures préventives pour désamorcer les tensions avec l’Iran et reprendre les relations en réponse à d’éventuelles actions américaines.

La situation géopolitique régionale actuelle, marquée par la présence de l’Iran en Syrie, la poursuite du développement de ses missiles et la question non résolue des armes du Hezbollah libanais pointées sur Israël, entretient la perception israélienne des menaces en provenance de l’Iran. Pour apaiser ces inquiétudes, tout accord potentiel entre les États-Unis et l’Iran doit comporter des mesures précises et spécifiques qui garantissent la réduction des tensions entre Israël et l’Iran. Il s’agit notamment d’établir des contrôles aux points de contact directs le long des frontières d’Israël avec la Syrie et le Liban ainsi que de faire en sorte que Téhéran cesse de soutenir les organisations extrémistes qui s’en prennent à la sécurité et à la stabilité d’Israël.

Salem Alketbi est un analyste politique émirati. Il a été membre du Conseil national fédéral. 

Twitter: @salemalketbieng

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.