PARIS: L'idée a été poussée par Emmanuel Macron mais n'a pas convaincu au Sommet à Paris: une taxe internationale sur les émissions de carbone du commerce maritime n'a reçu le soutien ni des Etats-Unis ni de la Chine.
La France souhaitait donner de l'élan à ce projet avant une réunion cruciale de l'Organisation maritime internationale (OMI) du 3 au 7 juillet à Londres.
"Vous conviendrez avec moi qu'une taxe internationale est une taxe internationale quand elle est adoptée par tous", a déclaré le président français lors d'une conférence de presse, soulignant que les pays adhérant à ce projet allaient "tenter de mobiliser" les autres pays.
Le transport maritime, responsable de 3% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, soit à peu près autant que l'aérien, fait partie des secteurs pointés du doigt pour son manque d'effort dans la lutte contre le changement climatique.
"Il n'y a aucune raison" que ce secteur ne soit pas taxé et ne contribue pas "aux efforts partout sur la planète", a souligné Emmanuel Macron.
Mais il a été clair: "si la Chine, les États-Unis et plusieurs pays européens clés, qui ont aussi des grandes entreprises impliquées ne nous suivent pas", la mise en place d'une telle taxe sera d'aucun effet.
Pire, elle risque de pénaliser les pays qui l'appliqueraient avec un détournement du commerce vers les pays non signataires.
"On ne va pas continuer de se faire mal tout seul", a réagi le président Macron, en référence aux deux taxes que la France applique sur les billets d'avion et celle sur les transactions financières.
En 2006, Paris avait mis en place une taxe de solidarité sur les billets d'avion -- taxe Chirac -- pour donner une nouvelle impulsion au financement de la santé des pays en développement.
Mais elle n'a jamais été généralisée à l'échelle de la planète en dépit des promesses de nombreux pays. Et elle est souvent décriée par les compagnies françaises pour être une taxe injuste pénalisant le secteur aérien hexagonal.
Travailler encore
Emmanuel Macron ne s'est toutefois pas avoué vaincu.
"On a un club de ceux qui pensent comme nous et c'est à l'Organisation maritime internationale que la négociation doit se tenir et que nous la tiendrons", a-t-il promis, en référence à la petite vingtaine de pays susceptibles de signer un accord.
Emmanuel Macron a évoqué la possibilité d'une taxation "très modique au début, parce que c'est un secteur qui est en train de se décarboner".
"Il faut vraiment que les pays clés en la matière se mobilisent et donc on va continuer de travailler en ce sens", a-t-il néanmoins insisté, espérant "que le rendez-vous de juillet à l'OMI sera conclusif en la matière".
Le chancelier allemand Olaf Scholz a pour l'heure émis des réserves.
"C'est une proposition intéressante, mais il faudra y travailler encore", a-t-il ainsi réagi. "Il y a des pays qui s'inquiètent parce qu'ils ne sont joignables que par bateau, par exemple en Océanie", a-t-il fait valoir, notant la nécessité de "trouver un consensus avec eux".
De son côté, la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen a assuré que les Etats-Unis étaient "ouverts aux approches innovantes" et a qualifié l'idée de "suggestion constructive" sans toutefois dire si Washington pourrait donner son aval à la réunion de Londres.
Les îles Marshall et les îles Salomon, qui militent pour cette taxe depuis dix ans, proposent un tarif à 100 dollars la tonne de carbone, soit l'équivalent de 300 à 400 dollars la tonne de fioul lourd.
Cela pourrait générer entre 60 et 80 milliards de dollars (54,84 et 73,12 milliards d'euros) de recettes par an selon la Banque Mondiale, destinés aux pays émergents pour financer leur transition et leur adaptation au changement climatique.
L'un des points d'achoppement est la manière dont pourraient être utilisés les revenus tirés d'une telle taxe.