CASABLANCA: Redouanne Harjane renaît de ses cendres avec son one-man-show Phœnix, à Casablanca. L’humoriste français, d’origine maroco-algérienne, n’avait en effet plus joué son spectacle au Maroc depuis des années. En deux jours, l’artiste a rattrapé son retard. Après Marrakech, c’est dans la capitale économique qu’il signe son retour et reçoit une standing ovation.
«J’ai senti que j'étais plus en phase avec moi-même, avec mes textes et mes origines marocaines que les dernières fois où j'ai joué ici.»
Retour aux sources
Pour Redouanne Harjane, jouer à Casablanca aujourd'hui est une expérience «spéciale». S’il est revenu sur les terres de ses origines pour faire rire, il explique également pendant son spectacle que c’est la ville où son père est enterré. «Il y a encore plus de pression, car on n’a pas le droit de décevoir les morts», confie-t-il avec émotion.
Pendant plus d’une heure, l’humoriste fait le show et parvient à conquérir le public, avec son humour absurde et atypique. Un univers qui lui est propre et résulte de son vécu.
«Mes sources d’inspiration sont mon père, le quartier casablancais de Derb Sultan, la ville de Casablanca… Il y a aussi un peu de ma maman, parce que c’est une Algérienne de Tlemcen et ça donnait un cocktail bien chaud à la maison!»
L’envol du «phœnix»
En musique, sur scène, Redouanne Harjane transporte le public dans son monde décalé. Il aborde notamment la pandémie de Covid-19, le confinement et énumère les absurdités qui ont marqué cette période. Autant d’événements qui l’ont inspiré pour le titre de son spectacle.
«Phœnix, c'est un peu comme réapprendre à vivre après tout ce qu'on a traversé, comme renaître de nos cendres, et surtout, c'est pouvoir en rire, car c'est avant tout un spectacle d'humour», explique l’humoriste à Arab News en français.
Le natif de Metz se laisse également aller à quelques confidences, notamment sur sa peur bleue de l’avion. Même s’il «ne supporte pas» ce moyen de transport, le comédien a dû dépasser son angoisse pour réaliser le trajet Paris-Casablanca.
«J’ai pris l’avion! C'est toujours compliqué pour moi. Des tonnes d'acier qui flottent dans les airs… ce n’est pas cohérent pour moi, pourtant, ça fonctionne, donc j'ai du mal à réaliser. Mais j'ai très peur! Je prends le bras du voisin, je tiens la main de quelqu'un que je ne connais pas… Ce n’est pas beau à voir! J'envie les gens qui arrivent à s'endormir dès qu'ils montent dans un avion et se réveillent à l’atterrissage.»
«Je n'ai jamais eu d'instrument à la maison. Un jour, une amie de mon frère a oublié sa guitare, elle n’est jamais revenue la récupérer et j'en ai profité pour apprendre. J'ai toujours voulu être et exister sur scène, que ce soit à travers la musique ou en déclamant des textes au théâtre.»
Redouanne, l’humoriste tragédien
Pour sa tournée marocaine, l’humoriste déjanté a présenté un show éclectique. Accompagné de sa guitare et de son piano, il joue, chante, fait rire en rimes et en prose et propose même au public de reprendre ses textes en chœur avec lui. Une véritable passion pour la musique et le théâtre qui le suit depuis son plus jeune âge.
«Je viens d'une famille d'ouvriers immigrés marocains et algériens qui travaillaient dans la sidérurgie et en tant que maraîchers. La famille était concentrée sur le travail manuel et ne comptait pas d’artistes. Je n'ai jamais eu d'instrument à la maison. Un jour, une amie de mon frère a oublié sa guitare, elle n’est jamais revenue la récupérer et j'en ai profité pour apprendre. J'ai toujours voulu être et exister sur scène, que ce soit à travers la musique ou en déclamant des textes au théâtre.»
Le féru de poésie sud-américaine, adepte des œuvres de Reinaldo Arenas, Federico Garcia Lorca ou encore Pablo Neruda, est aussi un amoureux de théâtre tragique. L’humoriste, qui a suivi une formation de tragédien, rêve, par ailleurs, de changer de costume, le temps d’une pièce. «J'adorerais travailler par exemple avec Olivier Py, et qu’il mette en scène Britannicus avec, pourquoi pas, moi dans le rôle de Néron…»
En attendant d’embrasser une carrière de tragédien sur scène, Redouanne Harjane poursuit sa carrière dans l’humour avec plusieurs dates européennes. Son one-man-show sera d’ailleurs traduit dans la langue de Shakespeare, avant d’être joué en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis à l’occasion d’une tournée 100% anglophone.