PARIS: Mannequins virtuels et faux paysages: les progrès fulgurants de l'intelligence artificielle générative ont rapidement fait naître des idées de campagnes innovantes chez les publicitaires et ils font aussi évoluer le secteur avec de nouvelles pratiques et compétences.
Le géant Coca-Cola s'est allié avec OpenAI, leader de l'IA à l'origine de ChatGPT, pour un concours d'"images créatives" représentant le plus iconique des sodas.
La marque espagnole de mode Stradivarius (groupe Inditex) est pour sa part allée jusqu'à créer des vêtements imaginaires inspirés de sa collection, avec une série d'images représentant des mannequins aux tenues fleuries qui semblent fusionner avec l'arrière-plan.
"Nous n'en sommes qu'au début", affirme à l'AFP Fernando Pascual, vice-président du design de l'entreprise espagnole Seedtag, un spécialiste de la publicité dite "contextuelle".
Seedtag vient de lancer la possibilité de modifier l'arrière-plan des publicités en fonction des pages internet où elles sont affichées: des buildings pour vendre une berline sur un site économique, une maison et une balançoire dans un environnement plus familial.
"L'élément principal de la publicité reste réel. Nous aidons juste nos clients à être plus pertinents", commente-t-il.
Toutefois, pour Olivier Bomsel, économiste spécialiste de la propriété intellectuelle et de la publicité, "l'usage de l'IA comme instrument manipulé par des tiers identifiés est un non-événement, ça a la même dimension qu'un nouveau procédé de trucage".
Afin d'attirer l'attention de la génération Z à l'approche de l'été, la marque française de lingerie Undiz, déclinaison du groupe Etam, a ainsi eu recours à l'IA pour générer deux images de mannequins évoluant sous l'eau en maillot de bain.
Sur ces 3 000 affiches placardées à travers le pays, seul le maillot a été photographié puis ajouté dans l'image. Tout le reste est généré par l'IA.
"C'était pour avoir un résultat un peu onirique, intriguant", explique à l'AFP la dirigeante d'Undiz, Isolde Andouard.
«Des mannequins plus divers»
"Vous avez des photographes qui font d'excellentes photos sous l'eau mais, en affichage, pour avoir un beau visage, un beau produit, une belle lumière, un beau bleu, c'est quasiment impossible", ajoute Marie Dardayrol, directrice marketing de la marque.
La campagne a fait "s'insurger" l'univers du mannequinat et des photographes de mode, reconnait Isolde Andouard qui insiste sur le fait que la démarche n'avait pas pour but de réduire les coûts de création, les images artificielles étant accompagnées de photos plus traditionnelles.
D'après Olivier Bomsel, l'IA ne va pas pour autant remplacer les mannequins car "les figures exploitées en IA vont donner lieu à de la propriété intellectuelle qui vaudra aussi cher que l'utilisation d'un mannequin".
"A chaque fois que des personnages réels sont instrumentalisés dans des univers virtuels, ils touchent des droits à l'image", ajoute-t-il.
Levi's a pour sa part annoncé en mars un partenariat avec le studio néerlandais Lalaland.ia pour créer des "mannequins générés par IA qui remplaceront les humains" sur sa boutique en ligne, afin d'avoir "plus de diversité". La marque de jeans a rapidement dû clarifier: "Nous ne renonçons pas à nos projets de shootings réels, à notre recours aux vrais mannequins, ni à notre engagement de travailler avec des mannequins plus divers".
L'industrie de l'adtech, jusqu'ici focalisée sur le ciblage et la commercialisation des annonces sur internet, a désormais pris conscience de la nécessité de proposer des solutions créatives d'intelligence artificielle aux annonceurs.
Les deux leaders de la pub en ligne Meta et Google ont annoncé l'un après l'autre en mai une batterie d'outils techniques simplifiés. Ils permettent par exemple de générer l'arrière plan d'une publicité à partir d'une simple phrase ("coucher de soleil sur une ville", "montagnes dans la brume"), d'élargir le cadre pour passer d'un format horizontal à vertical ou de créer automatiquement de courtes vidéos d'un produit.