PARIS: Le Sénat va examiner à partir de mercredi un projet de loi visant à sécuriser les capacités de fouille des douaniers, récemment censurées par le Conseil constitutionnel, accroître leurs moyens d'action et alourdir les peines réprimant le trafic de tabac.
Ce projet de loi, soumis d'abord aux sénateurs avant l'Assemblée nationale, est le premier dédié à la douane depuis 1965.
Dans une décision rendue le 22 septembre, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution l'article 60 du code des douanes, qui prévoit qu'"en vue de la recherche de fraude", ses agents peuvent procéder à la visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes.
Les "Sages" ont estimé que l'article ne précisait "pas suffisamment le cadre applicable à la conduite de ces opérations". Ils ont donné au gouvernement jusqu'au 1er septembre 2023 pour proposer une nouvelle rédaction de cet article.
Dans le projet de loi, le droit de visite des marchandises et des personnes dépendra du lieu géographique de son exercice. Il demeurera plein et entier en zone frontière et dans la zone géographique du "rayon des douanes" (40 km à l'intérieur du territoire au-delà de la bande frontière) ainsi que dans les ports, aéroports, gares ferroviaires et routières internationales.
En dehors de ce rayon, il devra être "motivé afin d'être juridiquement sécurisé" après information préalable (et non autorisation) du procureur de la République ou avec des raisons plausibles de soupçonner une infraction douanière.
L'article précise le droit des personnes: la visite pourra consister en la palpation ou la fouille de leurs vêtements et bagages, mais exclut la fouille à corps sauf lors d'une retenue douanière.
Le texte prévoit aussi "de mieux encadrer" les techniques d'investigation les plus intrusives (sonorisation ou captation d'images) et de moderniser les pouvoirs douaniers pour prendre en compte les "nouvelles réalités numériques".
Il propose une expérimentation sur trois ans allongeant la conservation des données de lecteurs automatisés de plaque d'immatriculation (LAPI) - quatre mois maximum - pour améliorer la lutte contre les "go-fast" notamment.
Est prévue également l'autorisation de la retenue temporaire des sommes d'argent liquide à l'intérieur du territoire en cas d'indices en lien avec une activité criminelle.
Le texte alourdit enfin les sanctions contre les personnes impliquées dans le trafic de tabac, dont les saisies ont atteint des records l'an dernier.
La peine prévue pour fabrication, détention frauduleuse en vue de la vente, vente hors du monopole, introduction ou importation frauduleuse de tabacs manufacturés est portée à trois ans contre un an aujourd'hui (dix ans contre cinq en cas de bande organisée).
En commission, les sénateurs n'ont pas modifié le texte en profondeur, adoptant des amendements pour préciser ou clarifier certaines mesures.
L'article visant à la prévention des infractions commises par l'intermédiaire d'internet a néanmoins été réécrit à l'initiative du rapporteur Albéric de Montgolfier (LR) afin de le "sécuriser juridiquement".