ATHÈNES: Le Premier ministre grec sortant, Kyriakos Mitsotakis, en tête des élections dimanche selon des résultats partiels, est un conservateur libéral qui a mis en avant la relance de l'économie mais est aussi accusé d'inquiétantes atteintes à l'Etat de droit.
Devançant de vingt points son rival de gauche Alexis Tsipras, selon des résultats partiels, le dirigeant de Nouvelle-Démocratie (ND), l'emporte pour la deuxième fois consécutive après sa première victoire en 2019.
Moins de trois mois plus tôt, il était pourtant dans la tourmente, étrillé pour sa gestion jugée calamiteuse de la catastrophe ferroviaire qui a fait 57 morts et déclenché une vague de colère dans le pays.
Au cours de son premier mandat, il a donné un coup de fouet à une économie encore en convalescence à son arrivée au pouvoir après la débâcle financière et les plans de sauvetage.
A la tête d'un important patrimoine immobilier dont il a hérité, il a réduit l'imposition sur la grande propriété.
Il a également profité de ses quatre années pour rapprocher au sein de sa formation l'aile nationaliste et le courant libéral qu'il représente.
Issu d'une grande famille politique crétoise, Kyriakos Mitsotakis, 55 ans, est le fils cadet de l'ancien Premier ministre Konstantinos Mitsotakis (1990-1993).
Sa sœur Dora Bakoyannis fut notamment ministre des Affaires étrangères et maire d'Athènes. L'un de ses neveux est l'actuel maire de la capitale grecque, un autre fut son chef de cabinet jusqu'à l'été 2022.
Diplômé de l'université américaine Harvard, il a d'abord mené une carrière de conseiller financier à Londres, chez McKinsey notamment, puis à Athènes, avant de reprendre le flambeau politique familial.
Il est élu député de la ND pour la première fois en 2004 avant d'assumer des portefeuilles ministériels dans différents gouvernements conservateurs.
Nommé ministre de la Reforme de l'administration au pic de la crise grecque (2013-2015), il procède à des réductions massives d'effectifs dans la fonction publique dans le cadre de la cure d'austérité dictée par les créanciers du pays.
Il accède à la présidence de la ND en 2016, un an après la défaite de son camp vaincu par la gauche radicale d'Alexis Tsipras.
VTT et Netflix
Cet homme de grande taille, aux cheveux poivre et sel, peu à l'aise dans les bains de foule, s'efforce de corriger son image en apparaissant en tenue décontractée dans ses déplacements de campagne, en chemise blanche, sans cravate, ou en blouson à capuche.
Il se laisse aussi photographier avec sa femme Mareva Grabowski et leurs trois enfants et n'hésite pas à s'épancher dans les médias sur la crise conjugale qu'il a traversée.
"Quand je veux vraiment me détendre (...) je regarde Emily in Paris", la série sur Netflix, a-t-il confié.
Omniprésent sur les réseaux sociaux, il a mené campagne sur TikTok -- tout en interdisant à ses ministres de l'utiliser-- et répondu aux questions d'une jeune youtubeuse.
En plein confinement strict durant la pandémie, une photo le montrant pédalant son VTT sur un mont près d'Athènes a fait scandale. Ses opposants, en premier lieu Alexis Tsipras, lui reprochent son "arrogance".
«Economie robuste»
Il a fait campagne en vantant "l'économie robuste" portée par une croissance à 5,9% en 2022 grâce en partie au florissant secteur du tourisme. La Grèce a aussi bénéficié d'un des plus gros paquets d'aide européenne pendant la pandémie pour parer aux pertes des entreprises.
Le président de l'Eurogroup, l'Irlandais Paschal Donohoe, a assuré que la Grèce avait grâce à M. Mitsotakis "des bases économiques plus solides qu'aucun gouvernement précédent depuis longtemps".
Mais ses contempteurs dénoncent aussi un tour de vis sécuritaire.
Le renforcement des effectifs policiers, le verrouillage les frontières pour lutter contre l'"invasion" de migrants, selon ses mots, lui ont valu de vives critiques.
Le scandale des écoutes illégales visant journalistes et hommes politiques, dont le dirigeant socialiste Nikos Androulakis, a également ébranlé son gouvernement à l'été 2022.
La liberté de la presse a également connu un inquiétant recul en Grèce devenue lanterne rouge de l'Union européenne, derrière la Hongrie et la Pologne, dans le classement de Reporters sans frontières.
Interpellé, l'intéressé a balayé d'un revers de la main les critiques, qualifiant ce baromètre de "merde".