TAIPEI, Taïwan : Le sort d'un éditeur de Taïwan, détenu et poursuivi par Pékin pour atteinte présumée à la sécurité nationale, suscite un vif émoi chez ses confrères qui ont fait part vendredi de leurs craintes de voyager en Chine et à Hong Kong.
Pékin a confirmé fin avril que Li Yanhe, directeur de la maison d'édition Gusa, faisait l'objet d'une enquête pour «des soupçons d'activités mettant en danger la sécurité nationale».
Une semaine auparavant, des militants et des journalistes à Taïwan avaient sonné l'alarme après la disparition de M. Li, parti voir sa famille à Shanghai courant mars.
Un ancien collègue de M. Li, Joshua Wang, a expliqué vendredi que l'arrestation de M. Li avait suscité une très grande inquiétude dans le secteur de l'édition à Taïwan, lors d'une conférence de presse organisée par Reporters sans frontières (RSF).
«Cela ne concerne pas seulement le secteur de l'édition; les personnes qui ont écrit quelque chose de critique (vis-à-vis de la Chine) sur Facebook ont peur également», a-t-il précisé.
Depuis la disparition de M. Li, le mot d'ordre au sein des milieux journalistique, culturel et littéraire de l'île est de «ne jamais se rendre en Chine ou à Hong Kong à l'avenir», a-t-il assuré, avant d'ajouter : «Ne passez même pas en transit par Hong Kong».
Le propriétaire d'une librairie indépendante, Chang Cheng, a fait état de craintes similaires. «Mes amis aussi disent : +ne va pas à Hong Kong. Si tu y vas, tu ne pourras peut-être pas rentrer+».
Cédric Alviani, responsable du bureau Asie du Sud-Est de RSF, a appelé à «la libération immédiate de Li» et dénoncé «la croisade à grande échelle contre le journalisme et la liberté de l'information» que mènent selon lui les autorités chinoises.
Gusa publie des livres d'histoire et de critique politique sur le parti communiste chinois, y compris sur les accusations concernant la répression des Ouïghours au Xinjiang ou la propagande internationale de Pékin.
La Chine estime que Taïwan est l'une de ses provinces qu'elle n'a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949.
Pékin dit espérer une «réunification» pacifique mais ne pas exclure l'emploi de la force en cas de rupture du statu quo à son désavantage.