PARIS: Le gouvernement présente mardi officiellement le détail de son plan de lutte contre la fraude fiscale qui visera en priorité "les très grandes fraudes et notamment la fraude internationale" tout en allégeant "la pression sur les classes moyennes".
L'objectif est de "concentrer l’effort sur les ultrariches, les multinationales, mais d’alléger aussi la pression sur les classes moyennes, les petits patrons, les patrons de PME pour leur redonner un peu d’oxygène", a avancé mardi matin le ministre délégué chargé des Comptes publics, Gabriel Attal, sur France Inter.
"J’assume de dire que je veux concentrer les efforts sur les très grandes fraudes et notamment la fraude internationale", a-t-il insisté.
Bercy compte durcir les sanctions. "Pour les fraudes fiscales les plus lourdes (comme des dissimulations d'avoirs à l'étranger, ndlr), on n'est plus dans la citoyenneté", a martelé Gabriel Attal, précisant que ceux qui seront sanctionnés pour de tels actes pourront être privés de leurs droits civiques pendant plusieurs années et perdre le bénéfice de tout crédit d'impôt.
"C'est un enjeu de finances publiques et de cohésion nationale", a-t-il insisté.
Ces dispositions devront toutefois être soumises au Conseil d'Etat qui devra jauger de leur constitutionnalité, avait concédé M. Attal la veille dans un interview au journal le Monde.
Le plan prévoit une hausse de 25% du nombre de contrôles fiscaux "sur les gros patrimoines" d’ici la fin du quinquennat. Sans seuil fixe, ajoute le ministère, interrogé par l'AFP.
Sont également prévus des contrôles fiscaux tous les deux ans pour les 100 plus grandes capitalisations boursières ; jusqu'à présent, aucune périodicité précise n'était fixée pour les grands groupes, précise le ministère.
Selon Gabriel Attal, "1.500 effectifs supplémentaires" étofferont les équipes qui luttent contre la fraude fiscale d'ici 2027.
Alléger la pression sur le petit contribuable
Un nouveau service de renseignement fiscal à Bercy, doté d’une centaine "d’agents d’élite" d’ici la fin du quinquennat, sera dédié à la lutte contre les grandes fraudes internationales, a encore promis le ministre dans son interview au Monde.
Tracfin, la cellule de renseignement financier de Bercy, ne peut pas recourir aux techniques de renseignement en matière de fraude fiscale, explique le ministère à l'AFP, "sauf lorsque l'affaire relève de la criminalité organisée".
Le nouveau service pourra, lui, utiliser "les écoutes, la captation de données, la pose de balises" pour aller chercher des informations "dans des Etats ou des territoires non coopératifs" comme le Panama ou les Bahamas.
En s'en prenant aux plus aisés, le ministre insiste parallèlement sur l'idée d'"alléger la pression sur le petit contribuable, en massifiant" les régularisations plutôt que d'avoir recours aux contrôles et en instaurant "une remise de pénalité automatique pour la première erreur".
Autre geste envers le commun des contribuables: la création d’une "pénalité inversée automatique en faveur du contribuable en cas d'erreur de l’administration", a déclaré M. Attal.
En France, "10% des contribuables paient 70% de l’impôt sur le revenu", a rappelé le ministre pour qui la fraude "des plus puissants est impardonnable".
"Je ne dis pas qu'ils fraudent davantage, mais quand cela arrive, les montants sont importants", a-t-il souligné.
Une fraude non chiffrée
Ce dernier avait rappelé la semaine dernière qu’en matière de fraude fiscale, "on a eu l'an dernier 14,6 milliards d'euros de mises en recouvrement notifiées par la Direction générale des Finances publiques (DGFiP)". Et concernant la fraude sociale, "on a recouvré 800 millions d'euros de cotisations sociales non versées du côté de l’Urssaf", avait-il chiffré.
Le gouvernement s'attaque à un phénomène qui ne fait l'objet d'aucune estimation officielle: "Certains parlent de 30 milliards, d'autres de 100!" admet Gabriel Attal. Mais la fraude fiscale représente potentiellement plusieurs milliards ou dizaines de milliards à récupérer par l'Etat.
Une des mesures envisagée est ainsi la mise en place d’un conseil d’évaluation de la fraude fiscale, afin que les différents experts puissent évaluer la réalité de la fraude fiscale en France.
A propos de la fraude sociale, contre laquelle Emmanuel Macron avait également promis à la mi-avril des "annonces fortes" et dont les sommes recouvrées actuellement sont bien moindres, le gouvernement présentera sa réforme "d’ici la fin du mois" de mai, a précisé le ministre sur France Inter.