PARIS : Souvent annoncée moribonde, la Nupes se cherche un second souffle un an après sa création, alors que se profile le défi des élections européennes et d'une potentielle liste commune, loin de faire l'unanimité.
Les dirigeants des formations de la Nupes (LFI, EELV, PS, PCF, Générations) doivent se réunir dans la semaine pour commencer à écrire l'"acte 2" de l'alliance née début mai 2022 après l'échec de la gauche, alors divisée, à la présidentielle.
Au programme: trouver comment élargir cette coalition qui a envoyé 151 députés à l'Assemblée. Et "dessiner une alternative crédible, positive" pour 2027, explique la cheffe d'EELV Marine Tondelier.
Les partis devraient discuter par exemple de la proposition du premier secrétaire du PS Olivier Faure de retravailler un "contrat de coalition" pour la présidentielle, d'une "agora" ouverte aux associations, syndicats et intellectuels, ou du souhait de LFI d'une "adhésion directe à la Nupes".
Mais les insoumis espèrent surtout aborder la question des élections européennes de 2024, au coeur d'un contentieux avec EELV.
LFI met la pression pour une liste commune à cette élection qui lui est peu favorable, alors que les écologistes, dont c'est le scrutin phare, s'y refusent.
Pour le coordinateur de LFI Manuel Bompard, partisan d'une discussion "avant l'été", une liste commune permettra à la Nupes de "battre l’extrême droite et les macronistes".
Mais entre des écologistes fédéralistes, des socialistes défenseurs de l'Europe, et des insoumis et des communistes eurosceptiques, les divergences sont nombreuses.
Dans l'accord Nupes, "ils ont pourtant trouvé un équilibre", consistant à accepter de "ne pas respecter certaines règles" européennes, remarque le politologue Bruno Cautrès auprès de l'AFP. "Une formule ciselée pour que chaque formation y retrouve un peu sa sensibilité", note-t-il.
"On peut s'entendre sur un programme européen d'actions communes" et mettre de côté "la confrontation des visions sur l'architecture européenne" affirme le député LFI Paul Vannier.
"La Nupes est attendue au tournant par plein d'électeurs, y compris écologistes", prévient l'insoumis Eric Coquerel. "Rater un rendez-vous aussi important pourrait avoir des conséquences pour la suite", comme les municipales de 2026, dit-il.
Marine Tondelier se désespère: "Qu'on arrête de raconter que si on n'y va pas ensemble c'est la fin de la Nupes. Ceux qui racontent ça savent qu'il n'y aura pas de liste commune mais veulent nous faire porter le fardeau de la division", dénonce-t-elle à l'AFP.
« Bulletin vert »
Elle plaide pour que la Nupes s'inspire de l'intersyndicale qui a mené la lutte contre la réforme des retraites. "Ils ne sont pas d'accord sur tout, mais j'ai jamais vu la CGT dire à la CFDT de faire ci ou ça".
Pour elle, s'il est nécessaire que la gauche soit unie à la présidentielle de 2027 pour gagner, chaque parti doit d'abord "aller chercher des électeurs en plus", "ceux qui n'ont pas voté pour nous ou se sont abstenus".
"Les Européennes sont les élections où il faut le faire", dit-elle, et les militants et sympathisants "réclament de pouvoir mettre un bulletin vert dans l'urne".
Même la proposition insoumise d'une tête de liste écologiste n'amadoue pas: "c'est une fausse offre. Même avec un écolo en tête, ce serait une liste Mélenchon", tacle l'eurodéputé David Cormand.
Pourtant au sein d'EELV, la députée Sandrine Rousseau défend une liste commune, et l'ancien patron Julien Bayou n'y est pas complètement opposé.
Au PCF en revanche, "on ne peut pas imaginer d'avoir sur une même liste des gens qui défendent tout et son contraire", tranche Ian Brossat, appelant à "une cohérence" pour les électeurs.
Le PS, pourtant divisé sur le sujet en interne, se dit prêt à discuter d'une liste Nupes, "mais c'est le fond qui déterminera le reste", explique le secrétaire général du PS Pierre Jouvet.
"Si on voit qu'on n'est pas d'accord, on fait chacun nos listes et un pacte de non agression", précise-t-il, assurant que le projet européen du PS "n'est pas négociable, sauf à la marge".
Mais pour Bruno Cautrès, seuls les écologistes feront une liste séparée. Après les 1,7% d'Anne Hidalgo à la présidentielle, "le PS ne peut pas se permettre une nouvelle humiliation électorale".