A l'Elysée, isolement et dysfonctionnements

Le président français Emmanuel Macron, candidat à sa réélection, quitte l'isoloir pour le second tour de l'élection présidentielle française dans un bureau de vote au Touquet, dans le nord de la France, le 24 avril 2022. (AFP).
Le président français Emmanuel Macron, candidat à sa réélection, quitte l'isoloir pour le second tour de l'élection présidentielle française dans un bureau de vote au Touquet, dans le nord de la France, le 24 avril 2022. (AFP).
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Publié le Samedi 22 avril 2023

A l'Elysée, isolement et dysfonctionnements

  • De l'avis général en Macronie, il ne reste plus grand monde, autour du président, pour lui dire quand il fait fausse route
  • Par qui est conseillé Emmanuel Macron? «Il ne l'est pas», tranche l'un. «Par personne», soupire un autre.

PARIS : Ce lundi soir, Emmanuel Macron vient de prononcer l'adresse aux Français censée redonner de l'oxygène à un quinquennat à bout de souffle. Alors, comme pour filer la métaphore, il sort dans Paris, prendre l'air qui peut-être lui manque dans ce palais de l'Elysée qui isole.

Une escapade au restaurant, avec son épouse, alors que depuis des semaines la tension sociale engendrée par sa réforme des retraites l'a souvent confiné au 55, rue du Faubourg Saint-Honoré.

Les dîners à La Rotonde, ce restaurant de Montparnasse où il aime se ressourcer, sont devenus rares. "C'est pas le moment", glissait récemment un proche, d'autant que la façade de la brasserie a subi un début d'incendie en marge d'une manifestation contre la retraite à 64 ans.

S'aventurer dehors, c'est prendre quelques risques. La sortie de lundi a été accompagnée d'un début de polémique lorsque, en rentrant à pied, il s'est arrêté pour entonner un chant pyrénéen avec des jeunes anonymes, dont il s'avérera, après diffusion de vidéos sur les réseaux sociaux, qu'ils appartenaient à une organisation à la réputation sulfureuse.

Sur le moment, "je sais pas qui c'est", balaie le chef de l'Etat, qui fait remarquer que, s'il avait passé son chemin, on l'aurait accusé d'être "méprisant".

Difficile équilibre à trouver, entre l'enfermement et l'exposition à une France qui lui crie comme rarement, un an après sa réélection pour un second quinquennat, son désamour voire sa détestation.

«Pas planqué»

"Il n'est pas isolé du tout", assure Brigitte Macron. Tout juste concède-t-elle que "l'Elysée, c'est un lieu un petit peu à part".

"Pas planqué", c'est l'image que tentent désormais d'afficher le président et ses équipes -- parfois critiqués, dans la sphère gouvernementale, pour avoir tardé à "aller au contact", "sa marque de fabrique".

Après avoir passé le plus clair de son temps au "Château" depuis le début de l'année, dans une posture en retrait plutôt à contre-emploi, il retourne au plus près des Français, quitte à se faire conspuer, comme mercredi en Alsace.

Pour autant, nombre de ses amis décrivent un Emmanuel Macron comme surprotégé par son entourage.

De l'avis général en Macronie, il ne reste plus grand monde, autour du président, pour lui dire quand il fait fausse route.

A part sûrement Brigitte Macron, et l'ex-président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand, toujours présent à ses côtés mais en retrait depuis sa défaite aux législatives.

Comme souvent par gros temps, mais peut-être encore plus que par le passé, ministres et conseillers s'épanchent -- sous couvert de l'anonymat -- sur cet Elysée où tout, à les entendre, dysfonctionne.

«Gadget»

Par qui est conseillé Emmanuel Macron? "Il ne l'est pas", tranche l'un. "Par personne", soupire un autre.

Et comme toujours lorsque l'orage gronde, ce sont les communicants qui essuient les critiques.

Mais le pôle politique est aussi considéré trop faible par nombre de stratèges macronistes. Et, au fond, c'est tout l'attelage qui est défini au mieux comme bancal, au pire comme "clanique".

Même le tout-puissant secrétaire général de l'Elysée Alexis Kohler, ce "jumeau" de l'ombre d'Emmanuel Macron qui fuit la lumière mais est réputé tenir d'une main de fer tous les dossiers, ne serait plus toujours aussi proche que jadis du président à en croire certains. "C'est l'usure du couple", sourit un visiteur régulier du palais.

Par ces temps de crise politique, Emmanuel Macron fait alors appel à ceux qui l'ont servi lors du premier quinquennat. Richard Ferrand, donc, mais aussi l'ancien conseiller en communication Clément Léonarduzzi, retourné chez Publicis, ou l'ex-conseiller spécial Philippe Grangeon.

"Quand tu appelles les ex à la rescousse, c'est que ça va vraiment pas", tance un cadre du camp présidentiel.

La réalité, se désole un autre, c'est qu'Emmanuel Macron "gouverne seul".

Certes, lors des moments critiques de son quinquennat, il réunit les ténors du gouvernement et de la Macronie.

Comme ces dîners, à l'automne, au moment de décider quand et comment réformer les retraites. Ou cette enfilade de réunions de crise, mi-mars, lorsqu'il a dû se résoudre à recourir à l'outil controversé du 49.3 pour la faire passer, faute de pouvoir affronter un vote à l'Assemblée.

Dans la majestueuse cour d'honneur, qui dessert l'hôtel d'Evreux où se trouvent les bureaux du chef de l'Etat, c'est alors un ballet de véhicules qui crissent sur les graviers. A huis clos, le président écoute les positions des uns et des autres, qui ne tardent pas à fuiter dans les médias, sans être forcément suivies d'effets. "C'est baroque", ironisait en décembre un allié d'Emmanuel Macron.

A ces alliés ou amis, il envoie toujours ses sms rituels pour demander "comment tu sens les choses?". Mais "c'est devenu un gadget, ce n'est pas un échange politique", déplore un conseiller de l'exécutif.

L'entourage d'un participant relate toutefois que, lors de la dernière réunion au sommet, juste avant l'allocution de lundi, il y a eu "un vrai débat politique" qui a "vraiment nourri" le discours présidentiel. "C'était hyper intéressant, il devrait le faire plus souvent."


Mandat d'arrêt de la CPI contre Netanyahu: la France «doit appliquer les règles», estime Braun-Pivet

Paris a "pris acte" jeudi de ces mandats d'arrêt, rappelant "son attachement au travail indépendant de la Cour" mais sans dire explicitement si la France procéderait à leur arrestation si ces personnes se rendaient sur son territoire.  L'Italie et le Royaume-Uni ont en revanche immédiatement annoncé qu'ils respecteraient leur engagement auprès de la CPI. (AFP)
Paris a "pris acte" jeudi de ces mandats d'arrêt, rappelant "son attachement au travail indépendant de la Cour" mais sans dire explicitement si la France procéderait à leur arrestation si ces personnes se rendaient sur son territoire. L'Italie et le Royaume-Uni ont en revanche immédiatement annoncé qu'ils respecteraient leur engagement auprès de la CPI. (AFP)
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  • La Cour pénale internationale, à laquelle Israël n'a pas adhéré et dont les États-Unis se sont retirés, a lancé jeudi des mandats d'arrêt à l'encontre de Benyamin Netanyahu et du chef de la branche armée du Hamas palestinien Mohammed Deif
  • "A partir du moment où la France est signataire, adhérente du statut de Rome et reconnaît la CPI, je pense qu'elle doit appliquer les règles qui en découlent, il n'y a pas de raison d'y déroger", a expliqué Yaël Braun-Pivet sur Sud radio

PARIS: La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet (Renaissance) a estimé mardi qu'en tant que signataire du statut de la Cour pénale internationale, la France "doit appliquer les règles" et arrêter le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu s'il venait sur le territoire hexagonal.

"A partir du moment où la France est signataire, adhérente du statut de Rome et reconnaît la CPI, je pense qu'elle doit appliquer les règles qui en découlent, il n'y a pas de raison d'y déroger", a expliqué Yaël Braun-Pivet sur Sud radio.

La Cour pénale internationale, à laquelle Israël n'a pas adhéré et dont les États-Unis se sont retirés, a lancé jeudi des mandats d'arrêt à l'encontre de Benyamin Netanyahu et du chef de la branche armée du Hamas palestinien Mohammed Deif pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité.

"C'est toute la difficulté de la justice internationale (...), c'est quand même compliqué d'avoir une justice qui n'est pas reconnue par tous", a estimé la présidente de l'Assemblée française, défendant néanmoins "la stricte application du droit".

"En vertu de la séparation des pouvoirs, je n'ai pas d'injonction à faire au gouvernement et au pouvoir exécutif", a-t-elle précisé, "mais, en tout état de cause, il nous faut tirer les conséquences de cette adhésion à la CPI, évidemment".

Paris a "pris acte" jeudi de ces mandats d'arrêt, rappelant "son attachement au travail indépendant de la Cour" mais sans dire explicitement si la France procéderait à leur arrestation si ces personnes se rendaient sur son territoire.

L'Italie et le Royaume-Uni ont en revanche immédiatement annoncé qu'ils respecteraient leur engagement auprès de la CPI.

A l'inverse, la Hongrie a invité le chef du gouvernement israélien en signe de défiance.


Budget: «pas de catastrophe annoncée» tempère Braun-Pivet face aux menaces de censure

La présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a déclaré mardi ne pas envisager de "catastrophe annoncée", face aux menaces de censure qui planent sur le projet de budget de l'Etat pour 2025. (AFP)
La présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a déclaré mardi ne pas envisager de "catastrophe annoncée", face aux menaces de censure qui planent sur le projet de budget de l'Etat pour 2025. (AFP)
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  • "J'entends tout et souvent n'importe quoi (...) Nos textes sont bien faits, notre Constitution et nos règles sont là, donc pas de catastrophe annoncée, pas de +shutdown+ à l'américaine (...) Il n'y a pas de scénario catastrophe"
  • Outre les oppositions, certains alliés de Michel Barnier font monter la pression pour limiter les hausses d'impôts

PARIS: La présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a déclaré mardi ne pas envisager de "catastrophe annoncée", face aux menaces de censure qui planent sur le projet de budget de l'Etat pour 2025.

"J'entends tout et souvent n'importe quoi (...) Nos textes sont bien faits, notre Constitution et nos règles sont là, donc pas de catastrophe annoncée, pas de +shutdown+ à l'américaine (...) Il n'y a pas de scénario catastrophe", a déclaré Mme Braun-Pivet, invitée sur Sud Radio.

"Le gouvernement peut présenter au Parlement ce qu'on appelle une loi spéciale pour prélever les impôts à partir du 1er janvier, il peut y avoir reconduction des dépenses par décret pour pouvoir payer les fonctionnaires, les retraités, etc. (...) Je ne veux pas inquiéter nos compatriotes. Nous sommes en responsabilité réelle", a-t-elle ajouté.

Interrogée sur les pressions auxquelles est confronté le Premier ministre Michel Barnier - Marine Le Pen pour l'extrême droite puis Mathilde Panot au nom de la gauche ont fermement maintenu lundi leurs menaces de censure du gouvernement après leurs entretiens avec le locataire de Matignon - Yaël Braun-Pivet considère qu'il s'agit plutôt de "positions politiques".

"Le rôle du Premier ministre, lorsqu'il construit un budget, c'est de prendre en compte les expressions des parlementaires élus de la nation représentant les Français. (...) Il faut faire des choix et c'est justement ça qui lui incombe en tenant compte des opinions et des expressions politiques des uns et des autres".

Face à l'intention du RN de voter la censure si le budget restait "en l'état" selon Marine Le Pen, la présidente de l'Assemblée nationale a rappelé que la motion de censure est "un droit constitutionnel qui appartient aux parlementaires" et appelé à ce que "chacun se mette dans une position constructive pour le bien de notre pays".

Outre les oppositions, certains alliés de Michel Barnier font monter la pression pour limiter les hausses d'impôts.

Le chef des députés macronistes Gabriel Attal, qui était reçu mardi matin avec les autres dirigeants du "socle commun", a redit lundi ses "doutes" à ce sujet mais jugé Marine Le Pen "totalement irresponsable", en marge d'un déplacement dans l'Orne.


France: la menace de la censure s'accroît sur le gouvernement Barnier

Cette vue générale prise à Paris le 2 avril 2024, montre le Sénat français lors d'une session. (AFP)
Cette vue générale prise à Paris le 2 avril 2024, montre le Sénat français lors d'une session. (AFP)
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  • Formé le 21 septembre à l'issue de plusieurs semaines de crise politique suivant la dissolution inattendue de l'Assemblée nationale par le président Emmanuel Macron, en juin, l'exécutif se sait bâti sur du sable, étant minoritaire
  • Le Premier ministre n'a visiblement pas davantage convaincu la cheffe de file des députés de la France insoumise

PARIS: Le risque de censure s'est accru lundi sur le gouvernement français: la cheffe de file de l'extrême droite Marine Le Pen et Mathilde Panot au nom de la gauche ont fermement maintenu leurs menaces en ce sens, après des entretiens avec le Premier ministre conservateur Michel Barnier.

Formé le 21 septembre à l'issue de plusieurs semaines de crise politique suivant la dissolution inattendue de l'Assemblée nationale par le président Emmanuel Macron, en juin, l'exécutif se sait bâti sur du sable, étant minoritaire.

Une censure ne serait pas "le chaos", a souligné Mme Le Pen après avoir été reçue lundi par M. Barnier.

Alors que selon elle le Premier ministre a "campé sur ses positions", elle a affirmé que le RN ne "renoncer(ait) pas à défendre les Français", refusant de céder "à la petite musique (...) consistant à dire si jamais ce budget est refusé, s'il y a une censure, ça va être dramatique, ça va être le chaos".

Le RN est le parti comptant le plus grand nombre d'élus à l'Assemblée (125 sur 577 sièges).

Le Premier ministre n'a visiblement pas davantage convaincu la cheffe de file des députés de la France insoumise (gauche radicale), Mathilde Panot, qu'il a reçue ensuite.

A sa sortie de l'entretien, Mme Panot a appelé "l'ensemble des députés", y compris du RN, à voter la motion de censure. Elle a prévu de la déposer avec ses alliés du Nouveau front populaire (NFP) si le Premier ministre utilisait l'article 49.3 de la Constitution -qui lui permet de faire passer un texte sans vote- pour forcer l'adoption de son budget 2025 décrié.

Mme Panot a "acté des désaccords profonds" avec M. Banier, le budget étant selon elle "le plus violent socialement et écologiquement" de la Ve République.

Alors que la France est lourdement endettée et que le gouvernement veut faire voter de nombreuses économies, la gauche et l'extrême droite, qui s'y opposent, pourraient le faire tomber ensemble.

"Jusqu'à présent, on avait une opposition de style entre la gauche et le RN", observe le politologue du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), Olivier Costa. "La gauche souhaitait censurer le gouvernement Barnier dès que possible, l'estimant illégitime, alors que l'extrême droite souhaitait le laisser œuvrer pour s'afficher en parti responsable".

Mais "pour la première fois depuis que Barnier est en poste, il y a un risque réel d'avoir une motion de censure contre lui", souligne-t-il.

- "Mort politique" -

Un raidissement attribué par nombre d'analystes aux ennuis judiciaires de Marine Le Pen, qui à l'instar de son parti est accusée de détournements de fonds publics européens, pour un préjudice de 4,5 millions d'euros.

Les réquisitions ont été lourdes à l'encontre de Mme Le Pen: cinq ans d'emprisonnement, dont deux ferme, 300.000 euros d'amende et cinq ans d'inéligibilité avec exécution immédiate, ce qui signifie qu'elle deviendrait inéligible dès le prononcé du verdict, même en cas d'appel.

"C'est ma mort politique qui est réclamée", considère la candidate trois fois malheureuse à la présidentielle française, qu'une condamnation empêcherait de concourir à celle de 2027.

Alors que le RN refuse officiellement de lier une éventuelle censure à ses ennuis judiciaires, le chercheur Olivier Costa voit dans les déclarations à répétition de ses cadres une "stratégie d'agitation" médiatique.

"Si le gouvernement Barnier tombe, plus personne ne se souciera du procès des assistants parlementaires du RN, alors qu'ils sont actuellement sous le feu de la rampe", estime-t-il.

- "Chienlit" -

Le vote de la motion de censure pourrait intervenir dans la deuxième quinzaine de décembre, si le gouvernement a recours à l'article 49.3.

"Est-ce que le RN passera réellement à l'acte? Je ne sais pas", souligne toutefois le politologue Pascal Perrineau, professeur à Sciences Po Paris, interrogé par l'AFP. Car il y aura selon lui "un coût politique" pour ceux qui feront tomber l'exécutif.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", parce qu'"il n'existe aucune majorité alternative au socle qui soutient le gouvernement", a estimé le chef de la diplomatie française, Jean-Noël Barrot.

La porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a elle évoqué le risque d'"un scénario à la grecque" pour la France, la censure du budget pouvant selon elle plonger le pays dans une crise financière.