RAMALLAH: La police israélienne fait l’objet de violentes critiques, car elle ne parvient pas à endiguer la criminalité qui frappe la population arabe.
La communauté arabe d’Israël compte 1,7 million de personnes. Elle souffre d’une recrudescence sans précédent de la criminalité, ce qui suscite l’inquiétude des Arabes quant aux intentions et à la capacité de la police israélienne à lutter contre ce fléau.
Des groupes criminels organisés ont tué cinquante et un Arabes depuis le début de l’année en Galilée, dans le Triangle et dans le Néguev.
On assiste à un bras de fer interminable entre les Arabes qui vivent en Israël et la police: les premiers accusent la police israélienne d’être incapable d’endiguer la criminalité, tandis que cette dernière reproche à la communauté arabe son manque de coopération et son refus de fournir des informations sur l’identité des suspects.
Lors de sa campagne électorale, le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, s’est engagé à soutenir la police et à éradiquer la violence qui frappe la communauté arabe. Dans un contexte de recrudescence de la criminalité, d’imminents officiers de police avancent que le ministre et l’inspecteur général de la police israélienne, Kobi Shabtai, doivent désormais prendre les choses en main et constituer un organisme pour résoudre ce problème.
Près de 33% de crimes ont été élucidés en 2021, contre 21% seulement en 2022. Pour l’année en cours, trois homicides seulement ont été traités sur un total de quarante-huit.
En comparaison, en 2020, 68% des crimes commis dans la communauté juive ont été élucidés. Ce chiffre a atteint 78% en 2021 et à 70% en 2022.
Les données de la police indiquent que cinq cent dix-huit Arabes qui vivaient en Israël ont été tués entre 2018 et le début de l’année 2023. Ces chiffres correspondent à cent quatre homicides en moyenne par an.
Le directeur stratégique de l’Institut Givat Habiba et expert de la société arabe en Israël, Mohammed Darawsheh, explique à Arab News que le nombre d’Arabes victimes d’homicides a doublé par rapport à l’année dernière; ils représentent 17% de la population d’Israël.
La police fait preuve de clémence à l’égard des organisations criminelles qui trouvent ainsi un environnement propice à leur expansion, explique M. Darawsheh.
«La police réprime les Arabes qui manifestent et s’abstient de protéger les citoyens contre la criminalité qui s’envenime», s’inquiète-t-il.
«Je préfère que mon fils passe la soirée dans un café d’une ville juive plutôt que dans une ville arabe. Ici, il risque d’être blessé accidentellement par balle. Ces incidents sont monnaie courante.»
Pour M. Darawsheh, ouvrir un commerce n’est même pas une chose envisageable. Les gangsters revendiqueraient leur part des bénéfices de l’entreprise.
Il affirme que la criminalité organisée est responsable de 90% des meurtres.
Aux yeux des experts arabes, le crime organisé reste le défi le plus important auquel leur communauté se trouve confrontée.
Certains hommes d’affaires arabes ont été contraints de quitter l’endroit où ils travaillaient en raison de la criminalité pour s’installer dans des villes où cohabitent des Arabes et des Israéliens.
Jalal Banna est un analyste politique originaire de Kufur Yassif, en Galilée. Il explique à Arab News que «si un Arabe brandit son arme contre un Juif ou contre un représentant de l’État, il sera poursuivi en justice pour atteinte à la sécurité et emprisonné pendant vingt ans. En revanche, l’Arabe qui utilise une arme contre un concitoyen ne sera pas détenu quelques jours ou quelques semaines; c’est la sanction maximale qu’il encourt».
«La police ne souhaite pas éradiquer la criminalité, bien qu’elle dispose des moyens nécessaires pour le faire.»
Certains experts israéliens spécialisés dans la sécurité estiment que le Shin Bet (Service de sécurité intérieure israélien, NDLR) devrait s’impliquer dans la lutte contre le crime organisé compte tenu des capacités avancées dont il dispose en matière de technologie, d’information et d’expérience.
Toutefois, certains dirigeants de la communauté arabe d’Israël sont peu favorables à cette proposition. Ils estiment que la police se soucie peu des crimes qui font des victimes parmi les Arabes et qu’elle n’intervient que lorsque la communauté juive est menacée.
De son côté, la police israélienne prétend que les Arabes refusent de fournir les informations qui permettraient d’identifier leurs concitoyens susceptibles d’avoir commis des crimes.
Le crime organisé évolue aujourd’hui; il s’étend vers les villes mixtes israélo-arabes. Cette situation pose désormais une menace stratégique à la communauté juive.
Selon M. Banna, les Arabes d’Israël accusent des «forces souterraines» d’être à l’origine des crimes.
«La société arabe offre un terrain fertile pour les crimes, notamment les crimes organisés», conclut-il.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com