KIEV: La Russie a affirmé jeudi bloquer les forces ukrainiennes dans Bakhmout et empêcher tout renfort d'y entrer, laissant entendre qu'elle était sur le point de prendre cette ville de l'est du pays, épicentre des combats depuis l'été dernier.
Dans un commentaire à l'AFP, l'armée ukrainienne a immédiatement démenti, en assurant continuer à ravitailler ses troupes dans Bakhmout et y infliger quotidiennement des "pertes folles" à l'ennemi.
L'AFP n'a pas pu vérifier ces déclarations de source indépendante.
Le chef du groupe paramilitaire russe Wagner, Evguéni Prigojine, dont les combattants sont en première ligne à Bakhmout, a lui indiqué qu'il était encore "prématuré" de parler d'un encerclement complet.
Ville de quelque 70.000 habitants avant l'invasion, la cité est aujourd'hui presque totalement détruite.
Du fait de la longueur de la bataille et des lourdes pertes subies par les deux camps, Bakhmout est devenue le symbole de la lutte entre Russes et Ukrainiens pour le contrôle de la région industrielle du Donbass, objectif affiché de Moscou.
"Les groupes d'assaut de Wagner poursuivent des opérations militaires de haute intensité pour refouler l'ennemi des quartiers du centre d'Artiomovsk" (nom soviétique de Bakhmout utilisé par les Russes), a indiqué jeudi le ministère russe de la Défense, dans son compte rendu quotidien.
"Les troupes aéroportées (russes) soutiennent sur les flancs les groupes d'assaut, bloquant l'envoi de réserves de l'armée ukrainienne dans la ville et la possibilité d'un retrait (de Bakhmout) des unités de l'ennemi", a-t-il poursuivi.
Contactée par l'AFP, l'armée ukrainienne a démenti tout blocage de ses soldats.
"Nous pouvons communiquer complètement avec nos troupes, à la fois grâce à des moyens techniques, mais aussi pour y livrer des produits alimentaires, des munitions, des médicaments, tout le nécessaire, et pour récupérer nos blessés", a indiqué Serguiï Tcherevaty, un porte-parole militaire ukrainien.
Décor apocalyptique
"Nos forces maintiennent leur défense en infligeant quotidiennement des pertes folles à l'ennemi", a-t-il ajouté, précisant que l'artillerie ukrainienne menait "constamment" des tirs de contre-batterie sur les canons russes pour qu'ils ne puissent pas concentrer leurs tirs sur les lignes de ravitaillement vers Bakhmout.
M. Prigojine a, lui, pris plus de précautions que l'armée russe, dans un message publié par son service de presse sur Telegram.
"L'armée ukrainienne continue d'amener des renforts et de les transférer dans la ville. Des combats difficiles et sanglants sont en cours, donc il est prématuré d'évoquer un encerclement complet de Bakhmout", a-t-il indiqué.
"Plus de 80% de Bakhmout est sous notre contrôle, les autres parties résistent avec acharnement", a-t-il ajouté.
Ces derniers jours, les forces ukrainiennes semblent avoir perdu du terrain dans le centre de Bakhmout, où plusieurs correspondants de guerre russes se sont rendus, montrant dans leurs reportages une ville dévastée au décor apocalyptique.
Lundi, le chef de l'occupation russe de la région ukrainienne de Donetsk, Denis Pouchiline, a publié une vidéo le montrant dans le centre de Bakhmout, affirmant que la ville était en train d'être "libérée".
Les troupes russes qui ont déjà coupé plusieurs routes d'approvisionnement ukrainiennes ces dernières semaines, semblent progresser dans le centre de la ville, dans de furieux combats urbains, nourrissant à nouveau les spéculations quant à un retrait ukrainien à venir.
Le groupe russe Wagner sur la liste des sanctions de l'UE pour ses activités en Ukraine
L'Union européenne a ajouté jeudi l'organisation paramilitaire russe Wagner sur sa liste des individus et entités sanctionnés pour "participation active à la guerre d'agression russe contre l'Ukraine".
Ce groupe de mercenaires, qui combat dans l'est du territoire ukrainien pour tenter de s'emparer des villes de Bakhmout et de Soledar, avait déjà été placé en février sur une autre liste de sanctions de l'UE pour violation des droits de l'Homme et "déstabilisation" de pays en Afrique.
Le Conseil européen, qui représente les 27 États membres de l'Union européenne, a expliqué que la nouvelle liste de sanctions "complétait" la précédente.
Wagner, a-t-il poursuivi, y a été inscrit pour "des actions sapant ou menaçant l'intégrité territoriale, la souveraineté et l'indépendance de l'Ukraine".
Le fait que cette organisation paramilitaire soit ainsi doublement sanctionnée "souligne la dimension internationale et la gravité" de ses activités, ainsi que "son impact déstabilisateur sur les pays où elle est active", a relevé dans un communiqué le Conseil.
Ce dernier a également ajouté à sa liste des personnes physiques et morales visées par les sanctions RIA FAN, un média russe qui fait partie du Patriot Media Group, dont le conseil d'administration est dirigé par Evgueni Prigojine, le patron de Wagner.
«Nulle part où aller»
Dans le village de Kalynivka, à quelques kilomètres à l'ouest de Bakhmout, Vira Petrova, 71 ans, dit ne pas avoir peur que les combats se rapprochent de chez elle.
"Nous, nous avons déjà été bombardés. La moitié du toit de la cuisine a été détruite. Le toit de notre voisin a été détruit", dit-elle à l'AFP, en montrant sa maison endommagée.
Sa rue, bordée de cerisiers en fleurs et de maisons abandonnées, ne compte plus qu'une vingtaine d'habitants. Mais pas question pour Vira Petrova de s'imaginer quitter les lieux, quand bien même les Russes avanceraient.
"Je n'ai nulle part où aller. Je ne peux pas me permettre de partir", explique-t-elle, comme de nombreux habitants de la région. "Si ma maison est détruite, je vivrai dans mon sous-sol".
Début mars, alors que montait déjà la crainte d'une chute de Bakhmout, bataille la plus longue et la plus meurtrière depuis le déclenchement de l'invasion russe en février 2022, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait exclu tout retrait de ses troupes.
Kiev assure que sa résistance depuis des mois à Bakhmout a permis de fixer à un endroit du front et de détruire un grand nombre de troupes russes.
Centrale ukrainienne de Zaporijjia: «nous sommes en sursis», avertit le chef de l'AIEA
"Si nous n'agissons pas pour protéger la centrale, notre chance tournera tôt ou tard, avec des conséquences potentiellement graves sur la santé humaine et l'environnement", a mis en garde M. Grossi dans un communiqué diffusé à Vienne, où se trouve le siège de l'AIEA.
"Nous sommes en sursis en ce qui concerne la sûreté et la sécurité nucléaires à la centrale de Zaporijjia", la plus grande d'Europe, qui est occupée par les Russes depuis mars 2022, a-t-il ajouté, réitérant les craintes déjà exprimées à plusieurs reprises par son organisation.
Deux explosions de mines terrestres se sont produites à l'extérieur de la clôture entourant ce site, la première le 8 avril et une autre quatre jours plus tard, selon le communiqué.
On ignore pour le moment ce qui a déclenché les explosions, a souligné M. Grossi, qui a rencontré la semaine dernière de hauts responsables russes à Kaliningrad (ouest de la Russie). Il s'était peu avant rendu à la centrale de Zaporijjia, pour la deuxième fois depuis le début de la guerre en Ukraine.
Le directeur de l'AIEA a en outre averti jeudi que ce site, qui abrite six réacteurs nucléaires, continuait de dépendre d'une seule ligne électrique encore en fonctionnement, ce qui constitue "un risque majeur pour la sûreté et la sécurité nucléaires".
Une ligne électrique de secours endommagée le 1er mars n'a toujours pas été réparée, a déploré cette agence de l'ONU.
L'Agence internationale de l'énergie atomique a également noté que la situation du personnel dans cette centrale restait "complexe et difficile", y compris en raison de pénuries d'employés.