PARIS: Travailler et jeûner pendant le mois du ramadan n’est pas toujours facile pour les musulmans français. Reem, Française d’origine égyptienne, sait de quoi elle parle. Vendeuse dans une boutique parisienne, elle confie à Arab News en français que le jeûne qu’elle pratique depuis une dizaine d’années est devenu une épreuve d’endurance, depuis qu’elle a commencé sa carrière professionnelle.
La France étant un pays laïque, aucun aménagement dans les horaires de travail n’est prévu pour les actifs qui jeûnent pendant le mois sacré. Reem se retrouve donc souvent à rompre le jeûne avec son époux, bien après le coucher du soleil qui correspond à l’heure de la rupture du jeûne.
Préparer un iftar nécessite des mets variés et un temps de préparation qui fait que les journées de Reem lui semblent parfois interminables.
Alors oui, avoue-t-elle, les livraisons d’iftars à domicile qui ont essaimé cette année sur des sites en ligne sont pour elle et sa famille un grand soulagement. Ces livraisons lui permettent de goûter à la joie festive d’un iftar, qui est un moment de partage et de détente, loin du tracas de la préparation et de l’attention qu’elle requiert.
Découvrir d’autres iftars
Comme Reem, nombreux sont les musulmans français qui s’adonnent au confort de l’iftar livré à domicile. Madjid, Français d’origine marocaine et enseignant dans un collège, trouve que cette formule récente permet de varier les plaisirs et d’aller à la découverte de repas différents. Un iftar à la libanaise qui se distingue par une soupe aux lentilles, une salade appelée «fattouche», et une boisson du nom de «jallab», lui permet de rompre avec le traditionnel iftar marocain dont la particularité est une soupe de légumes et de viande baptisée «harira», du couscous, des dattes et du thé à la menthe.
C’est une aubaine, estime-t-il, de profiter de la grande variété des menus proposés sur les différents sites et d’alterner un iftar marocain avec un iftar moyen-oriental, indonésien, indien…
La livraison des repas à domicile a véritablement explosé pendant le confinement dû à la pandémie de Covid-19 et lui a survécu, pour devenir une sorte de mode de vie adopté par un grand nombre de Français.
Malgré le retour à la vie normale, de plus en plus de Français plébiscitent la livraison à domicile pour les plats préparés, ainsi que pour les courses en tout genre, alimentaires et autres…
Cette année, les restaurateurs ont ajouté l’iftar dans cette même logique, en concevant des menus spéciaux adaptés à la rupture du jeûne.
L’offre est d’une grande variété, aussi bien dans Paris que dans sa banlieue; il suffit de consulter le site parisgourmand.com pour s’en rendre compte. Ce site fourmille de noms et d’adresses de restaurants qui proposent des menus iftars à emporter.
Il est ainsi possible de rompre le jeûne avec un iftar algérien de Mama Nissa, un restaurant installé au cœur du quartier branché de Montorgueil à Paris; un iftar indien chez Jaipur Café, dans le Xe arrondissement de la capitale; un iftar libano-marocain chez Rouna, une adresse tenue par une restauratrice d’origine égyptienne. Le Djakarta Bali propose, quant à lui, un iftar indonésien, et le Majouja, un iftar kabyle, dans le IXe arrondissement de la capitale.
Les restaurants orientaux qui ont pignon sur rue ne sont pas en reste. Le restaurant marocain Mansouria, considéré comme l’un des meilleurs restaurants marocains à Paris, de même que le restaurant Qasti, tenu par le chef étoilé libanais Alan Geaam, ont également concocté un menu iftar pour leur clientèle, ainsi qu’une formule à emporter.
Toutefois, d’autres restaurateurs orientaux ont fait le choix de ne pas se joindre à ce créneau.
Parmi eux, Al Dar, l’un des premiers restaurants libanais ouverts à Paris dont le responsable explique qu’ils font depuis longtemps la livraison à domicile et que tous les mets propres au iftar figurent sur leur carte. Aucun besoin selon lui de proposer un menu particulier puisque le client peut composer son menu par lui-même.
Cela dit, le repas de rupture du jeûne est désormais présent sur les plates-formes de livraisons à domicile et il fait partie du paysage culinaire français, n’en déplaise aux défenseurs purs et durs d’une laïcité même gastronomique. Cependant, ce service, dont le prix varie entre 17 et 45 euros par personne, voire plus, reste un privilège qui n’est pas à la portée des personnes et des familles nombreuses à revenus modestes.