Dans un hôpital volant, l'espoir de jours meilleurs pour des blessés d'Ukraine

L'hôpital volant, un avion de ligne transformé appartenant à la compagnie scandinave SAS, atterrit à l'aéroport de Rzeszow, dans le sud-est de la Pologne, à 70 kilomètres de la frontière ukrainienne, pour récupérer les blessés avant de les transporter pendant deux jours à Amsterdam, Copenhague, Berlin, Cologne et Oslo. (AFP).
L'hôpital volant, un avion de ligne transformé appartenant à la compagnie scandinave SAS, atterrit à l'aéroport de Rzeszow, dans le sud-est de la Pologne, à 70 kilomètres de la frontière ukrainienne, pour récupérer les blessés avant de les transporter pendant deux jours à Amsterdam, Copenhague, Berlin, Cologne et Oslo. (AFP).
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Publié le Mercredi 29 mars 2023

Dans un hôpital volant, l'espoir de jours meilleurs pour des blessés d'Ukraine

  • Le Boeing 737 de SAS transformé en hôpital volant met le cap sur le sud-est de la Pologne et l'aéroport de Rzeszow, à 70 kilomètres de la frontière ukrainienne
  • Si c'est sur cet aérodrome que les patients en provenance d'Ukraine sont redistribués vers le reste de l'Europe, c'est aussi ici que les Occidentaux acheminent armes et munitions destinées à leurs alliés ukrainiens

AU BORD D'UN BOEING 737 MÉDICALISÉ : Les grimaces trahissent une douleur contenue, les regards pensifs se perdent à travers les hublots... Dans ce Boeing 737, les passagers sortent de l'ordinaire: dans leur âme et dans leur chair, tous ont été touchés par la guerre en Ukraine.

"C'est la première fois que je prends l'avion. J'aurais aimé me rendre au Danemark dans des circonstances normales, en vacances par exemple, pas pour aller à l'hôpital à cause d'un traumatisme", témoigne Mykola Fedirko.

Sur son poignet, un bracelet en silicone avec l'inscription "Ukraine". Sur sa jambe gauche, des broches métalliques fichées directement dans le tibia pour stabiliser la fracture subie en défendant son pays.

Vendeur de profession devenu soldat par nécessité, le jeune homme de 22 ans au visage émacié a reçu un éclat d'obus tandis qu'il tenait une tranchée face aux troupes russes dans la région de Donetsk.

Accompagné de sa petite amie, "Kolya", son diminutif, est l'un des quelque 2.000 patients à avoir été évacués d'Ukraine pour être réacheminés un peu partout sur le continent depuis le début des hostilités. Des blessés de guerre pour la plupart mais aussi des civils nécessitant de gros traitements.

L'AFP est le premier média international à embarquer sur l'un de ces vols d'évacuation sanitaire ("evasan") réalisés par la Norvège dans le cadre d'une collaboration avec l'Union européenne.

"Nous avons établi ce projet à la demande de l'Ukraine (...) afin d'alléger le fardeau pesant sur les hôpitaux ukrainiens", explique Juan Escalante, responsable du Centre (européen) de coordination de la réaction d'urgence (ERCC).

Un mécanisme "sans précédent à l'échelle continentale" mis en place en "un temps record", fait-il valoir.

En Ukraine, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a dénombré 859 installations sanitaires touchées par des attaques depuis le début de l'invasion russe le 24 février 2022.

Les bombardements d'hôpitaux, de maternités ou encore d'entrepôts de médicaments font que près d'un demi-million de personnes y sont privées chaque mois de l'aide médicale requise, selon les autorités norvégiennes.

Chassé-croisé

Avant d'effectuer des sauts de puce - Amsterdam, Copenhague, Berlin, Cologne et Oslo en deux jours - pour disséminer les patients, le Boeing 737 de SAS transformé en hôpital volant met le cap sur le sud-est de la Pologne et l'aéroport de Rzeszow, à 70 kilomètres de la frontière ukrainienne.

Un hub dont l'importance stratégique saute aux yeux: de part et d'autre de l'unique piste, des dizaines de missiles antiaériens pointent vers le ciel, parés à contrer d'éventuelles menaces venues des airs.

Si c'est sur cet aérodrome que les patients en provenance d'Ukraine sont redistribués vers le reste de l'Europe, c'est aussi ici que les Occidentaux acheminent armes et munitions destinées à leurs alliés ukrainiens.

Dans un cruel chassé-croisé, pendant que des estropiés de guerre sont transférés sur des brancards dans le Boeing médicalisé, d'immenses avions-cargos dégurgitent des palettes de munitions quelques mètres plus loin sur la même aire de stationnement.

Sur le vol "evasan", l'équipage est civil et le personnel médical militaire.

Dans un semblant de normalité, une hôtesse de l'air distribue pizzas, snacks et sodas dans les rangées.

Lui aussi touché aux jambes, Oleksiï Radzivil, 28 ans, engloutit sa Margherita arrosée d'un Coca.

Détonnant dans la gravité ambiante, cet homme aux cheveux ébouriffés et aux fines lunettes métalliques, ingénieur logiciel avant la guerre, ne se départit jamais de son sourire.

Pas même quand il recouvre ses esprits après qu'une roquette russe a détruit son véhicule, le propulsant plusieurs mètres en l'air, en décembre à Bakhmout, épicentre de combats dans l'est de l'Ukraine.

"J'ai souri parce que j'étais en vie", se souvient-il.

Depuis, il est passé par six hôpitaux dans son pays.

"J'espère que je vais guérir (...), que les médecins européens aux Pays-Bas pourront me venir aide", dit-il.

'Lutter contre Poutine'

Sur le Vieux Continent, ces transferts de patients sont présentés comme une forme de contribution à l'effort de guerre.

"Leur présence ici en Espagne est une autre façon de lutter contre Poutine", soulignait la ministre espagnole de la Défense, Margarita Robles, en visitant l'hôpital militaire de Saragosse l'an dernier.

Avec ses 20 couchettes, ses moniteurs, ses équipements de transfusion et de respiration artificielle, ses innombrables flacons d'antibiotiques, le Boeing a tout "d'une petite unité de soins intensifs volante", résume Håkon Asak.

Ce lieutenant-colonel du service de santé de l'armée norvégienne arbore lui aussi fièrement un bracelet bleu et jaune "Free Ukraine".

"Nous n'avons jamais déploré de décès à bord, Dieu merci", dit-il.

"La plupart des patients ont l'air d'aller bien mais ils sont encore dans un état grave et nous savons que certains de ceux qui ont été évacués dans différents pays n'ont pas survécu à toute la durée du traitement", précise l'officier.

Rentrer

Derrière le manche, un vieux briscard.

Dans sa première vie, au crépuscule de la Guerre froide, Arve Thomassen a été un pilote de chasse qui interceptait les appareils soviétiques dans l'Arctique.

A 60 ans, ce truculent Norvégien se dit heureux d'achever sa carrière sur une bonne cause.

"Quand vous transportez des passagers vers la Méditerranée pour des bains de soleil, c'est le business normal, je ne dirais pas ennuyeux mais ordinaire", dit-il depuis son cockpit.

"Tandis que ça, nous en tirons beaucoup de fierté mais aussi d'humilité", ajoute-t-il.

Au fil des missions, les impressions s'accumulent, comme autant de coups de dague au cœur: les grands brûlés, cet homme défiguré évoquant les "gueules cassées" de 14-18, et puis ce môme de trois ans atteint de leucémie.

"C'est impossible à oublier", reprend le commandant de bord. "Une chose, ce sont les soldats blessés mais des enfants souffrants... ça fait toujours forte impression sur quelqu'un, je pense".

Pour certains passagers, un sommeil providentiel permet de dérober quelques minutes aux souffrances.

Vladyslav Chakhov, lui, ne dort pas.

Entrepreneur devenu pilote de blindé, ce barbu brun aux yeux d'un bleu perçant est atteint de tetraparésie, une faiblesse musculaire touchant les quatre membres,  depuis qu'un éclat lui est entré dans la nuque.

"Je ne suis pas à l'aise à l'idée de quitter mon pays", assure le jeune homme de 24 ans. "A l'hôpital en Allemagne, j'espère qu'ils me remettront sur pied rapidement pour que je puisse rentrer".


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.


Les États-Unis proposent à l'ONU une résolution pour « une fin rapide » du conflit en Ukraine

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine.  (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
  • Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE.

NATIONS-UNIES : Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale du pays, après une nouvelle attaque du président américain Donald Trump contre son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Dans un communiqué, le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a exhorté les pays membres de l'ONU à approuver cette nouvelle résolution « simple » et « historique », et « tous les États membres à la soutenir, afin de tracer un chemin vers la paix ».

« Cette résolution est une bonne idée », a rapidement commenté l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassili Nebenzia, déplorant toutefois l'absence de référence « aux racines » du conflit.

Les Européens, désarçonnés par l'ouverture du dialogue américano-russe sur l'Ukraine, n'avaient pas réagi samedi matin à la proposition américaine.

« Nous n'avons pas de commentaire pour l'instant », a simplement indiqué l'ambassadeur français à l'ONU Nicolas de Rivière, alors que l'Assemblée générale doit se réunir lundi.

Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE, mais aussi à un mépris pour les principes fondamentaux du droit international », a déclaré à l'AFP Richard Gowan, de l'International Crisis Group.

L'Assemblée générale de l'ONU se réunit lundi pour marquer le troisième anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine.

À cette occasion, l'Ukraine et les Européens ont préparé un projet de résolution qui souligne la nécessité de « redoubler » d'efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre « cette année », et prend note des initiatives de plusieurs États membres ayant présenté « leur vision pour un accord de paix complet et durable ».

Le texte réitère également les précédentes demandes de l'Assemblée générale, appelant à un retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes d'Ukraine ainsi qu'à la cessation des attaques de la Russie contre l'Ukraine.

Ces précédents votes avaient rassemblé plus de 140 voix sur les 193 États membres.

Les nouvelles salves de M. Trump contre M. Zelensky interviennent alors que la visite de l'émissaire du président américain, Keith Kellogg, semblait avoir apaisé la situation. Ces nouvelles attaques de M. Trump contre M. Zelensky font suite à des premières invectives virulentes plus tôt dans la semaine, qui avaient suscité une vive réaction de la part de Kiev et la stupéfaction de ses alliés européens.

M. Zelensky avait déclaré avoir eu des échanges « productifs » avec M. Kellogg, et ce dernier l'avait qualifié de « dirigeant courageux et assiégé d'une nation en guerre ».

Vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réaffirmé que le président Vladimir Poutine était « ouvert » à des pourparlers de paix.

La Russie exige notamment que l'Ukraine lui cède quatre régions ukrainiennes, en plus de la Crimée qu'elle a annexée en 2014, et qu'elle n'adhère jamais à l'Otan. Des conditions jugées inacceptables par les autorités ukrainiennes qui demandent à leurs alliés des garanties de sécurité solides.

M. Trump et ses collaborateurs ont jugé « irréaliste » l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan et son ambition de reprendre ses territoires perdus à la Russie.

Sur le terrain, la situation reste difficile pour les troupes ukrainiennes. L'armée russe a revendiqué vendredi la prise de deux localités dans l'est de l'Ukraine.


60 ans après, l'assassinat de Malcolm X continue de secouer l'Amérique

L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
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  • Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ».
  • « Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

NEW-YORK : Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ». C'est ce que rappelle le Shabazz Center, le mémorial et centre éducatif installé dans l'ancienne salle de bal de Harlem où il a été abattu à 39 ans, au faîte de son influence, et ce quelques mois seulement après l'abolition de la ségrégation raciale.

Qui a commandité le meurtre ? Comment le drame a-t-il pu survenir en pleine réunion publique, alors que les menaces pesant sur le militant, porte-voix de la « Nation of Islam » puis de l'abolition des discriminations, étaient connues des autorités ?

Pour obtenir des réponses, sa famille a engagé en novembre 2024 des poursuites au civil spectaculaires, réclamant 100 millions de dollars aux forces de l'ordre et aux agences fédérales qu'elle accuse, selon elle, d'avoir joué un rôle à divers degrés dans son assassinat.

Dans ce dossier qui doit entrer dans le vif du sujet début mars devant un tribunal de Manhattan, la famille assure disposer d'éléments nouveaux lui permettant d'assigner en justice la police de New York (NYPD), le FBI ou encore la CIA.

« Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

- « Qui a donné l'ordre ? » -

Selon l'assignation en justice, la famille du leader afro-américain, également connu sous le nom d'El-Hajj Malik El-Shabazz, estime que les forces de l'ordre et les services de renseignement américains ont sciemment désengagé les policiers dont la mission était de le protéger la nuit du drame.

Des agents en civil ne sont pas non plus intervenus au moment des faits et, depuis sa mort, les agences de renseignement s'emploieraient à dissimuler leurs agissements, selon la plainte.

Contactée par l'AFP, la police de New York n'a pas souhaité s'exprimer pour l'instant.

« Cette dissimulation a duré des décennies, privant la famille Shabazz de la vérité et de leur droit à obtenir justice », estime auprès de l'AFP Me Ben Crump, qui défend le dossier pour les filles de Malcolm X.

« Nous écrivons l'histoire en nous dressant ici face à ces torts et en demandant des comptes devant les tribunaux », se félicite le conseil, qui a demandé vendredi la « déclassification de documents » liés à ce dossier.

L'affaire avait déjà rebondi en 2021, lorsque deux des trois anciens hommes reconnus coupables de l'assassinat et ayant passé plus de vingt ans derrière les barreaux ont finalement été innocentés, ce qui constitue l'une des plus grandes erreurs judiciaires des États-Unis. En réparation, les deux Afro-Américains ont touché 36 millions de dollars de la part de la ville et de l'État de New York.

« On sait déjà assez précisément comment l'assassinat de Malcolm X s'est déroulé. On sait qui en est responsable : cinq membres de la Nation of Islam. La seule chose qu'on ignore, c'est qui a donné l'ordre », observe Abdur-Rahman Muhammad, historien et spécialiste reconnu du dossier, dont les travaux pendant des décennies ont contribué à disculper les deux accusés à tort.

Selon lui, les éléments mis en avant aujourd'hui par la famille de Malcolm X sont « peu crédibles ».

Il concède toutefois que « si la plainte permet de déterminer qui a donné l'ordre final, alors elle aura de la valeur ».

Cet énième rebondissement aura au moins permis de remettre en avant « l'héritage » de Malcolm X, plus important que jamais sous le second mandat de Donald Trump, « ennemi implacable » de la communauté noire, affirme l'historien.

« Cela va inciter les Afro-Américains à se serrer les coudes », anticipe Abdur-Rahman Muhammad. « En résumé, la communauté noire doit revenir au message de Malcolm : lutter. »