PARIS: Les entreprises s'engagent trop souvent de manière lacunaire contre le réchauffement climatique, négligeant les émissions de leurs fournisseurs et faisant l'impasse sur la protection de la nature, selon une enquête du Carbon disclosure project (CDP) publiée mercredi.
Les émissions de gaz à effet de serre issues de la chaîne d'approvisionnement des entreprises sont en moyenne 11,4 fois plus importantes que les émissions de leurs propres opérations, selon l'ONG, observatoire de référence de l'empreinte écologique. "Et pourtant, beaucoup ne les mesurent toujours pas", regrette-t-elle.
Parmi les plus de 18 500 groupes à travers le monde qui divulguent leurs données auprès du CDP, seule une minorité (41%) a ainsi livré des chiffres sur les émissions allant au-delà de leurs propres activités.
Ces émissions indirectes sont habituellement regroupées dans une catégorie dite "scope 3". Ce périmètre recoupe toutes les émissions, en amont et en aval, de la chaîne de valeur de la société: celles qui ont lieu lorsque sont fabriqués les produits achetés à ses sous-traitants et celles émises lors de l'utilisation du produit ou du service par le client final.
Les groupes tendent ainsi à "évaluer leurs propres opérations directes sans regarder leurs impacts plus larges", s'inquiète le rapport.
"Le rapport publié cette année montre que l'action environnementale ne s'engage pas à la vitesse, à l'échelle et sur les périmètres nécessaires pour limiter le réchauffement climatique mondial à 1,5°C", s'inquiète aussi Sonya Bhonsle, du CDP, en référence à l'objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris.
"De nombreuses entreprises ne reconnaissent pas que leur impact sur l'environnement s'étend bien au-delà de leurs opérations et de la question du changement climatique", regrette-t-elle.
C'est l'autre enseignement du rapport: les défis environnementaux, au-delà du climat, sont encore souvent ignorés par les entreprises.
Sur les quelque 18 500 groupes répertoriés, près de 7 300 embarquent leurs fournisseurs dans des engagements relatifs au changement climatique mais seulement 915 sur l'eau et un peu plus de 540 dans le lutte contre la déforestation.
Ces engagements lacunaires risquent d'entrer en collision avec de nouvelles obligations pour les entreprises, pointe le CDP.
"On a besoin d'un leadership environnemental tout de suite de la part des entreprises, qui doivent s'attaquer à leurs impacts à la fois sur le climat et la nature, et travailler avec leurs fournisseurs de manière intégrée", conclut Sonya Bhonsle.