Retraites: suite du débat au Sénat, poursuite des grèves et doutes sur une majorité à l'Assemblée

A Paris, plusieurs centaines de jeunes ont manifesté jeudi après-midi à l'appel des organisations lycéennes et étudiantes. Des manifestations ont aussi eu lieu notamment à Rouen ou à Toulouse. (Photo, AFP)
A Paris, plusieurs centaines de jeunes ont manifesté jeudi après-midi à l'appel des organisations lycéennes et étudiantes. Des manifestations ont aussi eu lieu notamment à Rouen ou à Toulouse. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 09 mars 2023

Retraites: suite du débat au Sénat, poursuite des grèves et doutes sur une majorité à l'Assemblée

  • Quelques heures après le vote de l'article phare du projet, une «étape importante» selon la Première ministre Élisabeth Borne, le Sénat dominé par la droite a repris l'examen du texte
  • Dans le ciel, après plusieurs journées de perturbations, la Direction générale de l’Aviation civile (DGAC) a encore demandé aux compagnies aériennes de renoncer à 20% de leurs vols prévus pendant le weekend dans plusieurs grands aéroports

PARIS: Le Sénat avançait jeudi dans l'examen de la réforme des retraites, après avoir adopté dans la nuit le report à 64 ans de l'âge de départ, sur fond de grèves persistantes, de blocages épars et d'interrogations grandissantes sur l'existence d'une majorité à l'Assemblée nationale.

Quelques heures après le vote de l'article phare du projet, une "étape importante" selon la Première ministre Élisabeth Borne, le Sénat dominé par la droite a repris l'examen du texte.

Jeudi après-midi, avec l'aval du gouvernement, les sénateurs ont adopté une proposition de la droite et des centristes instaurant une surcote de pension allant jusqu'à 5% pour les femmes choisissant de partir à l'âge légal de la retraite, mais ayant cumulé les annuités requises dès un an avant.

En revanche, un amendement très attendu du patron des sénateurs LR Bruno Retailleau a été remisé à plus tard, au grand dam de la gauche.

Il s’agissait que l'extinction progressive des régimes spéciaux de retraite, votée à l'article 2, s'applique aux salariés déjà en poste, sans conserver de "clause du grand-père".

Mais plus de 200 sous-amendements avaient été déposés à la dernière minute par les communistes, et leur discussion aurait pris une grande partie de la journée. Catherine Deroche, présidente LR de la commission des Affaires sociales, a obtenu leur mise en réserve. Un procédé "extrêmement déloyal", s'est récrié le chef de file du groupe PS Patrick Kanner.

« Grave problème démocratique » 

Le vote du report de l'âge "ne change rien dans la détermination et les mobilisations", a de son côté averti jeudi Philippe Martinez. Le secrétaire général de la CGT a fustigé "l'indifférence" et le "mépris" du pouvoir, Emmanuel Macron ayant opposé une fin de non-recevoir à l'intersyndicale qui avait demandé mardi à être reçue "en urgence" à l’Élysée.

Les huit principaux syndicats et cinq organisations de jeunesse ont adressé par écrit cette demande au chef de l’État, jugeant au passage que le silence de l'exécutif face au mouvement social posait un "grave problème démocratique".

L'intersyndicale a appelé à deux nouvelles journées de mobilisation: la première dès samedi, la suivante mercredi 15 mars, jour de la réunion de la commission mixte paritaire députés-sénateurs.

La grève se poursuivait jeudi pour un troisième jour dans les transports, les raffineries et l'énergie, où l'alimentation du réseau en gaz est considérablement ralentie en raison des blocages.

Environ un tiers des TGV circulent dans l'Hexagone, comme mercredi. En Ile-de-France, le trafic ferroviaire restait très perturbé, avec 80% de trains en moins par rapport à d'habitude sur le RER D et la ligne R du Transilien, notamment.

Dans le métro parisien, la situation s'améliorait nettement avec un trafic normal ou quasi normal sur la moitié des lignes, pour un retour à la normale vendredi, sauf sur le RER B.

« Risque à voter » 

Dans le ciel, après plusieurs journées de perturbations, la Direction générale de l’Aviation civile (DGAC) a encore demandé aux compagnies aériennes de renoncer à 20% de leurs vols prévus pendant le weekend dans plusieurs grands aéroports, dont Orly.

En Seine-Saint-Denis, des électriciens et gaziers de la CGT ont coupé le courant du Stade de France et du chantier du village olympique.

A Paris, plusieurs centaines de jeunes ont manifesté jeudi après-midi à l'appel des organisations lycéennes et étudiantes. Des manifestations ont aussi eu lieu notamment à Rouen ou à Toulouse.

Des blocages, souvent partiels, ont été aussi organisés dans plusieurs lycées et universités.

Le Sénat a jusqu'à dimanche minuit pour examiner le texte et, en cas de vote favorable, tentera de trouver un accord avec les députés lors d'une commission mixte paritaire.

En l'état actuel du texte, le déficit supplémentaire que connaîtrait le régime des retraites à l'horizon 2030 s'élèvera à 450 millions d'euros, a avancé jeudi le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, qui souhaite à l'arrivée "une copie à l'équilibre".

A l'issue de cette CMP, Élisabeth Borne compte sur un vote des Républicains à l'Assemblée pour éviter d'utiliser le 49.3 (adoption d'un texte sans vote). Mais l'évocation de cette hypothèse se faisait de plus en plus insistante jeudi.

"Je pense que, à l'Assemblée nationale, il n'y a pas de majorité pour voter cette réforme des retraites", a estimé jeudi matin la patronne du groupe Rassemblement national, Marine Le Pen, pour qui le 49.3 "serait une démonstration de faiblesse".

"Ça peut mettre le feu aux poudres", a de son côté jugé Philippe Martinez.

"Il y a un risque à voter mais c’est le risque démocratique. Le 49.3 représenterait un risque plus gros en termes d'images", estimait vendredi un cadre de la majorité.

Depuis 1995, les grandes mobilisations contre les réformes des retraites

1995: plus de trois semaines de transports paralysés

Durant l'intense mouvement de protestation de l'hiver 1995 contre "le plan Juppé", trains et métros sont paralysés pendant plus de trois semaines.

A leur apogée, les manifestations rassemblent le 12 décembre, entre un et deux millions de personnes, avec un soutien majoritaire de l'opinion, selon les sondages.

A l'origine de la colère, la présentation en novembre par le Premier ministre Alain Juppé d'un plan de redressement de la Sécurité sociale comportant des prélèvements supplémentaires sur les assurés et un bouleversement de ses structures.

Mais c’est l'alignement prévu des régimes de retraite des fonctionnaires et des agents de services publics sur les salariés du privé qui concentre les mécontentements.

Alain Juppé retire les mesures touchant les retraites, mais maintient le reste du plan. - 2003: un à deux millions de manifestants -

De février à juin 2003, une série de grèves mobilise la fonction publique. Des centaines de milliers de manifestants protestent, dont un à deux millions, au plus fort, le 13 mai.

Le gouvernement résiste et sa réforme est adoptée le 24 juillet: le Premier ministre Jean-

Pierre Raffarin et son ministre du Travail, François Fillon, alignent en partie le régime de retraite des fonctionnaires sur celui du privé, avec une durée de cotisation pour obtenir une retraite à taux plein portée progressivement à 40 ans (mais une pension toujours calculée sur les six derniers mois de salaire et non sur les 25 meilleures années comme dans le privé).

2007: trains et métros à l'arrêt

A l'automne 2007, les transports en commun sont perturbés par la contestation d’un projet sur les régimes spéciaux. Le 18 octobre, le trafic SNCF et RATP est paralysé.

Cette première réforme des retraites du quinquennat de Nicolas Sarkozy concerne les régimes spécifiques des agents des services publics (SNCF, RATP, EDF, GDF... ) et les professions à statut particulier (clercs et employés de notaires), dont la durée de cotisation va progressivement passer à 40 ans, selon un décret transmis le 21 décembre.

2010: manifestation massive, raffineries bloquées

En 2010, les manifestations rassemblent encore plus qu'en 1995 et 2003: entre 1,2 et 3,5 millions, au pic de la mobilisation, le 12 octobre. Elles s'accompagnent de blocages de raffineries, terminaux portuaires et dépôts de carburant. Une station-service sur trois est à sec au plus fort du mouvement.

Le projet de loi du gouvernement de François Fillon prévoit le report progressif de l'âge légal de la retraite de 60 à 62 ans. Malgré la forte mobilisation, la réforme est adoptée fin octobre.

2019-2020: grèves record

Le 5 décembre 2019, entre 806.000 et 1,5 million de personnes manifestent contre le projet d'un régime de retraite "universel" par points, promesse de campagne d'Emmanuel Macron. Le 17, entre 615.000 et 1,8 million défilent à nouveau.

Chez les enseignants, la grève atteint des taux record depuis 2003. A la SNCF et la RATP, elle se poursuit pendant les congés de fin d'année et une partie de janvier pour constituer la plus longue grève à la SNCF depuis sa création. La mobilisation touche aussi ports, raffineries, Banque de France, Opéra de Paris et avocats.

Après une adoption sans vote (article 49.3) début mars en première lecture à l'Assemblée, la réforme est suspendue, le 16, par Emmanuel Macron en raison de la pandémie de Covid-19.

2023: mobilisations massives

Front uni des syndicats contre le nouveau projet de réforme d'Emmanuel Macron prévoyant le report à 64 ans de l'âge légal de départ à la retraite.

Les deux premières journées de mobilisation réunissent, les 19 janvier et 31 janvier, à chaque fois plus d'un million de personnes, selon le ministère de l'Intérieur. Avec 1,27 million de manifestants, la journée du 31 constitue la plus forte mobilisation sociale depuis 1995.

Le 6 février, les débats démarrent à l'Assemblée sous la pression de la rue: des manifestations sont organisées les 7, 11 et 16.

Alors que le texte est désormais examiné par les sénateurs, l'intersyndicale promet de "mettre la France à l'arrêt" pour sa grande mobilisation du 7 mars.


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.