BEYROUTH: L'escalade de la confusion politique a fait chuter la livre libanaise à un nouveau record sur le marché noir, s’échangeant à 90 000 livres pour 1 dollar (1 dollar = 0,94 euro) mercredi.
Le dernier plongeon de la monnaie locale fait que le taux de change est plus de soixante fois inférieur au taux de base de 1 500 livres pour 1 dollar qui était en vigueur depuis trois ans.
Face au danger de chaos économique imminent, le ministère des Finances a fixé le prix du dollar douanier à 45 000 livres libanaises afin que le Trésor public puisse payer les salaires du secteur public.
Il y a quelques semaines seulement, le ministère avait fixé cette valeur à 15 000 livres.
Les magasins et les supermarchés ont également commencé à fixer le prix des produits en dollars mercredi.
Les économistes et les experts politiques ont prédit que la livre libanaise tomberait bientôt à 100 000 livres pour 1 dollar.
Dans le même temps, un homme a pris d'assaut une agence de la Creditbank à Sidon, au sud de Beyrouth, et il a menacé d'y mettre le feu si on lui refusait l'accès à ses économies. L'homme a fini par quitter la banque sans récupérer son argent après avoir reçu l'assurance qu'il ne ferait l'objet d'aucune accusation pénale.
L'économiste Jassem Ajaka déclare que «le trou dans lequel le pays s'est enfoncé est sans fin», et il ajoute: «Le pire est encore à venir et nous nous noyons dans le chaos le plus total en raison des erreurs accumulées.»
M. Ajaka explique que le ministère des Finances n'avait d'autre choix que d'augmenter le dollar douanier pour accroître les recettes du Trésor.
Des sources ont indiqué à Arab News que le ministère a estimé à 8 000 milliards de livres libanaises le coût de la couverture des augmentations et des allocations d'aide sociale qui ont été ajoutées aux salaires du secteur public.
«Le pays souffre d'un important déficit, et l'augmentation des recettes est l'une des exigences du Fonds monétaire international (FMI)», souligne Jassem Ajaka.
«Après avoir augmenté le dollar douanier et dollarisé l'économie, l'enjeu réside dans le contrôle des prix du marché en l'absence d'institutions étatiques efficaces. Un immense chaos nous attend.»
Les observateurs économiques estiment que si la classe politique reste inactive, l'effondrement financier, économique et bancaire est inévitable.
Alors que la monnaie locale plonge et que les prix des produits de base et des denrées alimentaires augmentent de minute en minute, le ministère des Finances a été vivement critiqué pour sa décision d'augmenter le dollar douanier, une mesure qui risque de réduire considérablement le pouvoir d'achat de la population.
Hani Bohsali, chef du syndicat des importateurs de produits alimentaires, déclare que cette décision était surprenante et qu'elle entraînerait une augmentation de 2 à 10% des prix des produits de base.
«Même si les huiles et les céréales sont exemptées de l'augmentation des droits de douane, leurs prix vont augmenter avec la chute de la monnaie locale.»
Le député de Tripoli Achraf Rifi a averti que la dépréciation de la monnaie locale pourrait entraîner une véritable catastrophe aux répercussions dévastatrices.
«Les Libanais sont devenus les victimes d'un massacre économique», s’indigne-t-il. «Le pouvoir en place et le Hezbollah doivent partir avant que nous puissions commencer à réformer ce que ce système a détruit.»
Le Conseil des évêques maronites s'est réuni mercredi et il a appelé le gouvernement intérimaire à s'acquitter de ses fonctions avec sagesse et à éviter toute action susceptible d’aggraver la situation.
Le Conseil a exprimé ses inquiétudes concernant la sécurité et il a demandé aux forces de l'ordre de renforcer les mesures.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com