PARIS : L'application de prières Muslim Pro, qui revendique 95 millions d'utilisateurs, est visée par une plainte à Paris de dizaines d'utilisateurs français, qui l'accusent d'avoir vendu des données personnelles à une société renseignant in fine l'armée américaine, a-t-on appris auprès de leurs avocats.
Ces utilisateurs, dont la plainte a été dévoilée par la radio RTL et doit être déposée mardi à Paris, réclament une enquête pour « atteinte aux droits de la personne résultant des fichiers ou des traitements informatiques », « abus de confiance », « mise en danger de la vie d’autrui » et « complicité d’assassinat ».
Cette action judiciaire fait suite à la publication le 16 novembre d'une enquête du média en ligne Vice, affirmant que des services de l’armée américaine achètent les données de géolocalisation d’utilisateurs d’applications privées à travers le monde.
Dans le cas de Muslim Pro, dont l'option de géolocalisation permet de déterminer l'heure de la prière, des données ont été vendues à « une société appelée X-Mode, qui obtient les données de localisation directement des applications, puis vend ces données à des sous-traitants et, par extension, à l'armée », explique Vice.
« Le commandement des opérations spéciales des États-Unis (USSOCOM) a acheté un accès aux données de Locate X pour aider aux opérations des forces spéciales à l'étranger », affirme Vice. Le média soulève la question d'un possible usage de ces données par les Etats-Unis pour mener des exécutions extrajudiciaires contre des suspects de « terrorisme » via des frappes de drone, précisant n'en avoir pas eu connaissance à ce jour.
Dans un communiqué le 17 novembre, Muslim Pro a annoncé sa décision « de mettre fin à (ses) relations avec tous les partenaires de données, y compris X-Mode », leur partenaire depuis quatre semaines.
L'entreprise, fondée par un Français et basée à Singapour, affirme avoir « lancé une enquête interne (...) pour confirmer que toutes les données des utilisateurs ont été traitées conformément à toutes les exigences existantes ».
Les avocats des plaignants, Xavier Nogueras, Vincent Brengarth et William Bourdon, sollicitent « une enquête sur des faits d’une gravité certaine qui, s’ils sont établis, apparaissent clairement être un cas d’école de l’instrumentalisation pouvant être faite de données personnelles des utilisateurs ».
« Des logiques économiques pulvérisent l'impératif de protection de la vie privée », dénoncent-ils.