Entre dromadaires et éleveurs saoudiens, un «langage» inscrit au patrimoine de l'humanité

Le berger saoudien Hamad al-Marri communique avec ses animaux lors du festival annuel du chameau du roi Abdulaziz dans le désert de Rumah, au nord-est de la capitale saoudienne Riyad, le 10 janvier 2023. (Photo Fayez Nureldine / AFP)
Le berger saoudien Hamad al-Marri communique avec ses animaux lors du festival annuel du chameau du roi Abdulaziz dans le désert de Rumah, au nord-est de la capitale saoudienne Riyad, le 10 janvier 2023. (Photo Fayez Nureldine / AFP)
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Publié le Jeudi 19 janvier 2023

Entre dromadaires et éleveurs saoudiens, un «langage» inscrit au patrimoine de l'humanité

  • Inscrite en décembre 2022 par l'Unesco sur la liste du patrimoine culturel immatériel, l'Alheda'a met en relief les liens particuliers entre ces animaux et les éleveurs de la région du Golfe
  • «Les dromadaires reconnaissent le son de la voix de leur propriétaire et lui répondent immédiatement», ajoute-t-il, soulignant qu'ils ne «répondent pas» à des voix inconnues

RUMAH: Dans les dunes dorées du désert saoudien, l'éleveur Hamad al-Marri émet des cris incompréhensibles pour tous, sauf pour ses dromadaires, qui réagissent instantanément et se rassemblent derrière lui en ordre de marche, perpétuant ainsi une tradition orale séculaire.

Accompagnée de chants et de gestes, cette forme d'expression appelée Alheda'a permet de diriger des troupeaux de camélidés à travers les larges étendues de sable de la péninsule arabique.

Inscrite en décembre 2022 par l'Unesco sur la liste du patrimoine culturel immatériel, l'Alheda'a met en relief les liens particuliers entre ces animaux et les éleveurs de la région du Golfe.

"Il y a un langage spécial entre le propriétaire et son dromadaire", explique ce fonctionnaire âgé de 36 ans, qui fait paître une centaine de bêtes à 150 km au nord-est de la capitale Riyad.

"Les dromadaires reconnaissent le son de la voix de leur propriétaire et lui répondent immédiatement", ajoute-t-il, soulignant qu'ils ne "répondent pas" à des voix inconnues.

Appelés les "navires du désert", les chameaux d'Arabie à une bosse ont longtemps été l'un des principaux mode de transport dans le royaume, soutenant une activité d'élevage lucrative.

"Il y a de nombreuses inscriptions rupestres montrant des dromadaires peints et racontant (leur) histoire, que ce soit dans la guerre ou pour le commerce", souligne Jasser al-Harbash, qui dirige la Commission saoudienne pour le patrimoine.

La demande d'inscription de l'Alheda'a sur la liste de l'Unesco, déposée par l'Arabie et deux pays voisins - Oman et les Emirats arabes unis - vise à "protéger" cette tradition du Golfe, et soutenir "son développement", explique le responsable saoudien.

Répertoire unique

Chaque éleveur, selon l'Unesco, utilise un répertoire unique de sons pour guider son troupeau, ou pour rassembler rapidement les bêtes en cas de danger imminent, comme une tempête de sable.

Les dromadaires sont entraînés "à différencier la droite de la gauche, à ouvrir la bouche quand on le leur demande et à s’agenouiller pour être montés", explique l'Unesco sur son site internet soulignant le "lien fort" crée avec l'animal.

La pratique se "transmet au sein des familles et des communautés, les enfants accompagnant les adultes lors de leurs déplacements quotidiens", ajoute la même source.

C'est en observant son père et ses grands-pères que l'homme d'affaires Mansour al-Qatula dit avoir appris l'art de parler aux animaux.

A son tour, il partage avec ses trois enfants un "héritage transmis de père en fils depuis des centaines d'années".

"Mes enfants adorent ça, ils demandent toujours à venir ici, et leurs voix aussi sont reconnues", raconte-t-il à l'AFP.

Concours de beauté et lifting

Avec une centaine de bêtes dans son cheptel, l'éleveur a participé au début du mois au prestigieux festival de chameaux du roi Salmane ben Abdelaziz Al-Saoud, un événement très suivi organisé chaque année dans le royaume.

Au menu, des courses et un célèbre concours de beauté reposant sur des critères exigeants.

Les animaux sont jugés sur leurs lèvres, leur cou, leur bosse ou leur couleur, avec à la clé des prix dont le montant total atteint 350 millions de riyals (86 millions d'euros).

Lors de la dernière édition, plusieurs participants avaient été disqualifiés pour avoir injecté du botox à leurs camélidés.

Pour Mansour al-Qatula, l'Alheda'a permet de tisser des liens uniques avec les animaux.

"Lorsque le propriétaire s'intéresse à son chameau, prend soin de lui et lui rend visite régulièrement, il le lui rend bien", explique-t-il en caressant l'une de ses bêtes.

Lorsqu'il commence à chanter pour lui, l'animal laisse échapper un blatèrement. "Regardez", dit-il en riant. "Il partage mes sentiments."


Le pianiste Igor Levit va donner un concert de plus de 16 heures à Londres

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
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  • Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance"
  • "Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée

LONDRES: Le pianiste Igor Levit va donner jeudi et vendredi à Londres un concert unique, prévu pour durer plus de 16 heures, en jouant en solo "Vexations" d'Erik Satie, sous la direction de l'artiste Marina Abramovic, connue pour ses performances radicales.

Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance".

"Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée. Elle se traduit ainsi par une performance durant entre 16 et 20 heures. Habituellement, plusieurs pianistes se succèdent pour jouer ce morceau sans interruption.

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19.

C'est la première fois qu'il va jouer ce morceau en intégralité en public.

Le public va être "témoin (d'un moment) de silence, d'endurance, d'immobilité et de contemplation, où le temps cesse d'exister", a commenté Marina Abramovic, artiste serbe de 78 ans. "Igor interprète +Vexations+ avec des répétitions infinies, mais une variation constante", a-t-elle ajouté.

Le rôle de Marina Abramovic, connue pour ses performances qui poussent les spectateurs dans leurs retranchements, est de "préparer le public à cette expérience unique".

Erik Satie avait lui écrit à propos du morceau à l'adresse des pianistes: "Pour jouer 840 fois de suite ce motif, il sera bon de se préparer au préalable, et dans le plus grand silence, par des immobilités sérieuses".

Dans une interview au quotidien britannique The Guardian, Igor Levit a encouragé son public à "se laisser aller". "C'est juste un espace vide, alors plongez dedans", a-t-il dit.

Les spectateurs pourront assister au concert soit pour une heure soit dans sa totalité. Il commencera jeudi à 10H00 (09H00 GMT).


Les Marionnettes enchantent Dubaï: une scène multilingue et inclusive pour les enfants

Les Marionnettes mise sur la créativité, l'inclusion et la découverte, loin des écrans. (Photo: fournie)
Les Marionnettes mise sur la créativité, l'inclusion et la découverte, loin des écrans. (Photo: fournie)
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  • Depuis son ouverture, Les Marionnettes propose des spectacles en anglais, français, arabe, et récemment en russe
  • «On veut que chaque enfant puisse s’identifier à ce qu’il voit sur scène, peu importe sa langue», explique Gabriella, la fondatrice

DUBAÏ: À Dubaï, dans un paysage dominé par les écrans et les technologies dernier cri, un petit théâtre de marionnettes attire l’attention des familles en quête d’activités culturelles pour leurs enfants. Fondé par Gabriella Skaff, Les Marionnettes propose une expérience ludique, éducative et multilingue qui séduit aussi bien les enfants que leurs parents.

Une idée née d’un besoin personnel

Gabriella Skaff, franco-libanaise et ancienne juriste en droit bancaire, a quitté les salles d’audience pour donner vie à un tout autre théâtre: celui des marionnettes.

«J’ai toujours rêvé de créer quelque chose qui me ressemble, mais je n’avais pas encore trouvé la bonne idée», confie-t-elle avec sincérité.

C’est lors de vacances en France que tout a commencé: «Nous emmenions souvent nos enfants voir des spectacles de marionnettes, et ils étaient fascinés. Mon fils n’avait même pas deux ans, mais il restait captivé du début à la fin. À Dubaï, rien de tel n’existait», raconte Gabriella.

De retour aux Émirats, elle décide alors de donner vie à ce manque. «Au départ, c’était une petite idée… Puis les choses se sont enchaînées: nous avons trouvé un local, pris contact avec des marionnettistes en France, et après plusieurs mois de préparation, le théâtre a ouvert ses portes en novembre 2024.»

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Les Marionnettes propose des spectacles interactifs pour enfants en plusieurs langues (français, anglais, arabe, russe…).

Une programmation multilingue et interactive

Depuis son ouverture, Les Marionnettes propose des spectacles en anglais, français, arabe, et récemment en russe. «On veut que chaque enfant puisse s’identifier à ce qu’il voit sur scène, peu importe sa langue», explique Gabriella.

Le théâtre offre deux formats principaux:

  • Les spectacles de marionnettes, qui durent environ une heure avec une pause au milieu.
  • Le storytelling, plus court (30 minutes), où un animateur lit un livre, parfois accompagné de marionnettes, suivi d’une activité créative comme du bricolage, du dessin ou la fabrication de masques.

«L’objectif, c’est de rendre la lecture vivante et de faire participer les enfants. On essaie aussi de varier les langues: italien, arabe, français, russe… bientôt l’espagnol.»

Une activité éducative qui séduit les écoles

Les écoles ont rapidement adhéré au concept. «Les retours sont extrêmement positifs, confie Gabriella. Les enseignants apprécient le fait que ce soit à la fois pédagogique et ludique. Les enfants participent activement, posent des questions, interagissent avec les marionnettes… et surtout, ils gagnent en confiance.»

La différence entre les visites scolaires et familiales est notable. «À l’école, les enfants sont plus calmes, attentifs, et respectent davantage les consignes. Lorsqu’ils viennent avec leurs parents, ils se montrent plus spontanés, plus libres… mais tout aussi enthousiastes. Ce sont deux énergies différentes, et chacune a son charme.»

Les enfants sont encouragés à s’exprimer pendant les spectacles. «Les marionnettes posent des questions, les enfants répondent. Même les plus timides finissent par participer.»

Un message fort autour de l’inclusion

Le 30 avril, Les Marionnettes lancera un spectacle inédit en partenariat avec Sanad Village, une organisation qui accompagne les enfants à besoins spécifiques. «C’est une histoire sur l’inclusion. Le but, c’est d’apprendre aux enfants à accepter les différences, à être gentils et ouverts aux autres», explique Gabriella.

Le spectacle sera présenté en anglais, en français et en arabe, et proposé aux écoles ainsi qu’au grand public.  C’est un sujet important. On veut que les enfants comprennent qu’il ne faut pas avoir peur de ce qui est différent.»

Une ambition régionale

L’objectif de Gabriella ne s’arrête pas à Dubaï. «On aimerait bien développer le concept dans d’autres pays de la région: Arabie saoudite, Bahreïn, Qatar, Liban. Il existe un véritable besoin pour ce type d’activité culturelle.»

Pour rendre le projet plus mobile, un théâtre itinérant est en préparation. «On pourra l’emmener dans les écoles, dans d’autres villes, et même l’utiliser pour des événements privés ou des anniversaires.»

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Gabriella Skaff - Fondatrice, Les Marionnettes. (photo: fournie)

Une programmation à découvrir en famille

Les spectacles ont lieu les week-ends – vendredi, samedi et dimanche – tandis que les séances de storytelling se déroulent en semaine. Une activité pour les tout-petits, appelée «Bright Minds», est aussi proposée le lundi matin.

«Le programme change chaque mois et on publie les détails chaque semaine sur notre site et nos réseaux sociaux. Les gens peuvent réserver en ligne ou acheter leurs billets sur place», précise Gabriella.

Prochaine étape: un club de lecture pour enfants, des ateliers théâtre et même des cours pour apprendre à créer ses propres marionnettes.


Les îles Farasan célèbrent l'arrivée annuelle du hareng

Le poisson haridé, ou poisson-perroquet, est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. (SPA)
Le poisson haridé, ou poisson-perroquet, est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. (SPA)
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  • Les côtes des îles Farasan sont chaque année le théâtre d'une arrivée massive de poissons harid qui voyagent pendant des mois de l'océan Indien à la mer Rouge, en passant par la mer d'Arabie.
  • Le harid, également appelé « poisson-perroquet », est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. 

RIYAD : Les côtes des îles Farasan sont chaque année le théâtre d'une arrivée massive de poissons harid qui voyagent pendant des mois de l'océan Indien à la mer Rouge, en passant par la mer d'Arabie.

Le harid, également appelé « poisson-perroquet », est une espèce diversifiée qui vit dans les récifs coralliens et joue un rôle clé dans l'écosystème marin. 

Reconnaissable à son bec de perroquet et à ses couleurs vives, le harid prospère dans les habitats riches en coraux, avec plus de 90 espèces, chacune ayant des formes et des couleurs uniques.

Farasan, un groupe d'îles coralliennes situées à 40 km de la côte de Jazan, devient le site de cet événement naturel lorsque de vastes bancs de poissons harid se rassemblent, selon l'agence de presse saoudienne. 

Les habitants peuvent prédire l'arrivée du poisson grâce à une odeur distincte qui se dégage de la mer après le coucher du soleil, le 15^e jour du mois lunaire.

La pêche annuelle au harid, célébrée à la fin du mois d'avril, est une tradition qui reflète l'héritage culturel des îles et qui fait la joie des habitants des îles Farasan depuis des siècles.

Reconnaissant l'importance culturelle et touristique de cette pêche, le prince Mohammed bin Nasser, gouverneur de Jazan, a inauguré le premier festival du harid des îles Farasan en 2005.

La 21^e édition du festival a été lancée lundi, mettant en avant les îles comme une destination prometteuse pour les touristes et les investisseurs. 

Le festival met en avant les coutumes, les traditions, les jeux folkloriques, l'artisanat et les sites historiques uniques de Farasan, tout en présentant l'artisanat local, comme les pièges à pêche, le tissage de palmiers, la création de sacs et de tapis, ainsi que le tricotage de chapeaux. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com