TUNIS: «Une feuille de route qui vise à aider la Tunisie à renforcer sa sécurité alimentaire et sa résilience face aux changements climatiques est en cours de finalisation»: c’est en ces termes qu’André Parant, ambassadeur de France à Tunis, qui a fait cette révélation à la mi-décembre 2022, levant ainsi un coin du voile sur un programme financé par l’Union européenne (UE) dont le coup d’envoi a été donné le 13 décembre dernier. D’après une source française, ce sont des experts français et italiens qui collaboreront avec les Tunisiens sur ce projet.
Sonnette d’alarme
Baptisée jadis «le grenier à blé de Rome», la Tunisie est depuis très longtemps déficitaire dans le domaine alimentaire. La guerre en Ukraine n’a fait qu’empirer la situation, à telle enseigne que l’Institut tunisien des études stratégiques (Ites), qui relève de la présidence de la république, a dû tirer la sonnette d’alarme sur l’aggravation de ce déficit dans une note intitulée «Renforcer la sécurité alimentaire de la Tunisie en 2022-2023» et publiée en septembre 2022.
Au mois d’avril 2022, l’Observatoire national de l’agriculture (Onagri) avait averti que la Tunisie pourrait, en raison de la détérioration des conditions climatiques, être contrainte d’importer 75% de ses besoins en céréales au cours des prochaines années, contre près de 50% actuellement.
Avant le lancement de ce programme, l’Europe a dû parer au plus pressé en accordant à la Tunisie des prêts pour financer ses achats de céréales. À la mi-novembre 2022, l’UE a annoncé une aide de 100 millions d’euros pour «aider les foyers tunisiens qui subissent les conséquences de l’agression russe contre l’Ukraine sur les prix de l’énergie et des denrées alimentaires», indique son ambassadeur, Marcos Cornaro.
L’UE a également fait bénéficier à la Tunisie – pour 20 millions d’euros – de l’initiative Farm (Food and Agriculture Resilience Mission), dotée de 225 millions d’euros et «qui vise à soutenir la sécurité alimentaire et la résilience dans les pays du voisinage sud de l’UE et à prévenir les effets désastreux, pour la sécurité alimentaire mondiale, de la guerre menée par la Russie en Ukraine».
Les deux banques européennes multilatérales contribuent également à cet effort avec deux prêts: le premier de 150 millions d’euros de la Banque européenne d’investissement (BEI) à l’Office des Céréales et le second de la Banque européenne de reconstruction et de développement (Berd), qui a apporté 150 millions d’euros à la Tunisie pour financer ses importations de blé, d’orge et de semences destinées aux petits exploitants agricoles pour la prochaine campagne céréalière.
Partenaires traditionnels et importants
Partenaires traditionnels et importants de la Tunisie, la Banque mondiale et la Banque africaine de développement (BAD) n’ont pas manqué à l’appel. La première, dans le cadre d’un programme d’intervention d’urgence coordonné avec les autres bailleurs de fonds, a débloqué 130 millions de dollars (1 dollar = 0,94 euro) pour «soutenir à court terme l’importation de blé pour assurer l’accessibilité au pain des populations pauvres, d’orge pour l’élevage, et d’intrants agricoles pour la production céréalière nationale». La BAD, quant à elle, finance à hauteur de 80 millions de dollars le Projet d’appui en urgence à la sécurité alimentaire en Tunisie (Pausat).
Toutefois, tout cela est seulement destiné à répondre à l’urgence. Pour atteindre la sécurité alimentaire, la Tunisie devra révolutionner son agriculture et, à cette fin, élaborer et exécuter le Plan national d’adaptation pour la sécurité alimentaire, dont la phase préparatoire a été menée avec l’aide de l’Agence française de développement et s’est achevée à la fin de l’année 2021.