PARIS: Il défile à son rythme dans les champs de lavande ou devant les dunes, son micro-sac est devenu une "icône de la maroquinerie" et son mariage l'événement people de l'année: homme du Sud, le Français Jacquemus a un parcours exceptionnel dans le milieu de la mode.
Simon Porte Jacquemus, 32 ans, cité parmi les designers les plus courtisés aujourd'hui alors que plusieurs maisons de luxe ont des postes de directeurs artistiques vacants, organise lundi au Bourget, près de Paris, un nouveau défilé en dehors des saisons de mode.
Son dernier show dans le cadre du calendrier officiel de la Fashion Week parisienne date de 2019, mais en septembre, l'ouverture de sa première boutique avenue Montaigne avait marqué l'un des temps forts de la semaine du prêt-à-porter féminin à Paris.
La maison vaut 200 millions d'euros, selon les chiffres communiqués par Jacquemus au média spécialisé Business of Fashion, soit presque dix fois plus qu'avant la pandémie du Covid-19. Son objectif est d'atteindre 500 millions d'euros d'ici à 2025.
"Jacquemus, c'est un phénomène. Sa récente collaboration avec Nike a été l'un des plus grands succès de l'année, de même que l'ouverture de sa boutique. Son rythme des collections est adapté à une relation directe avec ses consommateurs", relève Serge Carreira, spécialiste du luxe et maître de conférences à Sciences Po Paris, interrogé par l'AFP.
Originaire de la Provence, il arrive dans la capitale en 2009 et commence à défiler pour la Paris Fashion Week dès 2012.
«Extrêmement positif»
Il raconte avoir fait ses premières collections "avec rien" sauf "une énergie très brutale". Des filles en smoking défilaient alors avec des tongs, "c'était français et naïf".
"Il a amené le sourire dans la mode, ce qui n'est jamais très bien vu", note Loïc Prigent, documentariste spécialisé dans la mode, décrivant une attitude qui tranche avec les codes du milieu.
"Avec des concepts innovants, il mélange humour et créativité dans un message extrêmement positif", soutient Serge Carreira.
Le styliste reste fidèle à ses racines et à l'esthétique du Sud, "traditionnellement" considérée comme "vulgaire" mais qu'il a réussi à anoblir.
"C'est un créateur people, on sait toujours ce qu'il fait, il passe son temps à documenter sa vie quotidienne", souligne Benjamin Simmenauer, professeur à l'Institut français de la mode.
"Les marques sont tentées de recruter des gens comme ça, cela créée un lien avec le public", ajoute-t-il.
Micro sac, méga succès
Refusant de se livrer à la "mode-fiction", Serge Carreira ne trouve pourtant "pas anormal" que Jacquemus soit cité comme un éventuel successeur d'Alessandro Michele chez Gucci. "Il en a la capacité, mais est-ce qu'il en a envie?"
Jusqu'à présent, le styliste a décliné toutes les propositions de ce type en arguant qu'il avait "déjà une grande maison: Jacquemus".
"Je rêve d’arriver un jour au niveau de création de Jacquemus et d’organiser de tels shows", a déclaré cet été au journal Le Monde Victoria Beckham, après avoir assisté à son défilé en Camargue et juste avant d'intégrer elle aussi la Paris Fashion Week.
"Jacquemus! Voilà enfin un truc français!", disait de lui le célèbre créateur de chaussures espagnol Manolo Blahnik interviewé par le journal Le Figaro en 2019 ajoutant qu'il "aurait adoré" être à son défilé dans les champs de lavande.
Quand au sac, le nerf de la guerre de toutes les marques puisqu'il leur fait gagner de l'argent, son modèle Chiquito "connaît un succès incontesté et qui est au niveau de toutes les icônes de la maroquinerie aujourd'hui. C'est un tour de force assez exceptionnel", souligne Serge Carreira.
Rihanna et Kim Kardashian se sont affichées avec cet accessoire microscopique qui se porte sur un doigt, et aujourd'hui on croise aussi des filles, avec des formats plus grands, dans les trains de banlieue.