Les Ottomans ont perpétré de graves crimes contre les musulmans arabes, se délectant de les voir domptés, opprimés et tués. En règle générale, les Turcs adoptent une politique mensongère, se lamentant sur l'Islam et le Sultanat, alors qu’ils font en réalité le deuil de leur gloire et de leur pouvoir passés. Ils prétendent les défendre au nom de l’Islam et de sa protection, mais en fait font de la propagande auprès des Musulmans de toutes nationalités. Ils cherchent à restaurer le pouvoir, l’autorité et la force qu’ils ont perdus au moyen d’une machine de propagande qu’ils contrôlent dans les moindres détails. Leur imposture est claire comme de l’eau de roche.
Zekeriya Kurşun a mentionné l'établissement de l'État-nation comme étant une référence absolue pour analyser l'Histoire, le présentant comme inévitable. Par la suite, il a avancé que l'Arabie saoudite allait complètement à l’encontre de cette tendance et qu'au lieu de chercher à révéler le sens réel de l'Histoire, elle s’acharnait à la dénigrer, expliquant que cela était dû à sa culture bédouine et que son reniement de l’Histoire était lié au wahhabisme.
Supposons que Kurşun ait logiquement décrit la création des États-nations comme fondamentale pour analyser l'histoire des pays, comme il le prétend, l’Arabie saoudite porte un regard global et plus profond sur la question. En effet l’histoire de l’Arabie saoudite s’inscrit dans le cadre général de l’histoire de l’Islam depuis la mission du Prophète, que Dieu lui accorde Sa Grâce et Sa paix, à La Mecque et de son extension au-delà de la péninsule arabique.
Cependant, une telle réalité serait difficile à accepter pour Kurşun : lorsqu'un pays cherche à analyser sa propre histoire à travers le seul prisme du nationalisme – ce qui se passe actuellement en Turquie – ceci devient une fabrication illusoire et une falsification de l’Histoire. L’histoire de l’Arabie saoudite s’inscrit sur le long terme, celle des Turcs est bien plus récente et ne représente qu’une branche de l’Histoire.
Si l’on examine de plus près le concept de wahhabisme – selon l'expression de Kurşun – qui selon lui se fonde sur un déni de l'époque antérieure à Mohammed bin Abdelwahhab et sur le rejet de la période antérieure au XVIIIe siècle et qui, toujours selon Kurşun, invente une nouvelle ère qui ignore le passé, alors il devient clair qu’il n’a simplement rien compris à la vision saoudienne de l’Histoire, car aucune de nos sources saoudiennes n’a rejeté l’histoire antérieure.
Nous pourrions ici mentionner ce que le savant algérien Muhammad Al-Hajwi a écrit sur le wahhabisme vu par les Ottomans. Al-Hajwi évoque l'appel du cheikh Mohammed bin Abdelwahhab et des propos mensongers conceptualisés et popularisés par les Ottomans: « La question est politique, et non religieuse, et il existe un consensus des religieux sur la question. Les Ottomans sont ceux qui ont propagé des mensonges contre Ibn Saoud Ier, car ce dernier leur a ravi les deux Saintes mosquées il y a deux cent ans. Ce sont eux qui ont appelé à l'aide l'émir d'Égypte Mohamed Ali Pacha Le Grand, ce qui leur a permis d’expulser le wahhabisme des deux Saintes mosquées et de capturer Ibn Saoud. Oui, ce sont bien les Turcs qui ont donné aux hanbalites du Nejd le surnom de ”wahhabites” et ce sont eux qui ont répandu accusations et mensonges à travers le monde islamique à leur encontre. Ils ont écrit un livre contre le wahhabisme et l'ont attribué au cheikh Suleiman bin Abdelwahhab, frère de l’Imam Mohammed bin Abdelwahhab. Ils ont fait prisonnier Ibn Saoud à Astana, mais ont trahi leurs promesses en le tuant. Je crois que les Ottomans ont joué un rôle dans cette cabale contre Ibn Saoud, car ils n’ont pas du tout apprécié qu'Ibn Saoud s'empare du Hedjaz et qu’il y répande la sécurité, la justice et la miséricorde et qu’il règne sur ce que Dieu a révélé. Pendant le règne des Ottomans, le Hedjaz était dans une situation chaotique. A l’arrivée du wahhabisme, ils sécurisèrent les routes et firent régner la paix et la justice. » (Mohamed Al-Hajwi, les Wahhabites sont des Sunnites Hanbalites, journal Al-Sarat, première année, cinquième numéro, 26 Joumada Al-Thani 1352 AH, 16 octobre 1933).
Dans ses arguments, nous constatons que Kurşun utilise les concepts soufis qu’il a appliqué à l'histoire saoudienne, sans être conscient de la différence entre les questions historiques et doctrinales. Les livres d'histoire saoudiens ont abordé l'histoire de l’Islam, et les livres de doctrine ont critiqué les manifestations polythéistes mystiques auxquelles les Ottomans ont directement participé. La définition du wahhabisme par Kurşun n’est pas reconnue en Arabie saoudite, et sa proposition idéologique dans le contexte historique défend des croyances soufies.
Cependant, Kurşun lui-même a précédemment parlé dans l'un de ses livres de l'appel du cheikh Mohammed bin Abdelwahhab, en contradiction avec ce qu'il a mis en avant dans son article. Ce qui démontre la dimension politique – et non scientifique – de sa position, dans un contexte exacerbé d’animosité des Turcs envers l’Arabie saoudite.
Kurşun disait précédemment dans son livre qu’il « existe une conformité entre les idées de Mohammed bin Abdelwahhab qui vise à ramener la religion à son origine et à sa forme premières, et les idées des Bédouins et leur nature qui l'ont acceptée ». Il avance ensuite qu’il est « donc dommage que ce mouvement ou ce que prétend être le salafisme soit décrit comme une invitation à un retour aux origines et non une nouvelle doctrine ou croyance. » (Zekeriya Kurşun, les Ottomans et la famille Al Saoud dans les archives ottomanes. Beyrouth: l’Encyclopédie Arabe, 2005, 104).
Dans son article, il prétend que les Saoudiens ont seulement découvert après 1960 qu'ils pouvaient utiliser l'histoire. L'Arabie saoudite n'aurait ainsi été témoin d’un mouvement de recherche de l'histoire que dans le dernier quart du siècle dernier. Il contredit ici toutes les analyses historiques, dans la mesure où les sources saoudiennes sont les meilleurs témoins de l’histoire depuis ses premières lueurs. Des écrits officiels ou de la jurisprudence peuvent en attester. L’histoire en Arabie saoudite est passée par différentes étapes de développement, comme toute autre histoire. Toute personne comprenant la sémiologie ne peut passer outre ces stipulations, et considérer que la région du Nejd était instable. Ce sont des abus qui ne sont pas basés sur des interprétations logiques.
Le Roi Salman, référence de l'histoire nationale
Kurşun parle ensuite des recherches effectuées par l'Université Umm Al-Qura en 1980 et le Centre de recherche de Médine qui ont prétendument perturbé les autorités en Arabie saoudite pour s’être penchés sur l'ère ottomane. Cela ne se base tout simplement sur aucun fait et ce sont des affirmations illogiques. Les études se poursuivent, de même, leur circulation et les forums attenants n’ont pas été interrompus à l'Université Umm Al-Qura ni au Centre de Médine. Il en va de même dans d'autres institutions gouvernementales, y compris la Maison du roi Abdulaziz.
Kurşun a parlé du Gardien des deux Saintes mosquées, le roi Salman bin Abdulaziz, que Dieu le préserve, soutenant qu’il est un bon lecteur de l’histoire. Cela n’a rien de nouveau, puisqu'il a une approche, une pensée et une orientation nationales justes et équilibrées, et est considéré comme une référence en matière d’histoire en raison de ses opinions, ses orientations et ses perspectives historiques.
Kurşun voulait faire référence au roi Salman pour avoir découvert la possibilité d'utiliser l'Histoire en détournant l'attention du Hedjaz pour l’orienter vers Riyad. Cette proposition qu'il a faite n'est qu'une hypothèse qu'il envisage en fonction de ses opinions politiques; alors que la réalité diffère tout a fait, et il est connu que les centres et institutions qui étudient, produisent et documentent l'Histoire; ont publié plus d’écrits sur le Hedjaz que sur Riyad et Nejd. Ce sont les ennemis du pays qui parlent de discrimination entre les régions saoudiennes car elles ne forment qu’une seule unité, et il est impossible de séparer les différentes parties du pays. Ces allégations sont bien loin de la réalité saoudienne et les manifestations d'unité nationale sont devenues gênantes pour les ennemis du pays.
Notons que Kurşun lui-même était un jour un apostat alpiniste qui aspirait à la protection saoudienne. Cependant ses semblables et lui-même ne sont pas de taille à aborder une telle ascension, vu l’extorsion historique à laquelle ils se livrent en manipulant des expressions et en construisant des illusions, car la patrie et son Histoire sont plus grandes et plus profondes que le chantage, l'illusion et la fraude.
Monuments saoudiens et monuments turcs
Le Nejd demeure un complexe aux yeux de l’histoire ottomane. Il semble d’ailleurs que Kurşun met l'accent sur la description de l’empreinte nejdienne, en référence à l'expansion saoudienne des deux Saintes mosquées, expliquant qu’elle visait à effacer les monuments ottomans. Passé maître en matière de contradiction et de manipulation, il affirme que les agrandissements des Saintes mosquées étaient une nécessité pour les services de pèlerinage, mais prétend que les Saoudiens ont cherché à anéantir les monuments ottomans, et que nous ne saurions pas comment concilier les agrandissements et la préservation historique des monuments voisins ??
Mais quels sont ces fameux monuments ottomans à préserver ? Et qui donc sont les Ottomans, pour que l'expansion des deux Saintes mosquées soit arrêtée en vue de préserver leurs monuments ? Leurs reliques sont-elles considérées comme essentielles au service des pèlerins ? Et sont-ils vraiment considérés comme un élément essentiel de la Terre qui doit être préservé ?
L'Empire ottoman dans le Hedjaz n'était qu'un nom et quelques pierres, rien de plus, et associés à de nombreux crimes légués à l’Histoire, pourquoi donc préserver ces monuments ?
Si nous devons parler de monuments et d’antiquités, revenons donc à l’essentiel et réclamons notre droit aux antiquités pillées par les Turcs dans les deux Saintes mosquées, antiquités qui demeurent dans leurs musées. Telle est la différence entre ceux qui cherchent la renaissance pour servir l'Islam et le monde musulman, et ceux qui tentent de s’approprier l'Histoire en leur imposant une logique qui n'a aucune valeur, et oubliant en même temps qu'ils ont volé un trésor national qu'ils doivent restituer. Si les antiquités sont un sujet si sensible pour les Turcs, alors qu’ils soient prudents. Si la Turquie ouvre ce dossier, la donne risque de changer, et tout ce qui concerne les deux Saintes mosquées et la péninsule arabique sera officiellement dénoncé devant la communauté internationale.
Enfin, je pense que tout ça n’est qu’une question de temps, puisque, documents et preuves à l’appui, ce qui appartient à la patrie lui sera restitué dans un proche avenir avec la volonté de Dieu Tout-Puissant.
Talal Al-Torifi est professeur d'université et journaliste saoudien.
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com