GENEVE: Un projet d'accord mondial sur la gestion des pandémies est en discussion cette semaine à Genève, dans l'espoir d'éviter les erreurs ayant marqué la lutte contre la Covid-19.
A l'approche du troisième anniversaire de l'apparition du virus, un organe intergouvernemental de négociation de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) examine un "projet préliminaire conceptuel" d'accord, qui devrait être juridiquement contraignant.
"Les leçons de la pandémie ne doivent pas être ignorées", a déclaré lundi le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, à l'ouverture des discussions, qui doivent s'achever mercredi.
Depuis 2022, l'organe intergouvernemental de négociation travaille à l'élaboration d'un texte sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies.
Ce processus avait été lancé en décembre 2021 à l'unanimité des 194 Etats membres de l'OMS, effarés par les ravages humains et économiques causés par la pandémie.
Une fois la phase d'élaboration sur projet d'accord achevée, les négociations pourront commencer. L'organe intergouvernemental présentera un rapport sur l'état d'avancement des travaux en mai 2023, en vue de l'adoption d'un texte un an plus tard.
Le projet préliminaire sur la table est "un véritable reflet des aspirations" visant à "renforcer la prévention, la préparation, la réponse en cas de pandémie", a affirmé M. Tedros.
«Ne gâchez pas cette occasion»
"Il y a beaucoup de choses qui doivent changer avant que nous ne le validions. C'est la même chose pour beaucoup d'Etats membres - probablement la plupart", a déclaré aux journalistes la négociatrice en chef américaine, Pamela Hamamoto, en référence au document.
Mme Hamamoto a déclaré que Washington souhaitait que le principe de la transparence soit inscrit dans l'accord, de même que celui d'une meilleure surveillance des agents pathogènes et autres éléments pouvant déclencher une pandémie.
Elle a souligné aussi l'importance d'avoir une réaction rapide en cas d'épidémie et d'une mise en commun rapide et complète des informations.
"Une opinion assez largement partagée est que nous devons nous assurer que le processus est bien mis en place afin de ne pas gâcher l'occasion de mettre en place un accord significatif et applicable", a déclaré la responsable américaine.
Pour le Panel pour une convention mondiale sur la santé publique, une coalition d'anciens dirigeants d'Etat de haut niveau, le projet sur la table - même s'il comporte des éléments positifs - ne va pas assez loin.
A ses yeux, l'accord devrait établir plus clairement les responsabilités et délais d'action en cas d'alerte sanitaire.
«A la croisée des chemins»
L'ONG Médecins sans frontières a elle demandé que les négociations prennent en compte l'importance des essais cliniques dans toute réponse à une pandémie.
Mohga Kamal-Yanni, de la coalition d'ONG People's Vaccine Alliance, a pour sa part estimé que le projet montrait que les discussions étaient "à la croisée des chemins".
"Un traité pourrait en finir avec la cupidité et les inégalités qui ont plombé la réponse mondiale à la Covid-19, au VIH/Sida et à d'autres pandémies" ou pas, a-t-elle affirmé.
Elle a aussi appelé les gouvernements "à résister à toute tentative de transformer un traité sur la pandémie en une nouvelle opportunité de profits obscènes pour les entreprises pharmaceutiques".
Trois ans après son apparition, le virus de la Covid-19 sévit toujours, comme en témoignent les récentes manifestations historiques contre la stricte politique "zéro Covid" en vigueur en Chine.
Quelque 6,6 millions de décès ont été signalés à l'OMS à travers le monde, tandis qu'environ 640 millions de cas confirmés ont été enregistrés. Mais l'OMS estime que ces chiffres sont largement sous-estimés.
Selon le directeur exécutif du Fonds mondial, Peter Sands, "l'existence d'un beau traité... n'aura qu'un impact partiel sur l'efficacité de notre réponse".
Il a déclaré que le monde était sans aucun doute déjà mieux préparé à la prochaine pandémie, mais a prévenu : "Cela ne signifie pas que nous sommes bien préparés. Cela signifie simplement que nous ne sommes pas aussi mal préparés que nous l'étions auparavant".