TRIPOLI: Le chef de la diplomatie grecque Nikos Dendias a refusé de quitter l'avion à son arrivée jeudi à l'aéroport de Tripoli pour une visite prévue, afin d'éviter d'être accueilli par son homologue au sein du gouvernement libyen dont Athènes conteste la légitimité.
Comme le veut le protocole, la ministre libyenne Najla al-Mangouch était au pied de l'avion pour accueillir le ministre grec, a indiqué le ministère libyen des Affaires étrangères dans un communiqué.
Mais M. Dendias a "refusé de descendre de l’avion avant de repartir sans aucune clarification", a ajouté le ministère en condamnant ce geste et en promettant de riposter "avec les mesures diplomatiques appropriées".
Ces mesures n'ont pas tardé. Le porte-parole du gouvernement à Tripoli, Mohamad Hamouda, a annoncé à la chaîne locale al-Ahrar "le rappel de l'ambassadeur libyen à Athènes" et la "convocation de la chargée d'affaires grecque à Tripoli".
A Athènes, le ministère des Affaires étrangères a imputé cet incident diplomatique au gouvernement de Tripoli, l'accusant dans un communiqué de s'être "dérobé à un accord" prévoyant qu'aucune rencontre n'aurait lieu entre M. Dendias et son homologue libyenne.
Selon Athènes, M. Dendias devait rencontrer à Tripoli le président du Conseil présidentiel Mohamed al-Menfi uniquement, faisant l'impasse sur le gouvernement, avant de se rendre à Benghazi, siège des autorités rivales dans l'est du pays.
Malgré le couac diplomatique, M. Dendias a maintenu l'étape de Benghazi.
"A l'aéroport de Benghazi, où le programme de la visite se déroulera normalement", a tweeté M. Dendias à son arrivée, publiant une photo de son accueil par des militaires libyens.
Athènes est en froid avec le gouvernement de Tripoli depuis que ce dernier a signé deux mémorandum d'entente en 2019 avec la Turquie, l'un portant sur une coopération militaire et l'autre, le plus controversé, sur la délimitation maritime grâce auquel Ankara fait valoir des droits sur de vastes zones en Méditerranée orientale.
Début octobre, Tripoli et Ankara ont signé un accord de prospection d'hydrocarbures dans les eaux libyennes, dénoncé par la Grèce et l'Egypte.
"Cet accord menace la stabilité et la sécurité en Méditerranée", avait alors estimé M. Dendias, en déplacement au Caire, contestant la légitimité du gouvernement de Tripoli.
Depuis mars, deux gouvernements se disputent le pouvoir en Libye, qui a sombré dans le chaos après le soulèvement qui a entraîné la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011.
Celui de Tripoli a été mis en place dans le cadre d'un processus de paix parrainé par l'ONU, tandis que le gouvernement rival est soutenu par le camp de l'Est du maréchal Khalifa Haftar.
A Benghazi, M. Dendias a remis aux responsables locaux "des dons de vaccins anti-Covid" et un chèque d'un peu plus de 550.000 euros en guise de contribution à la reconstruction du port de Benghazi, projet piloté par le Programme alimentaire mondial.
Après un entretien avec le maréchal Haftar et ses conseillers où "l'accent a été mis sur la nécessité de stabiliser la Libye et de promouvoir paix dans la région", M. Dendias a rencontré des parlementaires qu'il a remerciés "pour leur position claire condamnant le mémorandum turco-libyen de 2019 et celui signé en octobre 2022".