Le torchon brûle entre Paris et Téhéran

Depuis le déclenchement de la vague de contestation, les autorités iraniennes n’ont cessé d’accuser les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, Israël et l’Arabie saoudite de fomenter les troubles. (AFP).
Depuis le déclenchement de la vague de contestation, les autorités iraniennes n’ont cessé d’accuser les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, Israël et l’Arabie saoudite de fomenter les troubles. (AFP).
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Publié le Jeudi 17 novembre 2022

Le torchon brûle entre Paris et Téhéran

  • Une série de nouveaux facteurs internes et externes en Iran mettent pratiquement un terme à la phase de la «position médiatrice» de la France à l’égard de Téhéran
  • Dans le contexte actuel particulièrement tendu, la relation franco-iranienne risque de demeurer précaire et pleine d’incertitudes jusqu’à nouvel ordre

PARIS: Les relations franco-iraniennes ont souvent été mouvementées malgré certaines embellies. Mais les derniers développements – l’impasse des négociations nucléaires, l’arrestation abusive de ressortissants français par l’Iran, la livraison de drones à la Russie et la répression massive de manifestations – mettent pratiquement un terme à la phase de la «position médiatrice» de la France à l’égard de Téhéran, conduite par Emmanuel Macron depuis son arrivée à l’Élysée.

Causes et conséquences d’une vive tension

Deux mois après le déclenchement d’une grande vague de manifestations en Iran, après la mort suspecte de la jeune Mahsa Amini, les relations entre la France et l’Iran ne cessent de se dégrader. Les deux principales raisons sont sans doute la répression massive en cours et l’arrestation de sept ressortissants français à Téhéran, pris en «otage», selon Catherine Colonna, la ministre française des Affaires étrangères.

Avant le déclenchement de la contestation, quatre ressortissants français étaient officiellement détenus en Iran.

Avant le déclenchement de la contestation, quatre ressortissants français étaient officiellement détenus en Iran: la chercheuse franco-iranienne Fariba Abdelkah, arrêtée en juin 2019, puis condamnée à cinq ans de prison pour atteinte à la sécurité nationale; Benjamin Brière, arrêté en mai 2020 et condamné à huit ans et huit mois d’emprisonnement pour espionnage; Cécile Kohler et Jacques Paris, deux syndicalistes arrêtés en mai 2022.

En outre, Téhéran détient depuis le début du mois d’octobre trois ressortissants français de plus dans le cadre d’une campagne visant d’autres étrangers présents en Iran, en raison de leur prétendue «implication» dans l’incitation aux manifestations. La tension entre les deux pays a atteint son comble lorsque Paris a confirmé le 12 novembre l’arrestation de deux nouveaux ressortissants français. Catherine Colonna a dénoncé sans ambages le «chantage» exercé par la République islamique.

Paris a beaucoup tardé avant de réagir à la répression en subissant les critiques des opposants iraniens.

L’annonce par Paris d’un nouveau geste hostile de Téhéran intervient le lendemain de l’accueil par le président français de quatre militantes iraniennes. À cette occasion, Emmanuel Macron a voulu adresser un message «d'admiration, de respect et de soutien» aux femmes iraniennes et à leur combat pour défendre les valeurs universelles. Parmi les moments forts de cette rencontre, un échange entre Emmanuel Macron et Masih Alinejad. La militante iranienne basée à New York a déclaré au président: «la France avait envoyé Khomeini en Iran. Il est maintenant temps de le reprendre.»

Cette évolution de la position française a été le résultat des actions de Téhéran. En effet, Paris a beaucoup tardé avant de réagir à la répression en subissant les critiques des opposants iraniens, lui reprochant de ne pas soutenir les aspirations démocratiques des manifestants.

Chronologiquement, après une période d'attentisme, symbolisée par la poignée de main entre Emmanuel Macron et le président iranien ultraconservateur, Ebrahim Raïssi, le 20 septembre dernier à New York, en pleine répression des premières manifestations, les autorités françaises ont fini par prendre la mesure de la révolte populaire sans précédent qui secoue la République islamique. Il a fallu attendre le 12 octobre pour que Macron déclare qu’il soutenait «un peuple souverain qui se bat pour sa liberté».

Face aux virulentes réactions iraniennes contre les sanctions européennes et à la rencontre de Macron avec les opposantes iraniennes, le président français n’a pas reculé. Il est allé encore plus loin le 14 novembre, saluant une «révolution inédite» conduite par «les petits- enfants de la révolution islamique» de 1979.

Pour ,une source française familière de la question iranienne, «Téhéran risque de plus en plus un durcissement occidental car l’Iran s'est engouffré dans le labyrinthe de la répression des manifestations populaires et s'est engagé dans un partenariat militaire avec la Russie dans la guerre en Ukraine».

Les effets de la livraison de drones iraniens à la Russie

Parmi les surprises de la guerre en Ukraine, la découverte de la participation «efficace» de drones made in Iran à l’effort de guerre russe. La livraison des engins militaires par Téhéran a démontré l’échec de la grande puissance russe et a donné une indication concrète du degré d’implication iranienne dans cette guerre et du partenariat stratégique noué avec Moscou.

Bien que Téhéran ait tenté de minimiser l’étendue de son implication en prétendant que la vente des drones avait été effectuée avant la guerre, les images prises par satellite ont prouvé que leur livraison avait eu lieu en plein conflit en août dernier. Cet alignement iranien contre un pays soutenu par l’Occident et en faveur d’un pays entravant le droit international, a provoqué une série de réactions et de sanctions occidentales.

Toutefois, une réponse diplomatique forte ne semble pas à l’ordre du jour, comme le révèle la position de l’administration Biden. Celle-ci n'a pas annoncé que l'accord sur le nucléaire iranien était complètement mort malgré la tension entre l’Iran et l’Occident. Un récent entretien de Robert Malley, l’envoyé spécial américain pour l’Iran, accordé aux médias français après les élections de mi-mandat aux États-Unis, indique une position américaine mitigée par rapport à l’Iran et laisse la porte entrouverte à une possible reprise des négociations nucléaires.

Les craintes françaises d’une crispation de l’Iran officiel se multiplient.

Cependant, Emmanuel Macron se montre plus ferme et plus clair. Il reconnaît que les événements en cours en Iran «changent beaucoup de choses», sans toutefois se résoudre à admettre que cet accord serait mort (les négociations sont au point mort depuis le début de l'année). Le président français propose comme alternative la construction d’un «nouveau cadre» de discussions englobant le dossier des missiles balistiques et des ingérences régionales de Téhéran.

Liberté et de dignité humaine

Depuis le déclenchement de la vague de contestation, les autorités iraniennes n’ont cessé d’accuser les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, Israël et l’Arabie saoudite de fomenter les troubles. De plus, ces derniers mois, le Kurdistan irakien a été attaqué à plusieurs reprises, accentuant la fuite en avant du régime.

Pour les connaisseurs des arcanes de l’Iran, ce soulèvement est sans précédent, il n’est pas lié au féminisme, malgré le rôle initial joué par les femmes. Il n’est pas non plus restreint aux revendications économiques ou à d'autres demandes matérielles. Ce soulèvement est une question de liberté et de dignité humaine, et vise le socle idéologique du régime. Mais il est notoire que le soutien extérieur n’est pas décisif et qu’il appartient aux Iraniennes et aux Iraniens de décider du sort de leur pays.

Les craintes françaises d’une crispation de l’Iran officiel se multiplient. Macron n’hésite plus à souligner, à juste titre, que les menaces iraniennes dépassent le cadre régional. «Nous devons changer la façon dont nous affrontons les menaces de l'Iran dans le monde», a-t-il déclaré. Dans ce contexte, la relation franco-iranienne risque de demeurer précaire et pleine d’incertitudes jusqu’à nouvel ordre.


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.