COBLENCE: La justice allemande a ouvert mercredi le procès d'un sympathisant d'extrême droite soupçonné d'avoir provoqué un incendie dans un foyer de réfugiés ayant entraîné la mort d'un demandeur d'asile ghanéen, plus de 30 ans après les faits.
L'Allemand de 51 ans, identifié comme Peter S. par le tribunal de Coblence (Ouest de l'Allemagne), doit répondre d'accusations de "meurtre, tentative de meurtres dans 20 cas et d'incendie criminel ayant entraîné la mort" de Samuel Yeboah, 27 ans.
Tôt dans la matinée du 19 septembre 1991, le suspect s'est rendu au foyer situé à Sarrelouis, ville de 35 000 habitants proche de la frontière avec la France, dans l'intention d'allumer un incendie motivé par ses "convictions racistes", selon le parquet.
"Il a accepté que des résidents puissent être tués ou blessés", a dénoncé la procureure générale Sophie Gössl à la lecture de l'acte d'accusation, soulignant "son profond mépris et énorme hostilité" à l'égard des réfugiés.
L'homme aurait versé de l'essence dans la cage d'escalier puis mis le feu dans le foyer où résidaient 21 demandeurs d'asile.
L'incendie s'est rapidement propagé et le Ghanéen, qui se trouvait dans le couloir du dernier étage de l'immeuble, s'est retrouvé pris au piège. Gravement brûlé et intoxiqué par la fumée, il est décédé le jour même.
Dix-huit personnes avaient réussi à se mettre à l'abri, deux autres avaient subi des fractures en sautant par la fenêtre.
Peter S. réfute l'accusation. Selon son avocat Guido Britz, qui demande un non-lieu, il reconnaît par ailleurs avoir été skinhead mais s'est distancé de cette idéologie depuis 2007.
Le procès pourrait durer jusqu'à juin.
L'affaire est restée irrésolue pendant des décennies.
Peter S. avait certes été soupçonné à l'époque, mais les investigations avaient été abandonnées faute de preuves suffisantes.
Les enquêteurs lui attribuaient un "rôle de leader" au sein des mouvances de droite radicale, selon les médias allemands.
Il aurait notamment participé, en 1996, à une manifestation d'extrême droite à laquelle étaient présents des futurs membres du groupuscule néonazi NSU, responsable d'une dizaine d'assassinats dans les années 2000, principalement d'étrangers.
L'enquête a été relancée il y a deux ans suite à de nouveaux indices. L'accusé avait été arrêté le 4 avril.
Au début des années 1990, peu après la chute du Mur de Berlin, plusieurs attaques contre des foyers de demandeurs d'asile ont secoué l'Allemagne, notamment dans l'ancienne RDA, comme à Hoyerswerda en Saxe.