PARIS: En déplacement à Toulon, le 9 novembre, le président Emmanuel Macron a dévoilé les grandes lignes stratégiques de défense de la France pour l'horizon 2030. À ce moment de la détérioration de l’ordre international, le président français n’a pas surpris en officialisant la fin de l'opération Barkhane, trois mois après le départ des derniers soldats français au Mali.
Certes, depuis février dernier, le compte à rebours a démarré pour redéfinir la présence française au Sahel et en Afrique de l'Ouest, mais, cette fois, un rendez-vous est pris d’ici à six mois pour élaborer une nouvelle stratégie de la France en Afrique, après consultations avec les partenaires de Paris sur le continent.
La définition d’une nouvelle stratégie n’ouvre pas nécessairement la voie à une adaptation du rôle français et de son renforcement sur le continent africain, sans l’établissement d’une politique multidimensionnelle avec un effort particulier pour gagner la bataille de l’opinion publique – celle de l’image et de la communication.
Fin d’une époque pour la politique africaine de la France
Le redéploiement français au Sahel a coïncidé avec le déclenchement de la guerre d’Ukraine. Même si, au début, il n’y avait aucun lien direct entre les deux événements, le contexte international pèserait par la suite sur les choix français en Afrique.
Certaines sources estiment que les priorités françaises pour la défense sur les plans national et européen incitent Paris à se hâter pour alléger ses engagements internationaux, notamment en Afrique où Barkhane, la plus grande opération extérieure, est à l’œuvre sur une partie de ce continent depuis 2014. Mais la nouvelle orientation française au Sahel et dans l’Afrique de l’Ouest précédait la guerre russe et découle surtout de l’évolution de l’action française depuis 2013, du bilan mitigé des deux opérations Serval et Barkhane, des deux coups d’État à Bamako et Ouagadougou, de l’irruption du facteur Wagner et de la campagne de dénigrement de la France (orchestrée par de forces extérieures, selon Paris, ou produit d’une image altérée par l’époque coloniale).
Indépendamment de raisons du changement français et de son timing, on peut dire que cette fin d’une époque de la politique française classique en Afrique suppose des révisions et des remises en cause.
Ainsi, une source de l’Élysée a annoncé en amont «une adaptation significative des bases françaises en Afrique». Mais, pratiquement, cette annonce est sans conséquence sur le dispositif militaire français dans la région, car les soldats français se sont déjà retirés du Mali, et 3 000 militaires français restent déployés au Niger, au Tchad et au Burkina Faso.
Sur le terrain miné du Sahel, la France cherche donc à réduire l'exposition et la visibilité de ses forces militaires en Afrique et de se concentrer sur la coopération et le partenariat opérationnel.
Bataille d’influence en Afrique
Pour entamer une nouvelle politique africaine de la France, les intéressés insistent sur l’anticipation, la clarification et la transparence afin de corriger les erreurs de la conduite. Mais tout redéploiement militaire ou toute nouvelle politique de communication suppose une perception différente et, au mieux, une réconciliation avec l’opinion publique africaine.
Ces dernières années, on a pu constater l’hostilité croissante des populations locales à l'égard de la France, alimentée par les réseaux sociaux et la désinformation généralisée, au sein de laquelle l'influence de puissances rivales, Moscou en tête, se renforce via réseaux sociaux et médias officiels. Tout cela pousse le président français à insister sur les nouvelles menaces «hybrides» et la nécessité pour la France de développer, ses capacités «d’influence» pour gagner la bataille pour l'influence en Afrique.