PARIS: «Baya, icône de la peinture algérienne – Femmes en leur Jardin», une exposition organisée par le musée de l'Institut du monde arabe (IMA) et la donation Claude et France Lemand du 8 novembre au 26 mars 2023, rend hommage à Baya, l’artiste algérienne la plus singulière du XXe siècle, dans le cadre du programme «2022, regards sur l’Algérie à l’IMA».
L’artiste, qui a connu la célébrité dès l’âge de 16 ans, a produit de nombreuses œuvres en céramique ainsi que des peintures joyeuses, élégantes et colorées, qui appellent à la vie. «L’Institut du monde arabe présente la première grande rétrospective mondiale de cette femme exceptionnelle, Baya. Icône de la peinture algérienne, elle est devenue une sorte de légende.
Née d’une famille pauvre, elle a commencé très tôt à sculpter et à peindre. Elle s’est imposée très progressivement jusqu’à émouvoir des hommes comme Picasso ou André Breton. Son talent s’exprime à travers les couleurs, les fleurs, les animaux, mais aussi, et principalement, les femmes. Son œuvre est comme une sorte d’hymne au mystère et la beauté des femmes», déclare Jack Lang, président de l’Institut du monde arabe, à Arab News en français. «J’espère que beaucoup de jeunes vont pouvoir découvrir cette peintre illustre que nous présenterons aussi à Marseille à partir du mois de mai», ajoute-t-il.
Une exposition avec une dimension historique
«Il y a cette dimension historique, très présente dans l’exposition, qui permet de comprendre ce miracle dont parlait la presse en 1947: l’irruption de Baya sur la scène artistique, alors qu’elle n’avait jamais été scolarisée en Algérie et qu’elle a vécu dans un monde paupérisé. Notre propos est d’essayer de donner un sens historique à tout cela pour expliquer que le monde colonial ne faisait pas très attention à des personnes qui étaient plutôt invisibles.
Un certain nombre de facteurs, après la Seconde Guerre mondiale, vont expliquer comment Baya a su s’appuyer sur des éléments nouveaux, sur des personnes nouvelles pour affirmer son talent et devenir une artiste pionnière dans l’Algérie coloniale», nous explique Anissa Bouayed, historienne, qui est l’une des commissaires de l’exposition.
«Cette exposition va permettre, je l’espère, de mieux connaître Baya. Nous avons essayé de documenter toutes les périodes de sa vie, lorsqu’elle se fait connaître à Paris, mais aussi en Algérie, avec le contexte historique de la colonisation, et de ne pas rester à cette idée du “miracle de Baya” qui fait d’une jeune colonisée, du jour au lendemain, une figure importante de l’art dans une galerie parisienne», souligne Anissa Bouayed.
Icône de l’art algérien du XXe siècle
Spiritualité, singularité, raffinement et élégance sont les caractéristiques que l’on a l’habitude d’attribuer à la production de Baya. Ses œuvres ont été réunies au musée de l’Institut du monde arabe; certaines d’entre elles sont issues de la donation de Claude et France Lemand. D’autres proviennent des archives nationales d'outre-mer, d'Aix-en-Provence ainsi que de nombreux autres prêts. Selon les organisateurs, cette exposition «permet de saisir l’évolution de sa peinture avec, notamment, l’introduction du thème de la musique à partir des années 1960, jusqu’aux émouvantes œuvres de 1998, les dernières réalisées par l’artiste».
«La particularité de cette exposition est due au fait que nous avons accès aux archives conservées à Aix-en-Provence. Il y a là les premières pièces qui figuraient dans la collection, comme les illustrations des contes, ainsi que des dessins antérieurs à l’exposition de Paris [qui a rendu Baya célèbre, NDLR] et qui marquent l’évolution du parcours artistique de Baya de 1940 et 1947», explique Djamila Chakour, chargée de collections, l’une des commissaires de l’exposition. Cette dernière souligne l’importance des sculptures de l’artiste: «Nous avons essayé de créer le parcours typologique de Baya, de la simple terre cuite jusqu’à la terre cuite colorée et vernissée, avec un très beau masque notamment», poursuit-elle.
Durant l’été 1948, Baya revient en France pour réaliser ces sculptures dans l’atelier de céramique Madoura de Vallauris. Leur créativité est remarquée par Picasso. Elle participe à des expositions collectives et présente de nombreuses expositions personnelles. Distinguée en 1969 par le Grand Prix de peinture de la ville d’Alger, elle poursuit inlassablement son travail créatif. Sa production prolifique est appréciée sur le marché international de l’art.