BRASILIA: Le président d'extrême droite Jair Bolsonaro, qui n'a pas explicitement reconnu sa défaite électorale contre Lula, est disposé à une transition du pouvoir en douceur, a déclaré jeudi Geraldo Alckmin, vice-président élu, après avoir été reçu au palais présidentiel.
Lors de cette rencontre imprévue, M. Bolsonaro a exprimé "la disposition du gouvernement fédéral à fournir toutes les informations et l'assistance nécessaires à une transition harmonieuse", a dit à la presse M. Alckmin, chargé par le chef de l'Etat élu de gauche Lula de coordonner le processus de transition.
Il a qualifié la rencontre "de positive". Jair Bolsonaro, battu de peu dimanche dernier (49,1% contre 50,9%) était resté muré dans le silence deux jours avant d'autoriser cette transition en déclarant qu'il "respecterait la Constitution".
Mais il n'a pas reconnu explicitement sa défaite ni félicité Lula, ce qui laissait craindre une période mouvementée d'ici à l'intronisation de Lula, le 1er janvier.
La "transition a commencé" entre le gouvernement actuel et celui que va former Lula, avait annoncé auparavant M. Alckmin, assurant que le processus avait démarré du bon pied.
M. Alckmin a rencontré les représentants du président d'extrême droite à Brasilia, tandis que s'essouflaient les mouvements de protestation dans le pays contre l'élection de l'ex-chef d'Etat de gauche Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010).
"La conversation a été très profitable", a assuré M. Alckmin, ex-gouverneur de Sao Paulo. "La transition se fait de la meilleure manière possible, pour le bénéfice de la population", a-t-il insisté lors d'un bref point de presse à Brasilia.
M. Alckmin a rencontré le directeur de cabinet du chef d'Etat, Ciro Nogueira, au palais présidentiel du Planalto. Le représentant de Lula était accompagné de Gleisi Hoffmann, présidente du Parti des Travailleurs (PT) et du coordinateur du programme de gouvernement de la gauche, Aloizio Mercadante.
"Lula l'a dit clairement dans son discours (de victoire), notre tâche est d'unifier le Brésil, alors allons-y", a dit le vice-président élu.
M. Alckmin, un technocrate et ancien dirigeant du Parti de la social-démocratie brésilienne (PSDB) de centre droit, a été choisi par Lula pour rassurer le centre et les milieux d'affaires.
Lula "prend quelques jours de repos mérité" jusqu'à dimanche, a dit M. Alckmin.
C'est grave
Il a eu plus tôt jeudi une rencontre "productive" avec le rapporteur du budget au Sénat, Marcelo Castro, pour évoquer la compatibilité des promesses électorales de Lula avec un budget fédéral 2023 très contraint.
M. Alckmin a par ailleurs condamné l'érection de barrages routiers par des bolsonaristes en colère dans tout le pays, qui ont posé des problèmes d'approvisionnement depuis lundi.
"Il n'est pas possible d'empêcher les gens de circuler. C'est grave", a-t-il déclaré, "une chose est de manifester, une autre est d'empêcher les personnes d'aller et venir".
Le président du Tribunal supérieur électoral (TSE) Alexandre de Moraes, a fustigé pour sa part les "actions antidémocratiques" de "ceux qui n'acceptent pas le résultat de l'élection et qui seront traités comme des criminels".
Jeudi, le nombre des barrages routiers avait nettement baissé, après l'appel la veille au soir de Jair Bolsonaro à ses sympathisants, dans une vidéo diffusée sur Twitter.
La police fédérale de la route (PFR) n'en recensait plus que 32 en fin d'après-midi sur l'ensemble du territoire, contre 250 mardi au moment du pic. Elle a dispersé 862 manifestations.
"Je vous lance un appel: dégagez les routes. Cela ne me paraît pas faire partie des manifestations légitimes", a dit mercredi soir M. Bolsonaro.
"D'autres manifestations qui se sont déroulées dans tout le Brésil, dans d'autres endroits, font partie du jeu démocratique, elles sont les bienvenues", a-t-il toutefois ajouté. "Je suis avec vous et je suis sûr que vous êtes avec moi".
Saluts nazis
Des milliers de ses partisans se sont rassemblés mercredi devant des lieux de commandement militaire dans une douzaine de villes brésiliennes, dont Sao Paulo, Brasila et Rio, pour réclamer une intervention de l'armée à la suite de la défaite de leur chef de file.
À Rio de Janeiro, jeudi matin, il ne restait qu'une dizaine d'irréductibles devant une caserne militaire, dont certains avaient passé la nuit sous des tentes.
Une vidéo vue plus de deux millions de fois sur des saluts apparemment nazis lors d'une manifestation dans l'Etat méridional de Santa Catarina faisait polémique jeudi, une enquête préliminaire du parquet ne voyant "pas de preuve" d'apologie du nazisme.