AJACCIO: Après l'intrusion jeudi matin dans son hémicycle d'une cinquantaine de militants défenseurs des prisonniers dits politiques, l'Assemblée de Corse a suspendu sa séance pendant dix heures avant de voter une "résolution" appelant l'Etat à négocier sur la situation de ces détenus.
Les élus corses ont engagé en juillet un cycle de réunions avec l'Etat sur l'avenir de l'île, y compris institutionnel, suivant une proposition du ministre de l'Intérieur Gérard Darmanin, après l'agression mortelle en prison d'Yvan Colonna, condamné à la perpétuité pour l'assassinat du préfet Claude Erignac.
Le texte de la résolution, qui a été adoptée à l'unanimité après avoir été présentée pour validation aux manifestants qui avaient rejoint les tribunes, indique notamment que l'Assemblée de Corse et le conseil exécutif "aspirent à poursuivre (ce) processus de dialogue dans des conditions apaisées".
Mais pour cela, ils demandent à l'Etat "des actes politiques" de "façon à créer les conditions de la reprise du processus en cours".
"Rappelant que dans l’histoire contemporaine de la Corse, les négociations politiques ont toujours pris en compte la question des prisonniers", ils appellent à ce que "le processus de discussion engagé entre la Corse et l’Etat intègre cette problématique dans toutes ses dimensions -retour à la liberté, condamnation pécuniaires, Fijait (fichier des auteurs d'infractions terroristes: NDLR), logique d’apaisement en direction des jeunes ayant participé aux manifestations du printemps dernier-".
Ils souhaitent "une réunion sur cette question" avec le gouvernement "au plus vite, dès le mois de novembre 2022".
L'intrusion des manifestants vers 11H00 dans l'hémicycle de l'Assemblée de Corse à Ajaccio avait donné lieu à des bousculades et à quelques coups et insultes. La session de l'Assemblée de Corse, où plus de deux tiers des élus sont nationalistes, avait ensuite été suspendue.
Une porte-parole du collectif l'Ora di u Ritornu (L'heure du retour en langue corse: NDLR), qui réunit des associations de défense des prisonniers dits politiques --une qualification non reconnue par l'Etat français-- et anciens prisonniers, mais aussi des organisations syndicales et politiques, avait alors lu aux élus les demandes que le collectif souhaitait soumettre au vote de l'Assemblée.
Ils y affirmaient notamment "que la recherche d'une sortie de crise et la poursuite du processus" de négociations en cours avec Paris sur l'avenir de l'île "ne (pouvait) se concevoir en éludant la question des prisonniers dont la libération doit s'inscrire comme le prélude d'une réelle solution politique".
Le collectif souhaitait également que l'Assemblée de Corse "s'engage à suspendre le processus de négociation en cours sous réserve d'un acte fort de la part de l'Etat concernant la libération des prisonniers politiques".
Après plus de dix heures de discussions entre les différents groupes politiques, la séance de l'Assemblée avait repris jeudi soir à 21H25 afin de voter la "résolution" lue par la présidente de l'Assemblée, l'autonomiste Marie-Antoinette Maupertuis.
La session de l'Assemblée, qui devait notamment se pencher jeudi sur le vote d'un budget supplémentaire de la collectivité de Corse pour 2022, a ensuite repris ses travaux pour traiter plusieurs dossiers avant l'examen du budget vendredi.