Macron, une double interview télévisée pour garder la main

Le président français Emmanuel Macron, le 10 octobre 2022. (Photo, AFP)
Le président français Emmanuel Macron, le 10 octobre 2022. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Mardi 11 octobre 2022

Macron, une double interview télévisée pour garder la main

Le président français Emmanuel Macron, le 10 octobre 2022. (Photo, AFP)
  • Emmanuel Macron va occuper le terrain avec une double émission télévisée dans l'espoir de fixer enfin le tempo d'un automne potentiellement agité
  • Le président inaugure mercredi soir la nouvelle émission politique de France 2, qui l'accueillera de nouveau le 26 octobre

PARIS: Tiraillé entre la tentation de prendre de la hauteur et la nécessité de garder la main face à une situation politique complexe, Emmanuel Macron va occuper le terrain avec une double émission télévisée dans l'espoir de fixer enfin le tempo d'un automne potentiellement agité. 

Le président inaugure mercredi soir la nouvelle émission politique de France 2, qui l'accueillera de nouveau le 26 octobre. 

Le chef de l'Etat, privé de majorité absolue à l'Assemblée nationale depuis les élections législatives de juin et confronté à des oppositions remontées à bloc, a eu tendance ces dernières semaines à "déléguer beaucoup" de dossiers nationaux à Matignon, glisse un ministre. 

"Il laisse de la marge de manoeuvre" à sa Première ministre Elisabeth Borne, qui "est bosseuse, solide" et "donne l'impression qu'elle décide" avec "un peu moins de cordes de rappel de l'Elysée" que ses prédécesseurs, ajoute-t-il. 

Le président Macron s'est donc en partie concentré sur les sujets et sommets internationaux, toujours largement accaparé par la guerre en Ukraine et ses conséquences. 

D'autant que sa "nouvelle méthode" promise pour agir dans la "concertation" et le "compromis" n'a donné pour l'instant que des résultats mitigés, entre un Conseil national de la refondation (CNR) d'emblée boudé par ses opposants et des tensions au sein même du camp présidentiel sur le calendrier de la réforme des retraites. 

« Dialogue direct » 

Régulièrement, le président de la République montre néanmoins qu'il tient toujours les rênes. 

"Il y a toujours une vraie volonté d'une forme de mise en retrait", mais qui "ne fonctionne pas parce que la séquence politique l'oblige à réintervenir", estime Benjamin Morel, maître de conférences en droit public à l'université Paris 2. 

Selon lui, M. Macron "redevient plus présent, multiplie les déplacements". "Il y a un enjeu d'existence politique, médiatique. Il ne lui reste que cette ligne très bonapartiste entre le chef d'Etat, le personnage charismatique et le peuple à travers un dialogue direct", ajoute l'universitaire. 

Alors que l'exécutif est accusé notamment par la droite d'avoir initialement minimisé les pénuries dans les stations-service, il est ainsi monté au créneau lundi lors d'un déplacement en Mayenne pour dénoncer le "blocage" des dépôts de carburant par les grévistes. 

En septembre, il avait déjà laissé filtrer son impatience en envisageant de réformer les retraites au pas de course et en agitant la menace de la dissolution pour faire passer ce texte aussi emblématique que controversé. 

"Il essaie de reprendre la main", analyse aussi Philippe Moreau Chevrolet, spécialiste de la communication politique. "Son principal handicap, c'est qu'il n'a pas donné de sens à son second mandat, faute de l'avoir formulé pendant la campagne." 

Cet expert explique que "le seul récit relativement bien installé" par Emmanuel Macron "est celui de la protection face aux crises internationales", "un rôle dans lequel les Français aiment bien voir leur président". 

2027 a déjà démarré 

Ce n'est donc pas un hasard si le premier volet de la nouvelle émission politique de France 2, mercredi à 20H30, est censé être exclusivement consacré aux grands enjeux internationaux, à commencer par la guerre en Ukraine. Même si la crise énergétique qu'elle provoque, et ses conséquences pour le pouvoir d'achat des Français, risquent de le ramener aussi sur le terrain intérieur. 

La politique nationale fera l'objet le 26 octobre d'un second volet de ce même rendez-vous, L'Evénement, présenté par la journaliste Caroline Roux. 

Et là, il s'agira aussi de montrer qu'il est toujours en première ligne. A l'opinion mais aussi à ceux qui, dans son propre camp, semblent tentés de jouer leur propre partition avec, déjà, la prochaine présidentielle en ligne de mire, la Constitution interdisant au chef de l'Etat de briguer un troisième mandat consécutif. 

"Il y a pour lui un enjeu qui est de ne pas disparaître, parce que 2027 a très clairement démarré", constate Philippe Moreau Chevrolet. "C'est la première fois qu'on a en France une campagne présidentielle qui démarre dès le lendemain de l'élection." 

"Si vous n'apparaissez pas comme actif et extrêmement présent, vous ne tenez pas votre majorité", renchérit Benjamin Morel. "Il ne peut pas laisser à d'autres le soin de fixer le tempo politique", au risque "de perdre le contrôle de la suite du quinquennat". 


En France, un rassemblement en soutien à Marine Le Pen se tient dans un climat de tensions

Des représentants du parti, dont Franck Allisio (3eL), Emmanuel Fouquart (2eL), Romain Tonussi (5eL), tiennent une banderole lors d'un rassemblement de soutien à la présidente du groupe parlementaire du Rassemblement national, Marine Le Pen, après sa condamnation pour un système d'emplois fictifs au Parlement européen, à Marseille, le 5 avril 2025. (Photo Clement MAHOUDEAU / AFP)
Des représentants du parti, dont Franck Allisio (3eL), Emmanuel Fouquart (2eL), Romain Tonussi (5eL), tiennent une banderole lors d'un rassemblement de soutien à la présidente du groupe parlementaire du Rassemblement national, Marine Le Pen, après sa condamnation pour un système d'emplois fictifs au Parlement européen, à Marseille, le 5 avril 2025. (Photo Clement MAHOUDEAU / AFP)
Short Url

PARIS : Alors que la France s'approche à grands pas de l'élection présidentielle, l'extrême droite organise dimanche à Paris un rassemblement de soutien à sa cheffe de file, Marine Le Pen, condamnée à une peine d'inéligibilité, dans un climat de tensions avec des contre-manifestations attendues dans la capitale.

Dans un contexte international marqué par des crises - conflit russo-ukrainien, Proche-Orient, guerre commerciale lancée par Donald Trump -, et une crise politique latente en France, le pays a subi la semaine dernière une très forte secousse judiciaire et politique.

La lourde condamnation en première instance du premier parti de France, le Rassemblement national (RN), dans l'affaire des assistants parlementaires européens pour détournement de fonds publics, et l'hypothèse sérieuse de l'inéligibilité de Marine Le Pen, l'une des favorites pour la prochaine présidentielle, ont mis la classe politique en tension, alors que nous approchons de l'échéance prévue pour la succession d'Emmanuel Macron. 

D'ici là, à l'été 2026, la cour d'appel de Paris doit se prononcer sur le sort de la triple candidate à l'élection présidentielle, condamnée en première instance à quatre ans de prison dont deux ferme, ainsi qu'à cinq ans d'inéligibilité avec exécution provisoire.

La présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale ne compte pas pour autant renoncer d'emblée et passer le flambeau au président de son parti, Jordan Bardella.

Au contraire, le parti d'extrême droite est à l'offensive : il a dénoncé des « juges tyrans » à l'Assemblée nationale selon les mots du député RN Jean-Philippe Tanguy et appelle à un rassemblement de soutien à Mme Le Pen devant les Invalides, un monument emblématique de Paris qui abrite le tombeau de Napoléon, à 13 heures GMT. 

Dans le journal Le Parisien, le Premier ministre centriste François Bayrou a jugé qu'il n'était « ni sain ni souhaitable » d'organiser un rassemblement pour protester contre une décision de justice.

Même son de cloche à droite : Xavier Bertrand, le président de droite de la région des Hauts-de-France, terre d'élection de Mme Le Pen, redoute la perspective d'un « mauvais remake du Capitole », en référence à l'envahissement du Congrès de Washington par les partisans de Donald Trump le 6 janvier 2021.

« Ce n'est pas une manifestation contre des juges, mais pour la démocratie, pour Marine Le Pen, pour la souveraineté populaire », a rétorqué Sébastien Chenu, vice-président du RN.

Le parti de gauche radicale La France Insoumise (LFI) ainsi que les écologistes organiseront au même moment un contre-rassemblement face au RN, place de la République à Paris, à environ 5 kilomètres des Invalides.

Un autre meeting, prévu depuis des mois, se tiendra à Saint-Denis, au nord de Paris, à l'appel de Renaissance, le parti centriste proche du camp présidentiel.

Gabriel Attal, l'ancien jeune Premier ministre qui dirige cette formation, a battu le rappel après l'annonce du rassemblement du RN, pour défendre « l’État de droit », « la démocratie et nos valeurs ».

« Est-ce que l'on veut que la France devienne l'Amérique de Trump ou pas ? », s'est interrogé un proche de M. Attal.


Droits de douane : le gouvernement prépare le public à des choix budgétaires difficiles

François Bayrou, Premier ministre français
François Bayrou, Premier ministre français
Short Url
  • La hausse des droits de douane décidée par Donald Trump pourrait avoir des conséquences importantes sur les finances publiques françaises.
  • François Bayrou précise qu'il partagera avec les Français le 15 avril « le cadre général » des choix à faire pour le budget de 2026.

PARIS : La hausse des droits de douane décidée par Donald Trump pourrait avoir des conséquences importantes sur les finances publiques françaises : le Premier ministre a prévenu samedi qu'elle pourrait coûter « plus de 0,5 % du PIB », tandis que Bercy va réunir un premier « Conseil des entreprises » pour préparer sa réponse.

Avec la hausse brutale des droits de douane décidée par le président américain, « le risque de pertes d’emplois est absolument majeur, comme celui d’un ralentissement économique, d’un arrêt des investissements », a jugé le Premier ministre dans un entretien au journal Le Parisien dimanche.

« La déstabilisation qu’il a provoquée fragilisera l'économie mondiale pour longtemps », ajoute le chef du gouvernement, dont la volonté est « de tenir l’objectif du retour aux 3 % de déficit public en 2029. Mais la crise peut tout changer », admet-il. 

François Bayrou précise qu'il partagera avec les Français le 15 avril « le cadre général » des choix à faire pour le budget de 2026.

« Il faut que les Français soient associés à deux nécessités : trouver les moyens de notre indépendance, de notre sécurité, de notre défense, mais aussi de notre capacité de production. Ensuite, il explique, par la nécessité de sortir de la malédiction de la dette.

« Ces choix ne seront pas faits sans eux », poursuit le chef du gouvernement, qui affirme qu'il partagera « avec eux toutes les données des choix que nous avons à faire » et qu'ils « connaîtront tout de la situation ».  

Le président américain Donald Trump a signé un décret généralisant des droits de douane de 10% minimum sur toutes les importations arrivant aux États-Unis et de 20% pour les produits arrivant de l'UE.

"Dans ces temps difficiles, nous devons faire équipe avec nos entreprises. C'est pourquoi je vais réunir un +Conseil des entreprises + – une instance de dialogue régulier avec les représentants du  Medef, de la  CPME, de l’U2P, du Meti et de l’Afep. L’idée, c’est de structurer notre travail sur tout sujet, national ou international, ayant un impact sur notre économie", a détaillé Eric Lombard.

"Les entreprises ont besoin d’écoute, de visibilité, d’être accompagnées et de prendre part aux décisions", selon lui. 


Le chef de la diplomatie française est attendu Alger pour réinitialiser la relation entre la France et l'Algérie

Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères (Photo AFP)
Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères (Photo AFP)
Short Url
  • Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, est attendu à Alger ce dimanche, où il rencontrera son homologue Ahmed Attaf.
  • La visite de Jean-Noël Barrot « vise à détailler un programme de travail bilatéral ambitieux, à en décliner les modalités opérationnelles », à élaborer des objectifs conjoints et un calendrier de mise en œuvre.

PARIS : Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, est attendu à Alger ce dimanche, où il rencontrera son homologue Ahmed Attaf pour « concrétiser » la reprise du dialogue sur les sujets les plus sensibles qui affectent la relation bilatérale, dont la question migratoire.

Cette semaine, devant les parlementaires, le ministre français a expliqué que la France devait « se saisir » de l'espace diplomatique ouvert par les présidents français et algérien « pour obtenir des résultats » sur les dossiers migratoire, judiciaire, sécuritaire et économique. 

 Il y a désormais une volonté conjointe de reprendre langue pour retrouver une relation apaisée et équilibrée « dans une logique de résultats et d'efficacité », insiste-t-on à Paris.

La visite de Jean-Noël Barrot « vise à détailler un programme de travail bilatéral ambitieux, à en décliner les modalités opérationnelles », à élaborer des objectifs conjoints et un calendrier de mise en œuvre, a ainsi expliqué jeudi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

Pour préparer le voyage de Jean-Noël Barrot, Emmanuel Macron avait réuni plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, mardi.

La reprise des contacts entre les préfectures et les consulats algériens en France est d'ores et déjà actée, afin que les demandes de réadmission en voie d'être présentées par les autorités françaises puissent l'être dans les conditions normales.

Concrètement, Paris attend des autorités algériennes qu'elles augmentent leur taux de délivrance des laisser-passer consulaires dans les délais utiles, qui est actuellement d'environ 40 %.

Le retour de l'ambassadeur d'Algérie à Paris, rappelé à l'été 2024, signalerait aussi la volonté de dialogue en toute bonne foi. 

Le cas de Boualem Sansal devrait également être discuté.

Emmanuel Macron a plaidé pour « une issue humanitaire » pour cet écrivain âgé et malade, détenu depuis mi-novembre et condamné à 5 ans de prison, une décision contre laquelle il a fait appel.

Cette semaine encore, Jean-Noël Barrot estimait que celui-ci était détenu « sans fondement ».

Mais le parquet algérien, qui avait requis 10 ans de prison, a fait appel également cette semaine, éloignant la possibilité d'une grâce présidentielle à brève échéance, à moins que les deux parties ne se désistent.

À Alger, Jean-Noël Barrot sera notamment accompagné de Romaric Roignan, le nouveau directeur de la région Afrique du nord et Moyen-Orient du ministère des Affaires étrangères.

Sa visite précède enfin celle de son homologue, Gérald Darmanin, ministre de la Justice, qui doit se rendre prochainement dans le pays pour relancer la coopération judiciaire.