Au procès des attentats de janvier 2015, la juge fait barrage face à la défense

Un croquis de salle d'audience réalisé le 14 décembre 2020 montre Ali Riza Polat (au centre) (Photo, AFP).
Un croquis de salle d'audience réalisé le 14 décembre 2020 montre Ali Riza Polat (au centre) (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 24 septembre 2022

Au procès des attentats de janvier 2015, la juge fait barrage face à la défense

  • En décembre 2020, Ali Riza Polat avait été le plus lourdement condamné des onze hommes jugés en leur présence
  • Reconnu coupable de complicité des assassinats, il avait écopé de trente ans de réclusion criminelle.

PARIS: "Ca ne change rien". Au procès en appel des attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher, la juge d'instruction en charge de ce dossier "hors norme" a défendu vendredi son enquête et contré la "lecture" qu'en fait la défense.

La présence du magistrat instructeur à la barre d'une cour d'assises, même quand elle est spécialement composée et juge des affaires de terrorisme, est extrêmement rare.

Bien que ce soit "inhabituel", la défense d'Ali Riza Polat, l'un des deux accusés rejugés pour leur rôle présumé dans la préparation des attaques jihadistes, a tenu à "faire citer" la juge qui a instruit ce dossier pendant quatre ans, et renvoyé quatorze personnes devant les assises.

En décembre 2020, Ali Riza Polat avait été le plus lourdement condamné des onze hommes jugés en leur présence. Reconnu coupable de complicité des assassinats commis par les frères Chérif et Saïd Kouachi et par Amedy Coulibaly, il avait écopé de trente ans de réclusion criminelle.

Le Franco-Turc, qui a toujours nié tout lien avec les attentats, a depuis changé d'avocats, qui proposent "une nouvelle lecture" du dossier.

MMe Moad Nefati et Rachid Madid estiment ainsi que l'instruction est "passée à côté des vrais protagonistes" et que plusieurs pistes d'enquêtes ont été négligées.

"Nous sommes un peu les inspecteurs des travaux finis", résume Me Nefati à Nathalie Poux, qui a été juge d'instruction antiterroriste de 2009 à 2019.

Pendant les trois heures de son audition, la magistrate de 57 ans ne vacillera face à aucune des questions de la défense d'Ali Riza Polat.

Pas «démontré»

La voix claire et assurée, elle résume les principaux axes des investigations menées pour trouver les commanditaires et les logisticiens de ces attaques en l'absence de leurs auteurs, et semble anticiper chacune des questions de la défense.

Chérif et Saïd Kouachi, et Amedy Coulibaly avaient été tués le 9 janvier 2015 dans des assauts policiers après avoir semé pendant trois jours la terreur et le chaos et assassiné 17 personnes dans les locaux du journal satirique Charlie Hebdo, à Montrouge et dans une supérette juive de l'est parisien.

L'instruction avait conclu au "rôle central" d'Ali Riza Polat dans la recherche des armes et dans les préparatifs, notamment au regard de ses nombreux échanges téléphoniques avec Coulibaly dans les mois précédant les attaques.

Affirmant qu'Ali Riza Polat n'a "jamais joué" ce rôle et qu'il cherchait alors à vendre une voiture pour éponger une dette envers Coulibaly, ses avocats pressent la témoin de questions.

Pourquoi la piste de Djamel Beghal, un vétéran du jihad et mentor religieux de Chérif Kouachi et d'Amedy Coulibaly, n'a-t-elle jamais été creusée ?

Pour la défense du principal accusé, qui a obtenu avant le procès l'exploitation d'une trentaine de numéros de téléphone retrouvés sur deux feuillets lors de la perquisition du logement de Coulibaly, l'un des noms, "Hamza", correspond à Djamel Beghal.

"J'ai passé dix ans à l'antiterrorisme, des +Hamza+ il peut y en avoir plein", rétorque Nathalie Poux.

"Rien n'a été démontré sur des contacts" entre les jihadistes et leur mentor, appuie-t-elle.

L'ex-juge d'instruction répètera invariablement cette réponse à chaque interrogation de la défense sur pourquoi telle ou telle personne n'a pas été poursuivie.

"On ne met pas en examen des gens juste parce qu'ils apparaissent dans des carnets d'adresses. Aucun élément ne permettait de (les) relier aux attentats", s'agace Mme Poux.

"Nous ne sommes pas dans une phase de critiques de votre travail", avance Me Moad Nefati, "nous avons des arguments à faire valoir".

Jusque-là silencieux dans le box, Ali Riza Polat se lève, rajuste son sweat-shirt blanc et interpelle vivement la témoin. Il évoque deux frères, "vous les connaissez ?".

"Je dois répondre ?", s'étrangle Nathalie Poux, avant de dire "non".

"Et la cote 8486 ?", hèle l'accusé. "Tu viens mentir ici", tempête Ali Riza Polat, puis se rassoit.

Il est rejugé jusqu'au 21 octobre avec son coaccusé Amar Ramdani, condamné en première instance à vingt ans de réclusion pour association de malfaiteurs terroriste criminelle.


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
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  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
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  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".