LONDRES: C'est l'aboutissement de 20 ans de réhabilitation. A 75 ans, Camilla, l'épouse de Charles III, s'est glissée en toute simplicité dans le costume de reine consort, figure solide dans les pas du nouveau monarque.
Dans son premier discours en tant que roi, le 9 septembre, Charles n'a pas manqué de saluer sa "femme chérie", qu'il n'épousa qu'en 2005 mais qui fut toute sa vie son grand amour.
"Je sais qu'elle saura répondre aux exigences de son nouveau rôle avec le dévouement inébranlable sur lequel je compte tant", a-t-il insisté.
Le 8 septembre, Camilla est avec son époux à Balmoral, en Ecosse, où la reine Elizabeth II a rendu son dernier souffle. Depuis, elle sillonne le Royaume-Uni auprès du nouveau roi : bain de foule au palais de Buckingham, proclamation de Charles III, déplacements en Ecosse, en Irlande du Nord, au Pays de Galles...
Longtemps mal-aimée des Britanniques, qui voyaient en elle une briseuse de ménages pour avoir été la maîtresse de Charles lorsqu'il était marié avec la princesse Diana, Camilla a lentement gagné ses galons, s'engageant sur les violences faites aux femmes ou la promotion de la lecture.
Il a fallu attendre février dernier pour que la défunte Elizabeth II, qui n'avait pas assisté en 2005 à son mariage civil avec Charles, ne donne son assentiment pour qu'elle devienne "reine consort" le moment venu, un sacerdoce aussi visible qu'austère, à mille lieux de ses jeunes années.
Sa popularité s'est redressée. Moins de la moitié des Britanniques souhaitaient l'an dernier qu'elle devienne reine. Selon un sondage YouGov publié mardi, 53% d'entre eux estiment désormais qu'elle fera un bon travail, quand 18% pensent le contraire.
Vendredi à Londres, dans l'interminable file d'attente qui mène au cercueil de la reine, les personnes interrogées mettent en avant le "soutien" qu'elle apporte au nouveau roi, et la plupart disent avoir appris à l'apprécier.
"J'ai changé d'avis au cours des cinq ou dix dernières années", raconte ainsi Peter Finlayson, 37 ans. "Si vous regardez en arrière, Camilla a toujours été là pour Charles, elle est d'un grand soutien pour lui et elle a gagné le droit d'être là", estime-t-il. "Ils assurent la continuité que nous pensions tous avoir perdue avec la reine".
"Cette semaine en particulier, elle a été incroyable", estime aussi Deborah Toulson, une professeure de mathématique de 57 ans, sensible aux gestes discrets de Camilla pour aiguiller Charles lors de leurs récentes apparitions publiques.
Orteil cassé
Quand Charles III reçoit les condoléances du Parlement britannique à Westminster, Camilla, casque de cheveux blonds-blancs sur sa robe noire, est là.
Lorsque le nouveau roi et ses trois frères et sœur participent à une veillée funèbre, dos au cercueil de la reine dans la cathédrale d'Edimbourg, elle est encore là. Les tabloïds saluent la délicatesse de la nouvelle reine, qui a épinglé sur sa robe une broche de diamant en forme de chardon, cadeau d'Elizabeth II.
Non sans donner de sa personne: selon le Telegraph, la nouvelle reine accomplit ces kilomètres de déplacements tout en soignant un orteil cassé.
"Elle souffre beaucoup, mais elle fait face à la situation. Le timing est malheureux, c'est le moins qu'on puisse dire", a glissé une source anonyme au quotidien conservateur.
Et quand, en Irlande du Nord, un stylo qui fuit a raison du sang-froid du nouveau roi, Camilla réceptionne, flegmatique, l'objet de la colère royale tandis que l'impatient quitte la pièce en maugréant.
Camilla "a montré au fil du temps qu'elle était d'un grand soutien pour Charles et elle l'a encore prouvé cette semaine en étant très calme", résume encore, dans la queue londonienne, Anne-Marie Whatts, une quadragénaire.
Sa biographe Angela Levin a estimé dans le Telegraph que sa loyauté à Charles et son dévouement à la monarchie faisaient d'elle un soutien solide pour le nouveau roi. Selon elle, les conseils d'une épouse "qui a eu une vie relativement normale jusqu'à ses 50 ans" s'annoncent précieux pour son époux, dans la bulle royale depuis sa naissance.
Il lui reste à retrouver sa voix : en cette semaine consacrée à clore l'ère Elizabeth II et à installer Charles dans ses habits de roi, on n'aura quasiment pas entendu Camilla.