WASHINGTON : Le candidat démocrate Joe Biden était mercredi aux portes de la Maison Blanche après des victoires précieuses dans deux Etats-clés face à Donald Trump, qui s'est engagé de son côté dans une véritable guérilla judiciaire.
Avec le Wisconsin et le Michigan en poche, deuxième et troisième Etats repris à Donald Trump avec l'Arizona, Joe Biden dispose désormais de 264 grands électeurs. S'il remportait le Nevada (6) il atteindrait le nombre magique de 270 pour devenir le 46e président des Etats-Unis.
Plusieurs autres Etats-clés étaient par ailleurs toujours indécis. En Pennsylvanie (20 grands électeurs), Donald Trump avait mercredi plus de 220.000 voix d'avance au total, mais son avance pourrait fondre après la prise en compte de bulletins envoyés par courrier. Ceux déjà comptés étaient à majorité pour Joe Biden.
Pour la première fois depuis 2000, les Américains ne connaissaient pas le nom de leur prochain président (qui prêtera serment le 20 janvier 2021) au lendemain du scrutin.
« Je suis venu vous dire que, quand le dépouillement sera terminé, nous pensons que nous allons gagner », a déclaré Joe Biden lors d'une brève allocution dans son fief de Wilmington, dans le Delaware.
Une fois le résultat connu, il sera temps « de mettre les discours agressifs de la campagne derrière nous », a-t-il poursuivi, se posant en rassembleur d'un pays meurtri. « Pour avancer, nous devons arrêter de traiter nos opposants comme des ennemis ».
L'équipe de campagne de Donald Trump a annoncé une première offensive judiciaire, dans le Wisconsin, remporté par Joe Biden avec un écart de moins de 1% selon des résultats quasi-complets, selon plusieurs médias américains.
Les républicains veulent demander un recomptage des suffrages et ont demandé à un juge local de réexaminer les bulletins déjà comptés.
Ils ont également déposé un recours pour obtenir la suspension du dépouillement dans l'Etat-clé de Pennsylvanie, à l'issue toujours incertaine. « Nous agissons en justice pour suspendre le dépouillement en attendant plus de transparence », a indiqué Bill Stepien, le directeur de campagne de M. Trump.
Le président lui-même avait menacé dans la nuit de mardi à mercredi, dans une allocution confuse, de saisir la Cour suprême, tout en restant évasif sur les motifs.
Le système électoral américain est par ailleurs fragilisé par une persistante campagne de désinformation. Ses lieutenants commençaient à répandre des rumeurs sur les réseaux sociaux et les ondes sur des tricheries et des irrégularités.
L'Organisation sur la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) a critiqué mercredi les « allégations infondées » du président américain sur l'élection.
« Notre démocratie est mise à l'épreuve dans cette élection », a déclaré de son côté le gouverneur de Pennsylvanie, Tom Wolf, appelant à la patience.
Au terme d'une longue campagne d'une virulence exceptionnelle, perturbée par la pandémie, les résultats partiels montrent que Donald Trump n'a pas subi la répudiation électorale que les sondages présageaient, prouvant que même s'il était battu, sa base d'électeurs lui reste largement fidèle.
Le milliardaire a dénoncé un ratage d'ampleur « historique » chez les sondeurs.
« Hier soir j'avais une bonne avance, dans de nombreux Etats-clés », a tweeté Donald Trump mercredi matin. « Puis, un par un, ils ont commencé à disparaître magiquement avec l'apparition et le comptage de bulletins surprise ».
Il n'y a pas de bulletins surprise démontrés, mais des bulletins envoyés par courrier et traités lentement par les autorités. Ils viennent majoritairement d'électeurs démocrates, ce qui explique qu'ils aient fait fondre l'avance initiale du président, dont les électeurs ont privilégié le vote en personne mardi.
« Nous ne nous accorderons aucun répit jusqu'à ce que chaque bulletin de vote soit compté », a tweeté l'ancien vice-président de Barack Obama.
Etats débordés
Jamais autant d'Américains n'avaient participé à l'élection présidentielle: 160 millions d'électeurs ont voté, soit une participation estimée à 66,9%, contre 59,2% en 2016, selon le US Elections Project.
Nombre d'Etats ont été débordés par le déluge de bulletins envoyés par correspondance, encouragés en raison de la crise sanitaire. Ouvrir les enveloppes et scanner ces bulletins va prendre dans certaines villes plusieurs jours, en particulier à Philadelphie, fief démocrate.
Et si la justice s'en mêlait, comme en 2000, « cela pourrait durer des semaines », a dit mercredi Ed Foley, spécialiste du droit électoral à l'Ohio State University.
Etats en suspens
Mais même chez les républicains, la menace du président de saisir la justice choquait.
« Stop. Les bulletins seront comptés et soit vous perdrez, soit vous gagnerez. Et l'Amérique l'acceptera. La patience est une vertu », a tweeté le parlementaire républicain Adam Kinzinger.
Quoi qu'il arrive, le prochain président devra composer avec le Congrès.
Comme cela était largement anticipé, les démocrates ont gardé le contrôle de la Chambre des représentants, mais les chances d'un basculement du Sénat du côté démocrate s'amenuisaient, après la réélection de plusieurs républicains.