STOKHOLM: Rejoignant une cohorte d'évènements perturbés par le coronavirus, les immuables Nobel ont à leur tour vu leur organisation chamboulée mardi pour la première fois depuis plus de 60 ans, même si les prestigieux prix seront bien attribués en octobre.
Les cérémonies de remise des prix à Stockholm et à Oslo le 10 décembre, jour d'anniversaire de la mort d'Alfred Nobel, sont elles aussi maintenues. Mais elles vont avoir lieu "sous de nouvelles formes", précise dans un communiqué la Fondation Nobel, qui gère les prix créés par l'inventeur suédois.
"C'est une année très spéciale où chacun doit faire des sacrifices et s'adapter aux nouvelles circonstances", a souligné Lars Heikensten, le directeur de la Fondation.
C'est la première fois depuis 1956 que le banquet n'aura pas lieu. Il réunit habituellement dans la grande salle de l'hôtel de ville de Stockholm 1.300 personnes autour des lauréats et de la famille royale de Suède, a précisé une porte-parole. Ce long dîner raffiné aux codes très stricts donne traditionnellement lieu à des discours des lauréats.
"La Fondation Nobel prévoit de pouvoir maintenir les cérémonies de remise des prix à Oslo et Stockholm sous de nouvelles formes qui prendront en compte les restrictions liées à la distanciation sociale et au fait que seulement quelques-uns ou aucun des lauréats ne pourra participer sur place", explique M. Heikensten, cité dans le communiqué.
Repêchage en 1920
Si besoin est, les organisateurs recherchent "une façon de remettre leur médaille et diplômes aux lauréats dans leur pays d'origine", possiblement dans les ambassades.
L'annonce des prix eux-mêmes (Médecine, Physique, Chimie, Littérature, Paix, puis le prix d'Economie non prévu par le testament d'Alfred Nobel) est maintenue aux dates prévues entre le 5 et le 12 octobre, précise la Fondation.
Institution immuable organisée dans un pays qui n'a pas été en guerre depuis deux siècles, le Nobel a toutefois déjà subi les soubresauts de l'Histoire. Le banquet a notamment déjà été annulé durant les deux guerres mondiales - et donc pendant la pandémie de grippe espagnole (1918-1919) - ainsi qu'en 1907, 1924 et 1956. Les prix eux avaient continué à être remis durant le premier conflit mondial, mais pas durant le second.
En 1920, une sorte de "repêchage" avait été organisé et les prix de lauréats de précédentes années avaient été redistribués, selon l'historien Gustav Källstrand, expert du prix Nobel.
La dernière annulation du banquet en 1956 visait elle à ne pas inviter l'ambassadeur soviétique du fait de la répression de l'insurrection de Budapest, a expliqué la porte-parole de la Fondation à l'AFP. "Un dîner officieux a tout de même été organisé, sans l'ambassadeur, dans une autre salle", a-t-elle expliqué.
Les prix Nobel sont nés de la volonté du savant et industriel suédois Alfred Nobel (1833-1896), inventeur de la dynamite, de léguer une grande partie de sa fortune à des personnalités oeuvrant pour "un monde meilleur", selon son testament établi à Paris en 1895, un an avant sa mort.
Le prestige international des Nobel tient beaucoup aux généreux montants dont ils sont dotés, actuellement neuf millions de couronnes suédoises (environ 830.000 euros), que se partagent les lauréats s'ils sont plusieurs.