PARIS: L'album « Jours de gloire » résonne puissamment après la mort de Samuel Paty : une vingtaine d'artistes - Michel Bouquet, Reda Kateb, Sophie Marceau, ou encore M - lisent des textes fondateurs, mis en musique, autour de la République ou de l'éducation.
Cet ambitieux projet est né en 2014 sous l'impulsion de Sébastien Boudria, un professeur de musique en région parisienne qui a pris son « bâton de pèlerin » pour réunir un casting incroyable de musiciens, chanteuses, acteurs, et actrices sans avoir, au départ, un seul contact dans le milieu du showbiz.
L'album, accompagné d'un livret, qui sort vendredi (chez Pias), prend tout son relief avec l'actualité récente et dramatique.
« D'un bout de la France à l'autre, il faut que chacun aide la République et la sauve de ses ennemis », déclame Muriel Robin, qui lit une lettre de George Sand, sur une musique de Sébastien Boudria, à la baguette sur tout le disque.
Akhenaton, leader d'IAM, assène : « Que l'intelligence de tous se développe par la liberté, la liberté de la presse (...) la liberté de l'éducation ». Des propos tirés du discours pour l'abolition de l'esclavage de Victor Schoelcher.
Les enseignants, ces « héros »
Et c'est à Oxmo Puccino, autre rappeur majeur, que revient la « Lettre aux instituteurs et institutrices » de Jean Jaurès. Un texte lu lors des hommages pour Samuel Paty à la Sorbonne puis lundi lors de la rentrée scolaire.
« J'ai toujours vu les enseignants comme des héros (...) ils ont dans les mains le futur des enfants », commente Oxmo Puccino dans une vidéo du making-of de « Jours de gloire ». Son parcours « ne serait pas le même sans la rencontre de quelques professeurs, qui étaient des gens extraordinaires », poursuit-il. Et de rappeler son histoire « personnelle » : « Je ne suis pas né ici (il est franco-malien) je me suis retrouvé à l'école, j'ai pu faire de la musique, c'est ce que m'a permis la République ».
« Pour savoir de quoi on parle, où on se tient, pour pouvoir échanger, poser les bonnes questions, ça commence par la connaissance », conclut-il.
Sébastien Boudria se définit lui aussi comme un « enfant de la République ». Né à Montreuil, « dans les quartiers populaires », il a eu « une enfance positive », avec accès « à l'enseignement, aux colonies de vacances, au ski, à la musique classique ». « Cette musique qui est devenue mon métier », insiste-t-il.
« Pas un truc élitiste »
Tout part d'un projet autour de « Aux armes et caetera » (« La Marseillaise » version Serge Gainsbourg) avec ses élèves au conservatoire de Colombes en mai 2014. Lorsqu'un élève slamme le texte devant le public, Sébastien Boudria sent « un frisson et une cohésion énormes ».
Il a alors l'idée folle de mettre en valeur d'autres textes incontournables, lus par des « ambassadeurs connus », de les mettre en musique « pour ne pas faire un truc élitiste, pour que ça s'adresse à tout le monde ». « Jours de gloire » alterne en effet les arrangements dépouillés, épiques, voire même électriques comme quand Camélia Jordana lit un texte sur les droits des femmes.
« J'ai mis cinq ans, j'ai attendu la fin d'une représentation pour aller voir Michel Bouquet et lui présenter mon idée, par exemple. Ça s'est fait petit à petit », raconte Sébastien Boudria. Il avoue avoir été « un peu bleu (de peur) la veille d'enregistrements » quand il devait diriger des artistes connus et reconnus. « Mais ça s'est passé merveilleusement, après tout c'est mon projet, je suis enseignant et puis devant ces grands textes, la responsabilité de les lire, certains furent au départ impressionnés à leur tour », déroule-t-il.
Un des derniers textes de l'album est un discours de François Hollande après les attentats contre Charlie Hebdo en 2015, lu par l'actrice Sabrina Ouazani (récemment vue dans la série « Validé ») : « La liberté sera toujours plus forte que la barbarie ».