TÉHÉRAN: Plusieurs centaines d'Iraniens ont assisté vendredi à Téhéran aux funérailles du plus grand poète contemporain du pays, Houshang Ebtehaj, dont la dépouille a été transférée en Iran après son décès le 19 août en Allemagne à 94 ans.
Connu sous son nom de plume Sayeh ("ombre" en persan), Ebtehaj avait accédé à la célébrité avec ses poèmes lyriques où se mêlaient amour et solitude, reflétant les chagrins et les rêves de la société iranienne.
Sa popularité s'est accrue après que le chanteur Mohammad-Réza Shajarian, maître incontesté du chant traditionnel iranien, a interprété ses œuvres.
Vendredi matin, une foule de responsables, d'artistes et d'admirateurs a rendu hommage à Ebtehaj devant le hall Roudaki au centre de la capitale Téhéran.
"Sayeh est finalement revenu sur sa terre", a lancé à la foule présente sa fille Yalda, assurant que son père "répétait sans cesse souhaiter retourner auprès de son peuple".
Après une courte cérémonie, la foule a suivi le cercueil d'Ebtehaj alors qu'un enregistrement de sa voix diffusait ses poèmes.
Le poète est décédé le 19 août à Cologne des suites d'une insuffisance rénale, après quelques semaines d’hospitalisation.
Sa dépouille, retournée mercredi soir à Téhéran, a été accueillie à l'aéroport de Mehrabad par ses proches, le porte-parole de la diplomatie iranienne, Nasser Kanani, et des responsables du ministère de la Culture.
Dans un message, le président iranien Ebrahim Raïssi a loué Ebtehaj pour "son rôle dans la préservation du riche trésor de la littérature persane" et ses poèmes "anti-arrogance", une allusion à l'Occident dans la phraséologie de la République islamique.
Né le 26 février 1928 dans une famille aisée à Rasht (nord de l'Iran), Ebtehaj publie son premier recueil en 1946.
Dans sa jeunesse, il se rapproche au Parti communiste iranien Toudeh, bien qu'il ait toujours nié en avoir été membre. Il est resté toute sa vie fidèle au socialisme, qu'il jugeait comme "la seule voie pour l'humanité" et qualifiait le communisme d'"idéal lointain".
En mai 1968, Ebtehaj participe à la création de l'Association des écrivains iraniens, fondée sous le régime impérial du Chah par un groupe d'écrivains souhaitant lutter contre la censure.
Quelques jours après le "vendredi noir" (8 septembre 1978), il démissionne de la radio d'Etat, dénonçant le massacre de centaines de manifestants par le régime du Chah.
Au début des années 1980, Ebtehaj est arrêté avec plusieurs membres du Toudeh, désormais banni par le pouvoir islamique, avant d'être relâché après l'intervention du guide suprême Ali Khamenei, alors président.
Depuis la fin des années 1980, Ebtehaj habitait entre Téhéran et Cologne, où il menait avec sa famille une vie modeste.
Houshang Ebtehaj doit être inhumé samedi dans le jardin Mohtasham, un parc public situé au cœur de sa ville natale, Rasht.