PARIS: Après une contraction de 0,2% du PIB au premier trimestre, l'Insee dévoile vendredi sa première estimation de la croissance française au printemps, sans doute molle voire nulle, l'inflation pénalisant toujours la consommation.
L'indice des prix à la consommation, en progression régulière entre avril (4,8% sur un an) et juin (5,8%), devrait lourdement peser sur le PIB.
Au plus haut depuis les années 1980, l'inflation risque de franchir un nouveau palier en juillet; l'institut national de la statistique (Insee) dévoilera sa première estimation vendredi.
Dans leurs dernières prévisions, la Banque de France et l'Insee tablent respectivement sur une croissance du Produit intérieur brut (PIB) de 0,2% et de 0,25% entre avril et juin par rapport au trimestre précédent.
Des anticipations proches de celles que les deux instituts avaient formulées au premier trimestre... qui s'était finalement soldé par un recul de 0,2% du PIB, précipité par une consommation des ménages en chute libre (-1,5%).
"Il y a un risque négatif comme au premier trimestre", reconnaît Stéphane Colliac.
Mais l'économiste de BNP Paribas "ne pense pas que ce soit un risque de récession" et s'attend plutôt à une croissance nulle.
Inflation
"Au regard des indicateurs, on s’attend à ce que le taux de croissance soit très mou, mais pas à une nouvelle chute", avance également Mathieu Plane pour l'Observatoire français des conjonctures économiques.
Traditionnel moteur de la croissance française, "la consommation des ménages a déjà beaucoup baissé au premier trimestre", relève Stéphane Colliac, à tel point qu'une nouvelle baisse de la même ampleur au deuxième trimestre lui semble improbable.
Sur les deux premiers mois du trimestre (avril et mai), l'indicateur a d'abord fléchi de 0,7% avant de se redresser d'autant. L'estimation de la consommation des ménages en juin sera dévoilée vendredi par l'Insee.
Si le gouvernement tente ces jours-ci de faire passer au Parlement une batterie de mesures de soutien à la consommation, elles ne produiront leurs effets sur le portefeuille des Français qu'à partir du troisième trimestre.
De quoi alimenter l'inquiétude des consommateurs, dont le moral végète au ras des pâquerettes depuis plusieurs mois sur fond de guerre en Ukraine.
Malgré ce sombre tableau, plusieurs éléments peuvent inciter à l'optimisme.
La consommation devrait par exemple se redresser dans plusieurs secteurs pénalisés au début de l'année par les restrictions sanitaires liées au variant Omicron.
"On a un rebond attendu de la restauration et de l’hébergement, (mais) aussi des transports, avec beaucoup de gens dans les trains depuis quelques mois", énumère Stéphane Colliac.
Epargne
Autre variable qui pourrait soutenir la consommation: la mobilisation de l'épargne accumulée au plus fort de la pandémie de Covid-19.
"D’habitude, quand on a un choc inflationniste sur les prix, l’épargne sert un peu de variable d’ajustement". Or au premier trimestre, "ça n’était pas du tout le cas", souligne Mathieu Plane.
Une récente étude du Conseil d'analyse économique (CAE) pointait d'ailleurs une "stabilisation sur un point haut" de l'épargne des ménages les plus aisés, avec un "stock d’épargne supérieur de plus de 10% à celui qui correspondrait à la tendance pré-crise sanitaire", détaillait ainsi l'organisme rattaché à la Première ministre.
Une réserve dont sont en revanche privés les ménages les moins aisés, qui auraient dépensé intégralement leur surcroît d'épargne, selon le CAE.
Du côté des entreprises, l'activité a montré de premiers signes de ralentissement en juin, mais reste en croissance.
En matière de commerce extérieur enfin, la France aligne depuis plusieurs mois des déficits record mais "on a eu d’évidence un rebond des flux touristiques (...) et des exportations aéronautiques" susceptibles d'équilibrer la balance commerciale, observe Stéphane Colliac.
Une faible hausse du PIB au deuxième trimestre maintiendrait en vie la prévision de croissance annuelle du gouvernement (+2,5%), légèrement plus optimiste que celle de l'Insee et de la Banque de France (+2,3%).
A l'inverse, en cas de stagnation et surtout de récession, "ça devient compliqué" de tenir l'objectif gouvernemental, juge Stéphane Colliac.
Mardi, le Fonds monétaire international (FMI) a nettement revu à la baisse sa prévision de croissance pour la France en 2022, à 2,3% contre 2,9% attendus fin avril dans ses précédentes projections.