«Il faut vraiment que personne ne craque»: aux urgences, un été sur la corde raide en France

Le service des urgences de l'hôpital des Quatres villes à Saint-Cloud, à l'ouest de Paris, le 20 juillet 2022 (Photo, AFP).
Le service des urgences de l'hôpital des Quatres villes à Saint-Cloud, à l'ouest de Paris, le 20 juillet 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 21 juillet 2022

«Il faut vraiment que personne ne craque»: aux urgences, un été sur la corde raide en France

  • Les récentes "fermetures intempestives" de Versailles et Poissy (Yvelines) ne facilitent ainsi pas la tâche du Dr Bernas
  • Le problème, c'est d'encaisser les pics. Au dessus de 90 par jour, les gens ne sont pas vus, ils repartent avant"

SAINT-CLOUD: Aux portes de Paris, dans une banlieue huppée mais pas épargnée par la pénurie de soignants, un petit service d'urgences tente de "maintenir le cap" et de pallier les fermetures "intempestives" de ses voisins, au prix de sacrifices répétés pour l'équipe.

"Des vacances? Je ne peux pas en prendre, il faut que je bouche les trous pour que les autres puissent partir": le Dr Florian Bernas a beau souligner que son service ne connaît "pas de manque d'effectif" et que pour les gardes de cet été "la grille est remplie", il n'en cache pas le prix.

"Tout le monde fait un peu d'heures sup', mais il faut vraiment que personne ne craque. Si on a le moindre arrêt de travail, je ne sais pas comment on fera", dit ce médecin de 41 ans, chef des urgences de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), qui recevaient en moyenne 60 patients par jour avant le Covid.

Mais "en ce moment, c'est plutôt 70", depuis que l'hôpital Foch de Suresnes, à quatre kilomètres au nord, a cessé d'accepter les "patients couchés" début juin. Un "délestage" des cas graves, contraint par le départ de plusieurs praticiens, qui se répercute sur les établissements voisins.

Sauf que beaucoup sont aussi dans une situation précaire. Les récentes "fermetures intempestives" de Versailles et Poissy (Yvelines) ne facilitent ainsi pas la tâche du Dr Bernas. "Le problème, c'est d'encaisser les pics. Au dessus de 90 par jour, les gens ne sont pas vus, ils repartent avant", dit-il.

Pour admettre les malades dans ses locaux exigus, sans laisser de brancard traîner dans les couloirs, les huit boxes de consultation sont souvent "dédoublés" avec des paravents. Tant pis pour l'intimité. D'autres salles hébergent des patients qui ne devraient plus rester aux urgences, faute de places "dans les étages".

La direction de l'hôpital le reconnaît: "D'habitude, on ne fermait pas de lits l'été", mais cette année "on a moins de solutions". A Saint-Cloud, "la médecine polyvalente a dû fermer des lits". A Sèvres, la gériatrie réduit la voilure de moitié. Pas d'autre choix, car "il faut tenir compte de l'épuisement des personnels et leur donner leurs congés".

«Rapidement à saturation»

Pendant ce temps, dans l'unité d'hospitalisation de courte durée accolée aux urgences, "c'est plein", constate la jeune infirmière Ophélie Leroy, 23 ans, qui entame ce mercredi sa tournée matinale. Au programme, "un peu de tout": décompensation cardiaque, détresse respiratoire, crise d'épilepsie, hépatite médicamenteuse, chute à domicile...

Après deux ans de ce régime, elle s'apprête à partir en octobre. "Pour un déménagement", précise-t-elle, "mais j'ai besoin de changer". Tout l'inverse de sa collègue Léa Couasnon, 31 ans, qui "aime bien quand ça bouge" et se trouve "très bien aux urgences", où elle officie d'ordinaire de nuit - 13 par mois - pour mieux s'occuper de son fils de 5 ans.

"Quand je suis de jour, j'ai pas de vie de famille", explique cette ancienne aide-soignante, qui accumule pourtant les heures supplémentaires - "plus de 300" l'an dernier - quitte à moins voir son "bout de chou". Trois semaines de congés lui tendent les bras, mais "c'est possible qu'on m'appelle en août pour prendre une garde", prédit-elle. Bien sûr, "c'est pas obligatoire, mais on pense aux autres filles, on ne peut pas les laisser comme ça".

Une solidarité essentielle, car dans ce petit service, "on arrive rapidement à saturation", relève Florence Tougne, 27 ans, elle aussi infirmière. Positionnée à l'accueil, elle est chargée d'effectuer le premier tri entre les vraies urgences et le reste.

"Certains viennent avec un diagnostic en tête, ou pensent que ce sera plus rapide pour avoir une IRM", raconte-t-elle. Parfois, l'hôpital est aussi le seul recours: "Pendant le pont du 14 juillet, les gens n'avaient pas leur médecin traitant, donc ils venaient parce qu'ils ne trouvaient pas d'autre solution".

Heureusement, l'effectif paramédical est quasiment au complet. "J'ai beaucoup de chance", souffle la cadre de santé Stéphanie Dubus, 38 ans, qui n'a elle non plus "pas de trous" dans ses plannings "jusqu'au mois de septembre".

Mais rien n'est acquis, "il faut maintenir le cap" malgré les déboires des hôpitaux voisins, ajoute-t-elle. "A côté, ça s'effondre. On doit essayer de se préparer à tout".


Paris entend résoudre les tensions avec Alger « sans aucune faiblesse »

le chef de la diplomatie française, chef de la diplomatie française (Photo AFP)
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  • Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ».
  • « L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

PARIS : Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ». Il s'exprimait au lendemain d'un entretien entre les présidents français et algérien, qui visait à renouer le dialogue après huit mois de crise diplomatique sans précédent.

« Les tensions entre la France et l'Algérie, dont nous ne sommes pas à l'origine, ne sont dans l'intérêt de personne, ni de la France, ni de l'Algérie. Nous voulons les résoudre avec exigence et sans aucune faiblesse », a déclaré Jle chef de la diplomatie française devant l'Assemblée nationale, soulignant que « le dialogue et la fermeté ne sont en aucun cas contradictoires ».

« L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

Les Français « ont droit à des résultats, notamment en matière de coopération migratoire, de coopération en matière de renseignement, de lutte contre le terrorisme et au sujet bien évidemment de la détention sans fondement de notre compatriote Boualem Sansal », a affirmé le ministre en référence à l'écrivain franco-algérien condamné jeudi à cinq ans de prison ferme par un tribunal algérien. 


Algérie: Macron réunit ses ministres-clés au lendemain de la relance du dialogue

Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
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  • Emmanuel Macron  réunit mardi plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune
  • Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales.

PARIS : Emmanuel Macron  réunit mardi à 18H00 plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune pour relancer le dialogue, a appris l'AFP de sources au sein de l'exécutif.

Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales après des mois de crise, selon le communiqué conjoint publié lundi soir.

Le ministre français de la Justice, Gérald Darmanin, effectuera de même une visite prochainement pour relancer la coopération judiciaire.

Le communiqué ne mentionne pas en revanche le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, figure du parti de droite Les Républicains, partisan d'une ligne dure à l'égard de l'Algérie ces derniers mois, notamment pour obtenir une nette augmentation des réadmissions par le pays de ressortissants algériens que la France souhaite expulser.

Bruno Retailleau sera présent à cette réunion à l'Élysée, avec ses deux collègues Barrot et Darmanin, ainsi que la ministre de la Culture, Rachida Dati, et celui de l'Économie, Éric Lombard, ont rapporté des sources au sein de l'exécutif.

 Dans l'entourage du ministre de l'Intérieur, on affirme à l'AFP que si la relance des relations décidée par les deux présidents devait bien aboutir à une reprise des réadmissions, ce serait à mettre au crédit de la « riposte graduée » et du « rapport de force » prônés par Bruno Retailleau. 


Algérie: la relance de la relation décriée par la droite

Cette photo prise le 25 août 2022 montre les drapeaux français et algérien avant l'arrivée du président français à Alger pour une visite officielle  afin d'aider à rétablir les liens avec l'ancienne colonie française, qui célèbre cette année le 60e anniversaire de son indépendance. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Cette photo prise le 25 août 2022 montre les drapeaux français et algérien avant l'arrivée du président français à Alger pour une visite officielle afin d'aider à rétablir les liens avec l'ancienne colonie française, qui célèbre cette année le 60e anniversaire de son indépendance. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • La droite a dénoncé mardi la relance de la relation bilatérale avec l'Algérie en minimisant son impact sur les obligations de quitter le territoire (OQTF).
  • Selon l'élu des Alpes-Maritimes, cette conversation entre les deux chefs d'État signifie « que les ministres n'ont aucun pouvoir, M. Retailleau en premier ».

PARIS : La droite a dénoncé mardi la relance de la relation bilatérale avec l'Algérie en minimisant son impact sur les obligations de quitter le territoire (OQTF), Laurent Wauquiez déplorant « une riposte très provisoire » et Éric Ciotti, allié du RN, dénonçant une relation « insupportable » entre les deux pays.

« La riposte était très graduée et en plus très provisoire », a réagi Laurent Wauquiez sur X au lendemain de la conversation entre les présidents français Emmanuel Macron et algérien Abdelmadjid Tebboune, qui ont acté une relance de la relation bilatérale, après des mois de crise.

Lors de la réunion du groupe des députés LR, l'élu de Haute-Loire, qui brigue la présidence du parti face au ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, s'est dit convaincu que les autorités algériennes n'accepteront pas les OQTF.

« On va se retrouver dans 90 jours avec les OQTF dangereux qui seront dans la nature. Nous ne pouvons pas l'accepter », a déploré le député de Haute-Loire.

De son côté, Éric Ciotti, l'ancien président des LR alliés avec le RN, a directement ciblé le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau sur CNews, lui reprochant de n'avoir montré que « des petits muscles face à Alger ».

Selon l'élu des Alpes-Maritimes, cette conversation entre les deux chefs d'État signifie « que les ministres n'ont aucun pouvoir, M. Retailleau en premier ».

« La relation privilégiée Macron-Algérie depuis 2016 perdure. Et cette relation est insupportable, parce qu'elle traduit un recul de notre pays. »

Les deux présidents, qui se sont entretenus le jour de l'Aïd el-Fitr marquant la fin du ramadan, ont marqué « leur volonté de renouer le dialogue fructueux », selon un communiqué commun.

La reprise des relations reste toutefois subordonnée à la libération de l'écrivain Boualem Sansal et à des enjeux de politique intérieure dans les deux pays.