COLOMBO: Le président par intérim du Sri Lanka a renouvelé l'état d'urgence lundi, à l'approche d'un vote parlementaire visant à désigner un nouveau chef de l'État, un scrutin dans lequel il est l'un des principaux candidats.
Ranil Wickremesinghe est devenu automatiquement président par intérim lorsque Gotabaya Rajapaksa a démissionné la semaine dernière après avoir fui à Singapour.
L'état d'urgence permet aux troupes d'arrêter et de détenir des suspects, et au président d'adopter des règlements qui annulent les lois existantes pour faire face aux troubles.
L'état d'urgence était déjà en place mais le Parlement ne s'était pas réuni pour ratifier la déclaration comme requis, et Wickremesinghe l'a prolongé à partir de lundi "dans l'intérêt de la sécurité publique", a-t-il déclaré.
La police et l'armée ont renforcé la sécurité avant le vote de mercredi pour élire un président pour le reste du mandat de M. Rajapaksa, qui se termine en novembre 2024.
L'ex-président a été contraint de fuir lorsque des dizaines de milliers de manifestants ont pris d'assaut sa résidence officielle après des mois de manifestations dans tout le pays, exigeant sa démission en raison de la crise économique.
M. Wickremesinghe, qui a été six fois Premier ministre, est soutenu pour ce poste par le parti de M. Rajapaksa.
Cherchant à gagner le soutien de 14 législateurs catholiques, selon certains, M. Wickremesinghe a demandé l'aide de la Grande-Bretagne pour mener à terme les enquêtes sur les attentats à la bombe du dimanche de Pâques 2019 qui ont fait 279 morts.
M. Wickremesinghe "demande l'aide du gouvernement britannique et de ses services de renseignement", a annoncé son bureau.
La minorité catholique du Sri Lanka, petite mais influente, estime que l'attaque suicide coordonnée contre trois églises et trois hôtels était un "complot politique" visant à porter M. Rajapaksa au pouvoir. Elle réclame depuis longtemps une enquête indépendante.
Le haut-commissariat britannique n'a pas fait de commentaire dans l'immédiat.
Les attentats à la bombe ont été attribués à des djihadistes locaux et 25 hommes ont été inculpés en octobre pour leur implication présumée.
Mais l'Église et les partis d'opposition affirment que des agents des services de renseignement de l'État fidèles à Gotabaya Rajapaksa ont soutenu directement ou indirectement les poseurs de bombe.
L'île de 22 millions d'habitants subit de graves pénuries de produits de première nécessité depuis la fin de l'année dernière, le pays n'ayant plus de devises étrangères pour financer les importations essentielles.
Le Sri Lanka a fait défaut sur sa dette extérieure de 51 milliards de dollars à la mi-avril et est en pourparlers avec le FMI pour un éventuel renflouement.
Sri-Lanka: des communautés pauvres tenaillées par la faim tandis que les prix grimpent
Ses cheveux sont soigneusement peignés, mais ses joues sont creuses et des veines visibles courent sur son corps décharné: comme de nombreux Sri Lankais, Milton Pereira et sa famille n'ont pas les moyens d'acheter suffisamment de nourriture.
Alors que le pays connaît sa pire crise économique et une inflation galopante, suscitant une vague de manifestations qui ont abouti à la chute du président la semaine dernière, les Sri Lankais achètent moins, mangent moins et travaillent moins.
"C'est très difficile de vivre, même une miche de pain est chère", explique M. Pereira à l'AFP devant sa modeste maison de Slave Island, une enclave pauvre de la capitale Colombo.
"Si nous prenons un repas, nous en sautons un autre", déclare cet homme de 74 ans, dont la famille compte six enfants.
"Comme nous n'avons pas beaucoup d'argent, alors nous donnons parfois le poisson aux enfants", dit-il, les adultes "se contentant de la sauce".
Déclenchées par la pandémie de coronavirus, les difficultés financières ont été exacerbées par la mauvaise gestion du gouvernement, selon les critiques.