Crise au Sri Lanka: que va-t-il se passer maintenant ?

Une pièce vandalisée par des manifestants est vue à la résidence officielle du président sri-lankais à Colombo le 15 juillet 2022, après avoir été envahie par des manifestants antigouvernementaux le 9 juillet. (AFP)
Une pièce vandalisée par des manifestants est vue à la résidence officielle du président sri-lankais à Colombo le 15 juillet 2022, après avoir été envahie par des manifestants antigouvernementaux le 9 juillet. (AFP)
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Publié le Samedi 16 juillet 2022

Crise au Sri Lanka: que va-t-il se passer maintenant ?

  • Même les plus fidèles alliés du président ont fini par le lâcher quand les pénuries d'aliments, d'électricité, de carburant et de médicaments se sont aggravées
  • Le pays divisé a toutefois fini par s'unir contre M. Rajapaksa quand l'inflation a dépassé les 50% et que quatre habitants sur cinq se sont vus obligés de sauter des repas en raison des pénuries d'aliments

COLOMBO: Le Premier ministre du Sri Lanka Ranil Wickremesinghe a prêté serment comme président par intérim après la fuite du pays et la démission de Gotabaya Rajapaksa.

Voici le point sur ce qui attend dans les prochaines semaines ce pays de 22 millions d'habitants où la crise économique sans précédent est aggravée par un système politique compliqué, corrompu et violent.

Pourquoi Rajapaksa a-t-il fui ? 

Sous Gotabaya Rajapaksa, le Sri Lanka a subi sa pire crise économique depuis l'indépendance et s'est déclaré en défaut de paiement. Depuis fin 2021, le pays est incapable de financer ses importations même les plus essentielles.

Cette crise a été déclenchée par la pandémie de Covid-19, qui a ravagé le secteur touristique grand pourvoyeur de devises pour l'île, mais a été aggravée par une série de mauvaises décisions politiques.

Même les plus fidèles alliés du président ont fini par le lâcher quand les pénuries d'aliments, d'électricité, de carburant et de médicaments se sont aggravées.

Le mécontentement populaire a explosé le 9 juillet: des centaines de manifestants ont pris d'assaut la résidence de M. Rajapaksa qui s'est enfui précipitamment et s'est réfugié dans une base de la marine, avant de partir pour Singapour via les Maldives, craignant pour sa vie.

Rajapaksa était-il populaire ? 

Gotabaya Rajapaksa était surnommé "Terminator" pour avoir écrasé la rébellion tamoule alors qu'il était ministre de la Défense, sous la présidence de son frère aîné Mahinda Rajapaksa entre 2005 et 2015.

S'il était apprécié par la majorité bouddhiste, il était au contraire honni par les minorités tamoule et musulmane qui voient en lui un raciste, un oppresseur et un criminel de guerre.

Le pays divisé a toutefois fini par s'unir contre M. Rajapaksa quand l'inflation a dépassé les 50% et que quatre habitants sur cinq se sont vus obligés de sauter des repas en raison des pénuries d'aliments.

Qui va gouverner le Sri Lanka désormais ?

La Constitution srilankaise prévoit que le Premier ministre assure l'intérim de la présidence jusqu'à ce qu'un nouveau chef de l'Etat soit désigné, dans un délai d'un mois.

M. Wickremesinghe, 73 ans, assure cet intérim depuis la démission formelle de M. Rajapaksa le 14 juillet, deux ans et sept mois après le début de son mandat de cinq ans.

Les 225 membres du Parlement doivent maintenant se réunir pour désigner un nouveau président pour terminer le mandat entamé par M. Rajapaksa.

Le président du Parlement, Mahinda Yapa Abeywardana, a annoncé que cette élection aurait lieu mercredi.

Qui sont les candidats à la succession ? 

Le président par intérim Ranil Wickremesinghe, un pro-occidental qui a été six fois Premier ministre, est le grand favori. Il s'est assuré le soutien du SLPP, le parti de Gotabaya Rajapaksa, qui dispose d'une majorité relative d'une centaine de sièges au Parlement.

Rien n'est toutefois joué, le vote des députés étant secret. Dans le passé, certains ont été accusés d'avoir monnayé leur voix.

Pendant une crise constitutionnelle en octobre 2018, plusieurs députés avaient ainsi affirmé s'être vus offrir 3,5 millions de dollars et des appartements à l'étranger en échange de leurs votes.

Un autre candidat de poids est l'ancien ministre des Médias Dullas Alahapperuma, 63 ans, un dissident du SLPP.

Le principal dirigeant d'opposition, Sajith Premadasa, 55 ans, a fait savoir vendredi soir qu'il entrerait dans la course.

"Même si c'est un combat difficile, je suis convaincu que la vérité triomphera", a-t-il dit, faisant remarquer que le parlement était toujours dominé par les fidèles de l'ex-président en fuite.

L'ancien chef de l'armée Sarath Fonseka, 71 ans et ennemi juré de la famille Rajapaksa, pourrait également tenter sa chance.

Quel impact sur les discussions avec le FMI ?

Tous les partis politiques du Sri Lanka soutiennent les négociations en cours avec le Fonds monétaire international (FMI) en vue d'un plan de sauvetage.

Le pays, dont l'économie s'est complètement effondrée, s'est déclaré mi-avril en défaut de paiement de sa dette extérieure de 51 milliards de dollars.

Le FMI a espéré jeudi que la crise au Sri Lanka serait rapidement résolue afin que les négociations, interrompues par les événements, puissent reprendre.

Mais l'adoption d'un plan de sauvetage risque d'être compliquée par les divisions au Parlement, où aucun parti ne dispose d'une majorité claire. Et le pays n'a même plus les moyens financiers d'organiser de nouvelles élections législatives à court terme.

Rajapaksa dit avoir fait «le maximum» pour son pays

L'ex-président du Sri Lanka Gotabaya Rajapaksa a affirmé avoir fait «le maximum» pour prévenir la catastrophe économique qui frappe son pays, mais que la pandémie avait réduit ses efforts à néant, selon sa lettre de démission lue samedi devant le Parlement.

Le secrétaire général du Parlement, Dhammika Dasanayake, a lu devant les députés la brève lettre de démission envoyée par M. Rajapaksa depuis Singapour, où il a fui.

«C'est une satisfaction personnelle pour moi d'avoir pu protéger notre peuple de la pandémie malgré la crise économique à laquelle nous étions déjà confrontés à l'époque», a écrit M. Rajapaksa.

Le Covid-19 a fait plus de 16.500 morts dans cette île de 22 millions d'habitants. M. Rajapaksa avait refusé d'instaurer un confinement lors de la première vague, et avait lancé aux médecins: «Ne paniquez pas».

L'un de ses ministres avait assuré que le Sri Lanka n'avait pas besoin de vaccins étrangers, et que les remèdes locaux des chamans étaient plus que suffisants.

M. Rajapaksa a également affirmé dans sa lettre que les réserves en devises du Sri Lanka étaient déjà basses lorsqu'il avait pris ses fonctions en novembre 2019, et que la pandémie qui a suivi avait dévasté l'économie.

Les chiffres officiels montrent cependant que le Sri Lanka disposait d'une confortable réserve de 7,5 milliards de dollars lorsque M. Rajapaksa est arrivé au pouvoir en 2019. Ces réserves n'étaient plus que d'un million de dollars au jour de son départ, et le pays est en cessation de paiements depuis la mi-avril.

«Les confinements entre 2020 et 2021 ont érodé les réserves de change», a plaidé l'ex-président. «J'ai fait le maximum pour le pays», a-t-il ajouté.

La lecture de la lettre et l'annonce officielle de la démission du président par le chef du parlement n'ont été suivis d'aucun débat, et la séance spéciale a été levée après 13 minutes.

Les députés srilankais doivent se retrouver la semaine prochaine pour élire le successeur de M. Rajapaksa, lequel s'est enfui à Singapour après l'invasion de sa résidence par des manifestants le 9 juillet dernier.

M. Dasanayake a confirmé que l'élection aurait lieu mercredi.

Le Premier ministre et président par intérim Ranil Wickremesinghe, 73 ans, est donné favori. Même s'il est lui aussi la cible de la colère des manifestants, il dispose du soutien du SLPP, le parti de M. Rajapaksa, qui dispose du plus grand nombre de sièges au Parlement.

Le chef de l'opposition Sajith Premadasa a déjà annoncé sa candidature, de même que le dissident du SLPP et ancien ministre des Médias Dullas Alahapperuma. L'ancien chef de l'armée Sarath Fonseka, 71 ans, a lui aussi manifesté son intention de se présenter.


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.


Les États-Unis proposent à l'ONU une résolution pour « une fin rapide » du conflit en Ukraine

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine.  (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
  • Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE.

NATIONS-UNIES : Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale du pays, après une nouvelle attaque du président américain Donald Trump contre son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Dans un communiqué, le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a exhorté les pays membres de l'ONU à approuver cette nouvelle résolution « simple » et « historique », et « tous les États membres à la soutenir, afin de tracer un chemin vers la paix ».

« Cette résolution est une bonne idée », a rapidement commenté l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassili Nebenzia, déplorant toutefois l'absence de référence « aux racines » du conflit.

Les Européens, désarçonnés par l'ouverture du dialogue américano-russe sur l'Ukraine, n'avaient pas réagi samedi matin à la proposition américaine.

« Nous n'avons pas de commentaire pour l'instant », a simplement indiqué l'ambassadeur français à l'ONU Nicolas de Rivière, alors que l'Assemblée générale doit se réunir lundi.

Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE, mais aussi à un mépris pour les principes fondamentaux du droit international », a déclaré à l'AFP Richard Gowan, de l'International Crisis Group.

L'Assemblée générale de l'ONU se réunit lundi pour marquer le troisième anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine.

À cette occasion, l'Ukraine et les Européens ont préparé un projet de résolution qui souligne la nécessité de « redoubler » d'efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre « cette année », et prend note des initiatives de plusieurs États membres ayant présenté « leur vision pour un accord de paix complet et durable ».

Le texte réitère également les précédentes demandes de l'Assemblée générale, appelant à un retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes d'Ukraine ainsi qu'à la cessation des attaques de la Russie contre l'Ukraine.

Ces précédents votes avaient rassemblé plus de 140 voix sur les 193 États membres.

Les nouvelles salves de M. Trump contre M. Zelensky interviennent alors que la visite de l'émissaire du président américain, Keith Kellogg, semblait avoir apaisé la situation. Ces nouvelles attaques de M. Trump contre M. Zelensky font suite à des premières invectives virulentes plus tôt dans la semaine, qui avaient suscité une vive réaction de la part de Kiev et la stupéfaction de ses alliés européens.

M. Zelensky avait déclaré avoir eu des échanges « productifs » avec M. Kellogg, et ce dernier l'avait qualifié de « dirigeant courageux et assiégé d'une nation en guerre ».

Vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réaffirmé que le président Vladimir Poutine était « ouvert » à des pourparlers de paix.

La Russie exige notamment que l'Ukraine lui cède quatre régions ukrainiennes, en plus de la Crimée qu'elle a annexée en 2014, et qu'elle n'adhère jamais à l'Otan. Des conditions jugées inacceptables par les autorités ukrainiennes qui demandent à leurs alliés des garanties de sécurité solides.

M. Trump et ses collaborateurs ont jugé « irréaliste » l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan et son ambition de reprendre ses territoires perdus à la Russie.

Sur le terrain, la situation reste difficile pour les troupes ukrainiennes. L'armée russe a revendiqué vendredi la prise de deux localités dans l'est de l'Ukraine.


60 ans après, l'assassinat de Malcolm X continue de secouer l'Amérique

L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
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  • Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ».
  • « Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

NEW-YORK : Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ». C'est ce que rappelle le Shabazz Center, le mémorial et centre éducatif installé dans l'ancienne salle de bal de Harlem où il a été abattu à 39 ans, au faîte de son influence, et ce quelques mois seulement après l'abolition de la ségrégation raciale.

Qui a commandité le meurtre ? Comment le drame a-t-il pu survenir en pleine réunion publique, alors que les menaces pesant sur le militant, porte-voix de la « Nation of Islam » puis de l'abolition des discriminations, étaient connues des autorités ?

Pour obtenir des réponses, sa famille a engagé en novembre 2024 des poursuites au civil spectaculaires, réclamant 100 millions de dollars aux forces de l'ordre et aux agences fédérales qu'elle accuse, selon elle, d'avoir joué un rôle à divers degrés dans son assassinat.

Dans ce dossier qui doit entrer dans le vif du sujet début mars devant un tribunal de Manhattan, la famille assure disposer d'éléments nouveaux lui permettant d'assigner en justice la police de New York (NYPD), le FBI ou encore la CIA.

« Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

- « Qui a donné l'ordre ? » -

Selon l'assignation en justice, la famille du leader afro-américain, également connu sous le nom d'El-Hajj Malik El-Shabazz, estime que les forces de l'ordre et les services de renseignement américains ont sciemment désengagé les policiers dont la mission était de le protéger la nuit du drame.

Des agents en civil ne sont pas non plus intervenus au moment des faits et, depuis sa mort, les agences de renseignement s'emploieraient à dissimuler leurs agissements, selon la plainte.

Contactée par l'AFP, la police de New York n'a pas souhaité s'exprimer pour l'instant.

« Cette dissimulation a duré des décennies, privant la famille Shabazz de la vérité et de leur droit à obtenir justice », estime auprès de l'AFP Me Ben Crump, qui défend le dossier pour les filles de Malcolm X.

« Nous écrivons l'histoire en nous dressant ici face à ces torts et en demandant des comptes devant les tribunaux », se félicite le conseil, qui a demandé vendredi la « déclassification de documents » liés à ce dossier.

L'affaire avait déjà rebondi en 2021, lorsque deux des trois anciens hommes reconnus coupables de l'assassinat et ayant passé plus de vingt ans derrière les barreaux ont finalement été innocentés, ce qui constitue l'une des plus grandes erreurs judiciaires des États-Unis. En réparation, les deux Afro-Américains ont touché 36 millions de dollars de la part de la ville et de l'État de New York.

« On sait déjà assez précisément comment l'assassinat de Malcolm X s'est déroulé. On sait qui en est responsable : cinq membres de la Nation of Islam. La seule chose qu'on ignore, c'est qui a donné l'ordre », observe Abdur-Rahman Muhammad, historien et spécialiste reconnu du dossier, dont les travaux pendant des décennies ont contribué à disculper les deux accusés à tort.

Selon lui, les éléments mis en avant aujourd'hui par la famille de Malcolm X sont « peu crédibles ».

Il concède toutefois que « si la plainte permet de déterminer qui a donné l'ordre final, alors elle aura de la valeur ».

Cet énième rebondissement aura au moins permis de remettre en avant « l'héritage » de Malcolm X, plus important que jamais sous le second mandat de Donald Trump, « ennemi implacable » de la communauté noire, affirme l'historien.

« Cela va inciter les Afro-Américains à se serrer les coudes », anticipe Abdur-Rahman Muhammad. « En résumé, la communauté noire doit revenir au message de Malcolm : lutter. »