LONDRES: Le Produit intérieur brut (PIB) du Royaume-Uni a baissé en avril pour le deuxième mois consécutif, une première depuis la forte chute du tout début de la pandémie, entreprises et ménages continuant d'encaisser la flambée des prix de l'énergie.
Le PIB a reculé de 0,3% en avril après s'être déjà replié de 0,1% le mois précédent, a annoncé l'Office national des statistiques (ONS) lundi dans un communiqué.
L'institut note notamment que le secteur manufacturier, où les entreprises sont "touchées par la hausse des prix du carburant et de l'énergie", a particulièrement souffert, a indiqué Darren Morgan, de l'ONS, sur Twitter.
La baisse du PIB d'avril est supérieure aux attentes des économistes, qui s'attendaient à un petit rebond et préviennent que l'inflation pèsera dans les mois à venir sur la demande des consommateurs, et donc sur l'activité.
La Banque d'Angleterre projette d'ailleurs pour l'an prochain une contraction de l'économie britannique, qui devrait se retrouver en queue du G7.
L'inflation avait bondi à 9% en avril sur douze mois au Royaume-Uni, un record en 40 ans, principalement à cause de l'énergie, dont les prix pourraient en outre encore bondir en octobre, accentuant la crise du coût de la vie.
La baisse du PIB est aussi marquée par la réduction de dépenses liées au Covid-19, alors que le pays avait notamment mis fin en avril aux tests gratuits, ce qui induit une "forte baisse (de l'activité) dans le secteur de la santé", selon l'ONS.
Sans cet effet, "le PIB aurait augmenté de 0,1%" en avril, ce qui "est loin d'une forte hausse, mais suggère que l'élan (de l'économie) n'est pas aussi faible que ne le laisse entendre" la baisse de l'activité, selon Paul Dales, de Capital Economics.
Le PIB était en outre en avril 0,9% au-dessus de ses niveaux pré-Covid.
Gare au jubilé
Yael Selfin, cheffe économiste chez KPMG UK, avertit que la baisse de l'activité au Royaume-Uni "ne sera probablement pas passagère".
"Le reste du deuxième trimestre pourrait voir le PIB reculer encore", en raison du ralentissement de l'économie mais aussi d'un jour férié supplémentaire en juin accordé pour le jubilé de la reine Elizabeth II, selon elle.
Accusé de ne pas en faire assez pour aider les plus modestes face à la flambée du coût de la vie, le ministre des Finances britannique Rishi Sunak avait dévoilé il y a quelques semaines un nouveau paquet d'aides de 15 milliards de livres, financé en partie par une taxe exceptionnelle sur le secteur de l'énergie.
Ce coup de pouce pourra aider la consommation des ménages et la croissance dans la deuxième moitié de l'année, selon Samuel Tombs, économiste chez Pantheon Macroeconomics.
"Une récession - soit deux trimestres de croissance négative - reste peu probable" cette année, selon lui, alors que "le revenu disponible des ménages en termes réels devrait augmenter aux troisième et quatrième trimestres" grâce aux aides annoncées par le Chancelier.
La Banque d'Angleterre a déjà revu plusieurs fois ses taux à la hausse depuis fin 2021 pour tenter d'enrayer la spirale de l'inflation, et pourrait décider d'agir à nouveau jeudi dans la même direction.
"Les temps sont durs pour les entreprises confrontées à des coûts en hausse", relève le principal syndicat patronal britannique (CBI), qui appelle le gouvernement à stimuler l'investissement des sociétés pour doper la croissance et éviter de sombrer dans la récession.
Le déclin de l'activité "est le résultat inévitable de la flambée de l’inflation, des perturbations des chaînes d'approvisionnement et de pénuries généralisées de main d'œuvre", relèvent de leur côté les Chambres de commerce britanniques (BCC).
Les BCC saluent toutefois la hausse "réconfortante" des exportations de biens britanniques en avril: celles-ci ont augmenté de 7,4%, tirées par une forte hausse (+8,1%) des exportations vers l'Union européenne, selon des chiffres publiés lundi par l'ONS. Les importations ont augmenté de 0,7% grâce à une hausse de 4,2% en provenance de l'UE.