Quai d'Orsay: La grève des diplomates interpelle et inquiète

Si la politique étrangère est la chasse gardée du président de la République, ce dernier s’appuie sur l’expertise du quai d’Orsay, qui est une formidable machine à décoder le monde et à préparer les décisions les plus appropriées. Le quai d'Orsay, dans une photo d'archives. (AFP)
Si la politique étrangère est la chasse gardée du président de la République, ce dernier s’appuie sur l’expertise du quai d’Orsay, qui est une formidable machine à décoder le monde et à préparer les décisions les plus appropriées. Le quai d'Orsay, dans une photo d'archives. (AFP)
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Publié le Jeudi 02 juin 2022

Quai d'Orsay: La grève des diplomates interpelle et inquiète

  • C’est le corps diplomatique avec son cortège de conseillers, ambassadeurs et ambassadeurs plénipotentiaires qui est voué à la disparition, par cette mesure présentée comme une réforme
  • En pratique, cela veut dire que dorénavant « pour les fonctions supérieures d’encadrement du ministère il sera possible de nommer n’importe quelle personne »

PARIS : Dans un pays comme la France où les grèves sont de l’ordre du sport national, un appel à une grève sectorielle a toutes les chances de passer inaperçu.

Pourtant, le préavis de grève déposé par des syndicats du ministère des Affaires étrangères interpelle et suscite des inquiétudes.

Il interpelle par son caractère presque inédit: «La grève n’est pas du tout dans la culture du quai d’Orsay, pour en arriver là, il fallait que la colère soit vraiment grande», affirme à Arab News en français l’ex-diplomate Nada Yafi.

L’objet du courroux est le décret promulgué entre les deux tours de l’élection présidentielle qui entérine à compter de janvier 2023 la disparition du corps diplomatique.

C’est le corps diplomatique avec son cortège de conseillers, ambassadeurs et ambassadeurs plénipotentiaires qui est voué à la disparition, par cette mesure présentée comme une réforme.

De quoi s’agit-il précisément?

Jusqu’à présent, dans la fonction publique, tous les agents appartenaient à un même corps, celui des administrateurs civils.

Il y avait par ailleurs deux ministères, dotés de corps spécifiques en raison des particularités des fonctions exercées: le ministère de l’Intérieur et son corps préfectoral, d’une part, et le quai d’Orsay et son corps diplomatique, d’autre part.

C’est ce corps diplomatique avec son cortège de conseillers, ambassadeurs et ambassadeurs plénipotentiaires qui est voué à la disparition, par cette mesure présentée comme une réforme.

Dès son entrée en vigueur, les deux corps diplomatique et préfectoral  fusionneront et auront pour nom «le corps des administrateurs de l’État».

En pratique, cela veut dire que, dorénavant, «pour les fonctions supérieures d’encadrement du ministère, il sera possible de nommer n’importe quelle personne», explique à Arab News en français un ambassadeur en exercice qui requiert l’anonymat.

Ce qui est sous-jacent et soulève l’inquiétude, ajoute-t-il, «c’est que ça donne le sentiment qu’en haut lieu on considère qu’être diplomate n’est pas un métier, puisque tout le monde peut le faire».

Yafi va plus loin, étant libérée du droit de réserve imposé à tout diplomate en exercice: «Je ne vois aucune raison à cette réforme, sauf à ouvrir la voie à des nominations de complaisance et non pas de compétence», indique-t-elle.

«On ne s’improvise pas diplomate, il s’agit d’un vrai métier qui exige une formation et une expérience qui s’acquiert sur le long terme, au contact de la réalité du terrain», assure Yafi,

Le diplomate de carrière acquiert, par sa connexion avec les divers services de l’ambassade, dans les divers postes où il est affecté, « un savoir pluridimensionnel: affaires consulaires, économiques, culturelles, militaires et bien sûr politiques. Ce ne serait pas le cas des personnes parachutées de l’extérieur».

Même réaction de la part de l’ambassadeur en exercice qui précise que «Personne auparavant n’avait jamais émis l’idée de supprimer le corps diplomatique. Aucun pays en Europe ou dans le monde ne l’a fait.»

D’ailleurs, ajoute-t-il, tout cela « participe d’une vision curieuse de l’État et de la fonction publique» de la part du président Emmanuel Macron qui a décidé sans concertation que cette spécificité est archaïque et obsolète et qu’il n’y a pas de raison de maintenir des corps spécifiques.

En effet, Macron n’a jamais caché les griefs qu’il nourrit à l’égard des diplomates.

Tout le monde se souvient des reproches qu’il a formulés à leur égard dans un discours prononcé en 2019 lors de la réunion annuelle des ambassadeurs, soulignant qu’ils ne font pas preuve de beaucoup de créativité dans l’exercice de leur métier.

Cette réforme porte des risques «de dissolution du ministère des Affaires étrangères».

De même, tout le monde se souvient du tollé suscité autour de la nomination par l’Élysée de l’écrivain Philippe Besson, un proche du couple présidentiel, au poste de consul général de France à Los Angeles, ainsi que du démantèlement de la prestigieuse École nationale d’administration (ENA) d’où sont issus les cadres du corps diplomatique français.

Il n’en est pas moins vrai que les conséquences peuvent être lourdes en ce qui concerne la diplomatie française et son rayonnement dans le monde.

C’est ce que souligne Yafi en affirmant que «La perte d’une telle expertise priverait la France de capteurs indispensables dans la conduite de sa politique étrangère.»

Cette réforme porte des risques «de dissolution du ministère des Affaires étrangères».

Si la politique étrangère est la chasse gardée du président de la République, ce dernier s’appuie sur l’expertise du quai d’Orsay, qui est une formidable machine à décoder le monde et à préparer les décisions les plus appropriées.

S’en passer «serait grave pour notre politique étrangère et la défense de nos intérêts», selon l’ambassadeur.

Concernant le rôle qu’aurait pu jouer l’ancien ministre des Affaires étrangères Jean-Yves le Drian, l’ambassadeur estime qu’il «n’a pas été très courageux, il est monté au créneau mais il n’a pas eu gain de cause».

Sur une telle affaire, renchérit-il, «il n’avait rien à perdre, il pouvait mettre sa démission sur la table. Mais il a manqué de courage».

Il faut bien dire que cette réforme est loin d’être un cadeau de bienvenue pour la nouvelle cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna.

Il lui incombe désormais de mettre en œuvre une réforme qui n’est ni facile ni agréable, et qui mènera à la mise à mort d’un corps de métier auquel elle est certainement attachée, ayant mené l’ensemble de sa carrière dans ses rangs.


Paris appelle les forces rwandaises à «quitter instamment la RDC»

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  • "La souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC ne sont pas négociables", a déclaré à la presse le porte-parole de la diplomatie française Christophe Lemoine, selon qui le ministre Jean-Noël Barrot est attendu à Kigali après s'être rendu à Kinshasa
  • Dans la capitale congolaise, M. Barrot s'est entretenu dans la matinée avec le président Félix Tshisekedi avant de s'envoler pour Kigali où il doit rencontrer Paul Kagame

PARIS: Paris appelle les forces rwandaises à "quitter instamment" la République démocratique du Congo et le groupe armé M23 qu'elles soutiennent à "se retirer immédiatement des territoires dont il a pris le contrôle", a affirmé jeudi le ministère des Affaires étrangères.

"La souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC ne sont pas négociables", a déclaré à la presse le porte-parole de la diplomatie française Christophe Lemoine, selon qui le ministre Jean-Noël Barrot est attendu à Kigali après s'être rendu à Kinshasa.

Dans la capitale congolaise, M. Barrot s'est entretenu dans la matinée avec le président Félix Tshisekedi avant de s'envoler pour Kigali où il doit rencontrer Paul Kagame.

Comme l'avait fait Emmanuel Macron lors d'un échange téléphonique avec son homologue rwandais il y a quelque jours, le chef de la diplomatie française, "redira cette position: le retrait des troupes rwandaises" du territoire de la RDC, selon Christophe Lemoine.

La démarche diplomatique française s'inscrit "en soutien aux processus" de Luanda et de Nairobi", des médiations conduites par l'Angola et le Kenya, respectivement au nom de l'Union africaine et de la Communauté des États d'Afrique de l'Est, a-t-il précisé.

Le groupe armé antigouvernemental M23 a pris le contrôle de Goma, grande ville de plus d'un million d'habitants, à l'issue d'une offensive éclair de quelques semaines au côté de troupes rwandaises. Il a indiqué jeudi qu'il continuerait sa "marche de libération jusqu'à Kinshasa".


Larcher au PS: «censurer à nouveau le gouvernement» serait «irresponsable»

Le président du Sénat français Gérard Larcher (C) s'exprime après le discours du Premier ministre français François Bayrou (non vu) au Sénat, la chambre haute du parlement français, à Paris le 15 janvier 2025. (AFP)
Le président du Sénat français Gérard Larcher (C) s'exprime après le discours du Premier ministre français François Bayrou (non vu) au Sénat, la chambre haute du parlement français, à Paris le 15 janvier 2025. (AFP)
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  • Le président LR du Sénat Gérard Larcher a appelé jeudi les socialistes à "la responsabilité", car "censurer à nouveau le gouvernement" serait "une idée irresponsable"
  • Si la commission mixte paritaire, composée de sept députés et sept sénateurs, parvient à s'entendre jeudi ou vendredi, le texte de compromis reviendra au vote à l'Assemblée lundi et au Sénat mardi

PARIS: Le président LR du Sénat Gérard Larcher a appelé jeudi les socialistes à "la responsabilité", car "censurer à nouveau le gouvernement" serait "une idée irresponsable", alors qu'une réunion cruciale pour trouver un compromis entre Assemblée et Sénat sur le projet de budget de l'État doit s'ouvrir à 9h30.

"Il faut qu'ils mesurent leur responsabilité vis-à-vis du pays", a déclaré Gérard Larcher sur France 2. "Est-ce qu'on peut continuer à être sans budget, avec les conséquences que ça a au quotidien pour les citoyens, pour les collectivités territoriales, pour le monde économique?", a-t-il interrogé.

Si la commission mixte paritaire, composée de sept députés et sept sénateurs, parvient à s'entendre jeudi ou vendredi, le texte de compromis reviendra au vote à l'Assemblée lundi et au Sénat mardi. Dans la chambre basse, le Premier ministre François Bayrou devrait faire usage du 49 alinéa 3 de la Constitution, pour le faire adopter sans vote et donc s'exposer à une motion de censure des députés.

"Est-ce qu'on peut continuer à jouer de cette manière? Je pense que les socialistes sont des gens responsables et qu'à un moment ou un autre, ils marqueront  clairement qu'ils ne sont pas d'accord avec ce budget", a défendu le président du Sénat. "Mais l'idée de censurer à nouveau le gouvernement m'apparaît une idée irresponsable".

Interrogé sur le point d'achoppement spécifique de l'aide médicale d'État (AME) avec la gauche mais aussi les macronistes, qui appartiennent à la coalition gouvernementale, Gérard Larcher a souhaité que la réduction de son enveloppe par le Sénat ne soit pas "caricaturée".

"Bien entendu, les soins d'urgence, les grossesses, la prévention, les vaccins, tout ceci est maintenu", a-t-il assuré, "mais nous réduisons l'enveloppe de l'aide médicale d'État et nous mettons sous condition d'avis médical un certain nombre d'interventions".

La droite souhaite diminuer de 200 millions les crédits alloués à l'AME réservée aux étrangers en situation irrégulière. In fine, la version commune proposée devrait acter cette réduction, selon une source parlementaire.


L’Europe en rangs dispersés face à la déferlante Trump

Le président américain Donald Trump arrive sur la pelouse sud de la Maison Blanche à Washington, DC, le 27 janvier 2025. (AFP)
Le président américain Donald Trump arrive sur la pelouse sud de la Maison Blanche à Washington, DC, le 27 janvier 2025. (AFP)
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  • Les Européens ont beau tenter de se préparer au retour de la déferlante Trump, ils ne sont toujours pas à jour, selon un ancien diplomate français
  • Il craint que l’Europe ne soit en train de risquer gros, en raison de son manque de préparation

PARIS: Ça va mal pour l’Europe. C’est le constat que fait un ancien diplomate français, un peu plus d’une semaine à peine, après l’investiture du président Républicain Donald Trump pour un nouveau mandat à la Maison Blanche.

Durant son premier mandat (2017 à 2021), les dirigeants européens ont certes eu le loisir d’expérimenter ses méthodes brusques unilatérales et souvent provocantes.

Ils ont également compris que toutes ses décisions sont prises sur la seule base des intérêts des États Unis partant du fameux slogan « America first », faisant fi des accords internationaux et bilatéraux ainsi que des intérêts de ses propres alliés.

Pendant ces cinq années, Trump à avancé à la manière d’une déferlante, porté par un courant d’américains protestataires, que certains croyaient éphémère et voué à disparaître sous le poids des frasques présidentielles.

Depuis son retour à la Maison Blanche, Trump s’est d’emblée livré à une multitude de coups d’éclat, dont le dernier en date est sa décision de se retirer de nouveau de l’Accord de Paris sur le climat.

- Arlette Khouri

Avec sa réélection pour succéder au président démocrate Joe Biden, force est de constater que c’est le contraire qui s’est passé.

Au lieu de se dissiper, le courant protestataire s’est radicalisé, pour devenir un courant idéologique porteur d’une vision bien précise du monde et de la place suprémaciste  des États-Unis à la tête de ce monde.

Les européens ont eu beau tenté de se préparer au retour de la déferlante Trump, ils ne sont toujours pas à jour assure l’ancien diplomate, qui craint que l’Europe ne soit en train de risquer gros, par son manque de préparation.

Or depuis son retour à la Maison Blanche, Trump s’est d’emblée livré à une multitude de coups d’éclat, dont le dernier en date est sa décision de se retirer de nouveau de l’Accord de Paris sur le climat.

Auparavant il avait assuré qu’il est en mesure de régler le conflit ukrainien en 24 heures dans l’ignorance la plus totale des intérêts européens et des menaces que cela peut impliquer au niveau de la sécurité du continent.

Sans tenir compte de leurs capacités économiques, il a sommé les pays européens de consacrer cinq pour cent de leurs revenus au budget de la défense, tout en laissant planer un doute sur l’avenir de l’engagement américain dans le cadre de la sécurité européenne.

Il a réitéré  à souhait son attachement à une mondialisation débridée, privilégiant les marchés et les produits américains, sans écarter une hausse exorbitante des droits de douanes sur les exportations européennes vers les États-Unis.

Pour comble, le couple franco-allemand qui a pendant de longues années été le moteur qui fait évoluer l’Europe et met un peu d’ordre dans ses rangs est en panne.

- Arlette Khouri

Face à cela, souligne la source diplomatique, il faut une Europe homogène, et unifiée au sujet de l’attitude à adopter face au retour de Trump, mais cela est loin d’être le cas, puisque les rangs européens sont plus que jamais dispersés.

Pour comble, le couple franco-allemand qui a pendant de longues années été le moteur qui fait évoluer l’Europe et met un peu d’ordre dans ses rangs est en panne, pour des raisons inhérentes à la mauvaise conjoncture politique aussi bien à Paris qu’à Bonn.

Selon la même source l’Europe diverge et hésite, entre une approche d’apaisement et une approche robuste et défensive.

La présidente de la commission européenne, Ursula Von Der Leyen prône une approche latérale, qui consiste à proposer au président américain « des Deals » conçus de façon à donner à Trump l’impression d’être à son avantage.

La France, indique la source, cherche à dégager un minimum de dénominateurs communs entre les composantes européennes, et une approche commune à minima pour éviter à l’Europe, nombre de revers économiques et politiques dans les cinq années à venir.

Cela semble en tout cas  être l’objectif de la rencontre européenne informelle qui se tiendra à l’initiative de la France au Château Limont, le 3 février prochain, sans aucune garantie de succès, surtout que précise la source, certains pays d’Europe, dont l’Italie et la Pologne, courtisent Trump.

Par ailleurs, cette approche ne fait pas l’unanimité en France, où de nombreuses voix s’élèvent à la faveur d’une politique musclé face aux États-Unis, allant jusqu’à brandir le slogan « œil pour œil et dent pour dent », pour affronter l’agressivité Trumpiste.

La période est cruciale estime l’ancien diplomate, et à défaut d’unité et de préparation, les années à venir risquent d’être une sorte de « vallée de larmes », aussi bien pour l’Europe que pour le reste du monde, lorgné à travers le prisme abrupte et arbitraire du président américain.